Les aînés en plus grand nombre hors de Montréal
Une analyse canadienne révèle que, dans les régions du Québec, certaines villes comptent plus de 30 % d’aînés
La population du Québec vieillit plus vite que le reste du Canada, mais ce phénomène s’accélère hors de la métropole. Dans certaines villes de la province, les aînés comptent désormais pour plus de 30 % de la population.
En effet, plusieurs municipalités de moyenne taille sont en passe de détrôner des villes considérées comme des havres pour retraités, notamment la ville de Victoria, en Colombie-Britannique, mais pas nécessairement pour les mêmes raisons.
Une analyse réalisée par l’Association d’études canadiennes relève que si près d’un Québécois sur cinq (19 % en 2021) a maintenant passé l’âge de 65 ans, c’est le cas de 23,3 % de la population hors de Montréal.
Le vieillissement s’est notamment accéléré à Shawinigan, Sorel-Tracy, Magog et Hudson, où la part de résidents de plus de 65 ans dépasse maintenant 30 %, indiquent les dernières données de Statistique Canada, publiées le 27 avril dernier.
En à peine cinq ans (entre 2016 et 2021), la proportion d’aînés a aussi bondi de plus de quatre points de pourcentage à Thetford Mines (32,5 %), à Joliette (28,8 %), à Rivière-du-Loup (28,3 %), à Cowansville et à Lachute (respectivement à 28,2 %).
Dans la petite ville de Saint-CharlesBorromée, 38,8 % de la population a passé le cap des 65 ans.
Selon Jack Jedwab, président de l’Association d’études canadiennes, ce phénomène s’explique essentiellement par le faible apport de l’immigration dans certaines régions et un taux de natalité en chute libre. « Les migrations interprovinciales jouent aussi un facteur. Il y a plus de jeunes qui quittent ces villes en région pour les grands centres », dit-il.
Même la ville de Québec abrite une proportion de personnes âgées (22,8 %) flirtant avec celle observée à Victoria, considérée comme un lieu de retraite par excellence (23,4 %). Dans la région métropolitaine, l’afflux de nouveaux arrivants, souvent des familles en bas âge, rajeunit la pyramide démographique (18 % de 65 ans et plus).
Retraites reportées
Le vieillissement de plusieurs régions entraîne le maintien en emploi de gens de plus âgés, ajoute M. Jedwab. « Cela a un impact sur nos politiques en matière de services de santé, mais aussi sur nos politiques d’emploi, dit-il. Il faut tenir compte de ces nouvelles réalités. »
Pour l’instant, le Québec est une des provinces où les travailleurs se retirent le plus tôt du marché du travail, exacerbant la pénurie de main-d’oeuvre actuelle. Si le taux d’emploi chez les plus de 60 ans oscille autour de 36,2 % au Québec, il atteint 42 % dans les Maritimes et 63 % en Irlande. En France, c’est à peine plus de 20 % des travailleurs qui sont encore au boulot à cet âge.
Selon Yves Carrière, professeur agrégé au Département de démographie de l’Université de Montréal, le vieillissement de la population accentué dans certaines régions est le résultat de divers phénomènes. « Ça n’a pas le même impact partout. À Victoria, les gens sont pour la plupart actifs et en bonne santé physique et financière, ce qui n’est pas toujours le cas dans certaines régions éloignées du Québec. Mais dans d’autres régions, comme les Laurentides, le vieillissement est notamment dû à l’afflux de jeunes retraités actifs », dit-il.
Ce vieillissement va s’accentuer en 2022 alors que la plus importante cohorte dans la population québécoise, celle des bébés de l’après-guerre, va atteindre l’âge de 65 ans, ajoute M. Carrière.
« Mais ces personnes n’ont pas du tout le même profil que celles d’il y a 30 ans. Le tiers des hommes sont encore actifs à cet âge. Il est certain que les entreprises vont devoir s’adapter en prévoyant des primes de rétention pour les plus âgés, de la flexibilité et des horaires adaptés, ou améliorer leur productivité générale. »