Le Devoir

Un ultime salut au Démon blond

Membres de la famille, artistes, politicien­s, collègues et fans de Guy Lafleur étaient nombreux mardi pour dire adieu à la légende québécoise du hockey

- ÉRIC DESROSIERS LE DEVOIR

Le Québec a dit un dernier au revoir, mardi, à son numéro 10 : Guy Lafleur.

Les funéraille­s nationales de l’ancienne grande vedette du hockey se sont tenues à la cathédrale Marie-Reine-du-Monde, à deux coins de rue de l’endroit où joue le Canadien de Montréal et où la dépouille du Démon blond avait été en chapelle ardente les deux jours précédents. La cérémonie, à laquelle ont assisté plusieurs centaines de personnes, à l’intérieur comme à l’extérieur, a été encore une fois l’occasion de rendre hommage à ses talents exceptionn­els de joueur ainsi qu’à ses qualités humaines.

Dans la cathédrale, de nombreux politicien­s, de nombreux anciens et jeunes joueurs de hockey et d’autres personnali­tés publiques sont venus entourer la famille et les proches. On y a vu notamment les premiers ministres du Québec et du Canada, François Legault et Justin Trudeau, d’anciens premiers ministres québécois, plusieurs autres élus, de nombreux anciens joueurs du Canadien, les membres de l’équipe actuelle, des anciens joueurs d’autres équipes, le commissair­e de la Ligue nationale de hockey, Gary Bettman, des artistes ainsi qu’un peu plus d’une centaine de personnes du public qui étaient venues assister à l’événement à l’extérieur, mais qu’on a invitées à l’intérieur.

Comme il se doit, c’est à l’annonceur du Centre Bell qu’on avait confié le rôle de présenter les personnes invitées à rendre hommage au disparu avec, toutes les fois où cela était possible, le numéro de leur chandail.

Lors d’une cérémonie qui s’est déroulée dans un silence ému brisé de nombreux rires, l’ex-gardien et numéro 33, Patrick Roy, a rappelé l’accueil triomphal que les partisans du Canadien avaient réservé à Guy Lafleur lorsqu’il avait effectué son retour au Forum de Montréal dans l’uniforme des Rangers de New York. Cette soirée de février 1989 était « tellement magique que, quand il a “scoré” deux buts, j’ai eu une ovation ! » « Au-delà des statistiqu­es, des prouesses et des exploits, on prend aujourd’hui toute la mesure de ton legs et des valeurs de coeur que tu as insufflées à des génération­s », a dit le gardien.

L’ex-capitaine du Canadien et numéro 12, Yvan Cournoyer, a remercié le directeur général de l’époque, Sam

Pollock, d’avoir repêché la jeune vedette des Remparts de Québec et de lui avoir permis d’avoir un pareil coéquipier. L’ancien défenseur et numéro 19, Larry Robinson, a rappelé de son côté une phrase que Guy lui avait dite et qu’il mettait toujours en pratique : « Joue chaque jour comme si c’était le dernier. »

« Guy était un joueur extraordin­aire qui pouvait faire des choses sur la glace qu’on aurait tous rêvé pouvoir faire, a dit un autre ancien capitaine, Guy Carbonneau, numéro 21. Mais ce qui le rendait vraiment spécial, c’est comment il faisait se sentir les gens autour de lui. Il les inspirait et les faisait sentir importants. »

L’organisati­on du Canadien a souvent fait les frais du franc-parler de Guy Lafleur, a admis son propriétai­re, Geoff Molson. « Parfois, ses commentair­es étaient difficiles à accepter, mais il avait généraleme­nt raison. » Il n’en a pas moins été « un ambassadeu­r hors pair » à « l’incommensu­rable influence ». Sur la glace, « il était le meilleur joueur dans la meilleure équipe au monde ». Hors de la glace, il s’est montré « un homme avec de la classe et une humilité qui faisaient oublier la célébrité et le statut de vedette qu’il avait ».

Mon père, ce héros

« Il y a tellement de choses que j’admire chez mon père », a dit de Guy Lafleur son fils Martin. « Il était fier de nous, même dans les moments difficiles que nous avons traversés dans la famille. » S’il a « toujours pris soin de sa famille malgré ses nombreux engagement­s », il voulait aussi « prendre soin de tout le monde, même les gens qu’il ne connaissai­t pas ».

Il était impossible, au cours des 50 dernières années, d’aller au restaurant avec lui sans qu’il accepte de prendre au moins quelques minutes pour signer les autographe­s qu’on lui demandait, a raconté sa belle-soeur, Francine Barré.

« Je vais me souvenir longtemps, comme vous tous, du grand hockeyeur qu’il a été, avec son coup de patin tellement naturel, son sourire, sa chevelure au vent, mais surtout, je vais me souvenir de l’homme humble, généreux, droit, intègre qu’il a été », a-t-elle déclaré.

« Il laisse un peu de lui dans le coeur non seulement des membres de sa fa-* mille, de sa belle-famille et de ses amis, mais aussi dans celui de chacun des Québécois et des Québécoise­s », a-t-elle conclu avant que Ginette Reno vienne interpréte­r sa chanson L’essentiel et qu’on passe au volet plus religieux de la cérémonie, présidé par l’archevêque de Montréal, Christian Lépine.

Des milliers de numéros 10

C’est sous les applaudiss­ements que le cercueil, recouvert des couleurs bleublanc-rouge du Canadien, a été escorté dans l’allée centrale vers l’extérieur de la cathédrale. Comme une vague qui continuait sa course, les applaudiss­ements se sont transmis aux centaines de personnes qui avaient suivi la cérémonie à l’extérieur sur des écrans géants. Comme au Forum pendant tellement d’années, on a entendu des voix scander « Guy, Guy, Guy ! ». D’autres ont plus simplement lancé des « Merci, Guy ! » lors du passage du cortège funéraire.

Annie Côté et Jocelyn Murray auraient dû être de cette foule. Les nouveaux retraités étaient descendus d’Alma pour aller à la chapelle ardente dimanche. « C’était mon idole de jeunesse, raconte Jocelyn, un numéro 10. Je le regardais jouer à la télé le samedi soir et j’essayais ensuite de faire comme lui le restant de la semaine sur la glace. »

La chance a voulu, mardi matin, qu’on les repère avec leurs chandails du Canadien et qu’on les invite à assister à la cérémonie à l’intérieur de la cathédrale. « C’était très beau, très émouvant », dit Annie.

Elle admet, un peu gênée, n’avoir jamais particuliè­rement porté dans son coeur l’équipe de Montréal, « mais aujourd’hui, c’est différent. Il s’agit de Guy Lafleur », a-t-elle expliqué avant que le couple aille faire un dernier tour du côté de la statue du Démon blond au Centre Bell.

Guy Lafleur est décédé le 22 avril d’un cancer du poumon, à l’âge de 70 ans. Le natif de Thurso, en Outaouais, a disputé 17 saisons dans la LNH, dont 14 avec le Canadien, devenant le meilleur pointeur de l’histoire de la formation montréalai­se. Il laisse dans le deuil son épouse, Lise, ses fils, Martin et Mark, sa mère, Pierrette Lafleur, sa petite-fille, Sienna-Rose, ainsi que ses soeurs, Lise, Gisèle, Suzanne et Lucie.

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR Le cercueil de Guy Lafleur est arrivé à la cathédrale Marie-Reine-du-Monde, mardi, après avoir été exposé en chapelle ardente au Centre Bell les deux jours précédents.

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