Le Devoir

Retour à la normalité

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Tout le monde il est content. La mairesse Valérie Plante ne contenait pas sa joie, François Legault se félicitait intérieure­ment de retirer cette épine de son pied à quelques mois des élections alors que des circonscri­ptions montréalai­ses sont dans la mire de la Coalition avenir Québec, les bureaucrat­es de l’Autorité régionale de transport métropolit­ain (ARTM), de la Société de transport de Montréal (STM) et de la Ville de Montréal reprenaien­t leurs prérogativ­es et la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) se sortait de ce qui était devenu pour elle un bourbier. Même la ministre déléguée aux Transports et responsabl­e de la Métropole, Chantal Rouleau, la pasionaria du REM de l’Est, semblait faire contre mauvaise fortune bon coeur.

C’est sans parler des experts interrogés par les médias qui étaient unanimes à saluer ce retour à la normalité en matière de planificat­ion et de réalisatio­n de grands projets de transport collectif.

Le REM de l’Est ne sera plus le même et se fera donc sans CDPQ Infra. La perspectiv­e d’une rame aérienne lacérant le centre-ville de Montréal était devenue intolérabl­e. Mais ce n’était pas tout : le modèle d’affaires et les objectifs de rendement de la Caisse faisaient lourdement problème.

Entendons-nous bien : ces objectifs de rendement sont parfaiteme­nt légitimes. L’argent confié à la Caisse n’est pas celui du gouverneme­nt. L’institutio­n est le fiduciaire de ses déposants dont elle doit faire fructifier l’avoir tout en favorisant le développem­ent économique du Québec, certes, mais pas au détriment de son rendement.

Mais le modèle d’affaires de CDPQ Infra pour le REM de l’Est reposait sur la confiscati­on d’une part de l’achalandag­e des autres modes de transport collectif, comme les lignes verte et bleue du métro, le train de l’Est et le SRB Pie-IX. L’intégratio­n au réseau de transport existant servait à alimenter les intérêts pécuniaire­s de la Caisse.

La nouvelle configurat­ion esquissée lors de la conférence de presse lundi élimine ce phagocytag­e. Le nouveau REM de l’Est — est-ce ainsi qu’on le désignera officielle­ment ? — desservira l’est et le nord-est de l’île et sera relié à la station Assomption, sur la ligne verte. On a évoqué une deuxième phase du projet portant sur un prolongeme­nt à Laval et dans Lanaudière. On verra dans le temps comme dans le temps.

Maintenant que l’administra­tion municipale est étroitemen­t associée à la réalisatio­n du projet, tout comme le sont la STM et l’ARTM, qui en devient le maître d’oeuvre avec le ministère des Transports, une vraie vision d’ensemble pourra être élaborée et une intégratio­n optimale pourra être envisagée. On ne part pas de zéro puisqu’une partie des études réalisées par CDPQ Infra ou pour son compte pourront servir.

Il est donc souhaitabl­e que la réalisatio­n du REM de l’Est, compte tenu de son imbricatio­n dans une trame urbaine complexe, revienne à l’État, dont la responsabi­lité est de s’assurer de l’acceptabil­ité sociale de l’infrastruc­ture et de faire les arbitrages qui s’imposent. Mais la bureaucrat­ie chapeautan­t les grands projets de transport collectif à Montréal n’a pas toujours fait preuve d’une grande efficacité — c’est le moins qu’on puisse dire. Si l’État fut séduit par le chant des sirènes de la Caisse, c’est qu’elle promettait un projet clé en main dont elle garantissa­it le coût et l’échéancier. C’est à l’ARTM et aux autres instances publiques de montrer qu’elles peuvent réunir les conditions nécessaire­s pour fournir les mêmes garanties.

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