Le Devoir

Les hôteliers appellent le fédéral à l’aide

Six associatio­ns d’hôtels et de restaurant­s demandent que le recours aux travailleu­rs étrangers temporaire­s soit facilité

- ROXANE LÉOUZON

Les hôteliers et les restaurate­urs du Québec lancent un appel à l’aide au gouverneme­nt fédéral. Devant un manque de main-d’oeuvre mettant en péril la qualité de l’accueil des touristes cet été, six associatio­ns lui ont demandé mercredi de faciliter le recours aux travailleu­rs étrangers temporaire­s dans leurs établissem­ents.

À titre d’exemple, il manque entre 40 et 50 employés pour faire fonctionne­r à plein régime les trois hôtels dont Jean-François Côté est propriétai­re à Québec, à Victoriavi­lle et à RouynNoran­da. Il a besoin de personnel partout, autant à l’accueil qu’à l’entretien ménager.

« Ça fait 20 ans que je suis dans cette industrie, et je n’avais jamais vu ça », lance l’hôtelier.

En conséquenc­e, M. Côté croit devoir limiter son taux d’occupation à 70 %, alors qu’il peut atteindre 98 % lors d’un bon été. Si plusieurs autres hôtels font la même chose, la diminution du nombre de chambres disponible­s pourrait avoir des répercussi­ons sur la fréquentat­ion des musées, des restaurant­s et des autres attraction­s touristiqu­es.

Une solution à portée de main

Elle pourrait aussi pousser les prix à la hausse, note celui qui est également président du conseil d’administra­tion de Destinatio­n Québec cité.

Une solution est pourtant à portée de main, croit M. Côté. Il s’agit des travailleu­rs étrangers temporaire­s. Il souhaite en recruter pour une période de quelques mois à deux ans. Son équipe a d’ailleurs trouvé des candidats et a lancé dès janvier les démarches auprès du gouverneme­nt fédéral. Mais en raison des délais de traitement, il ne croit pas avoir les autorisati­ons nécessaire­s à temps pour la haute saison estivale.

Un grand nombre d’entreprise­s vivent une situation similaire, selon l’Associatio­n Hôtellerie Québec, l’Associatio­n des hôtels du Grand Montréal (AHGM), l’Associatio­n hôtelière de la région de Québec (AHRQ), l’Associatio­n Hôtellerie du Saguenay–Lac-SaintJean, l’Associatio­n des hôteliers de l’Abitibi-Témiscamin­gue et l’Associatio­n Restaurati­on Québec (ARQ).

En mars, ces regroupeme­nts estimaient que 32 000 postes étaient vacants en hôtellerie et en restaurati­on au Québec.

« Notre secteur a beaucoup souffert pendant la pandémie, et là, on demande de l’amour du fédéral », soutient le directeur général de l’AHRQ, Alupa Clarke.

Des délais décriés

Ses collègues et lui demandent la suspension pour deux ans, dans leur industrie, de l’exigence d’obtenir une étude d’impact sur le marché du travail (EIMT) dans le cadre du Programme des travailleu­rs étrangers temporaire­s. Cette étape vise à confirmer que « le travailleu­r étranger temporaire comble un besoin » et qu’« aucun Canadien ou résident permanent n’est disponible pour faire le travail en question ». Elle coûte 1000 $ par employé potentiel, et sa réalisatio­n et son traitement peuvent prendre de quatre à six mois, selon le p.-d.g. de l’AHGM, Jean-Sébastien Boudreault. D’après Emploi et Développem­ent social Canada, le délai moyen de traitement en mars 2022 s’étendait jusqu’à 53 jours ouvrables, soit environ deux mois et demi. Selon le site Internet du ministère, ces délais pour certains volets du PTET sont dus à «un grand nombre de demandes».

« Après, il faut faire une demande de permis de travail qui peut prendre jusqu’à six mois. Imaginez : le délai complet pour faire cette demande, l’EIMT comprise, peut aller jusqu’à 12 mois. Donc, il faut que les employeurs prévoient 12 mois à l’avance le nombre d’employés dont ils auront besoin par catégories d’emploi. C’est presque impossible », indique M. Boudreault, puisque la pandémie a rendu imprévisib­les les besoins en main-d’oeuvre à moyen et à long terme.

Cette industrie juge aussi que l’EIMT est inutile présenteme­nt, puisque les besoins criants sont sans contredit. « Des employés de carrière nous ont quittés, il n’y a aucun CV qui rentre, les gens ne se présentent pas aux entrevues », décrit Martin Vézina, vice-président aux affaires publiques pour l’ARQ.

Ces associatio­ns estiment que si l’exigence de l’EIMT était levée, il serait possible d’avoir des renforts dès cet été. Parmi les pays d’origine souvent cités, on compte le Mexique, la France, les Philippine­s et les pays du Maghreb.

M. Boudreault réclame aussi que les délais de traitement soient réduits pour l’octroi de permis de travail aux demandeurs d’asile, qui arrivent notamment en grand nombre par le chemin Roxham.

Des employés de carrière nous ont quittés, il n’y a aucun CV qui rentre, les gens ne se présentent pas aux entrevues

MARTIN VÉZINA »

 ?? GETTY IMAGES ?? Si plusieurs hôtels limitent leur taux d’occupation, cela pourrait avoir des répercussi­ons sur la fréquentat­ion des musées, des restaurant­s et des autres attraction­s touristiqu­es.
GETTY IMAGES Si plusieurs hôtels limitent leur taux d’occupation, cela pourrait avoir des répercussi­ons sur la fréquentat­ion des musées, des restaurant­s et des autres attraction­s touristiqu­es.

Newspapers in French

Newspapers from Canada