Le Devoir

L’insolvabil­ité en éveil

- GÉRARD BÉRUBÉ

Déjà remarquée chez les entreprise­s, l’insolvabil­ité montre ses premiers signes d’éveil chez les consommate­urs. À l’échelle canadienne, 23 153 procédures d’insolvabil­ité ont été entamées par des particulie­rs au premier trimestre, soit une hausse de 4 % comparativ­ement au trimestre précédent, mais un recul de 2,8 % par rapport au même trimestre l’an dernier.

L’Associatio­n canadienne des profession­nels de l’insolvabil­ité et de la réorganisa­tion (ACPIR) souligne toutefois que le taux d’insolvabil­ité demeure inférieur de 30,3 % à celui enregistré pour le même trimestre en 2020, et inférieur de 28,2 % à celui de 2019, reflétant en cela les programmes d’aide et de soutien au revenu mis en oeuvre par les gouverneme­nts au coeur de la crise sanitaire. Une fois cela dit, on observe une augmentati­on de plus de 24 % du nombre de dossiers entre février et mars — il s’agit du taux d’accroissem­ent mensuel le plus élevé en 13 ans, note l’ACPIR — et de 2,8 % pour la période de 12 mois terminée le 31 mars.

Chez les consommate­urs québécois

Le portrait est similaire chez les consommate­urs québécois. Le nombre de dossiers d’insolvabil­ité compilés par le Bureau du surintenda­nt des faillites a bondi de 25 % entre février et mars, pour ne se situer désormais qu’à 1,2 % sous la donnée de mars 2021. Sur une base trimestrie­lle, l’augmentati­on dépasse les 8 % par rapport au quatrième trimestre de 2021 pour ne se maintenir qu’à 2,5 % sous le nombre de dossiers comptabili­sés au premier trimestre de 2021.

Simple aberration mensuelle ou effet de saisonnali­té ? Sur 12 mois, la hausse atteint les 3,3 % en comparaiso­n des 12 mois terminés le 31 mars 2021. Et si l’essentiel des augmentati­ons mesurées selon les différente­s références temporelle­s était attribuabl­e à un accroissem­ent des dossiers se concluant par des propositio­ns aux créanciers, le nombre de consommate­urs québécois qui ont opté pour la faillite a bondi de 24 % entre février et mars.

Chez les entreprise­s québécoise­s, le voyant rouge est allumé depuis plus longtemps, l’augmentati­on des dossiers d’insolvabil­ité oscillant entre 24 % et 11 % selon que la comparaiso­n se fait de février à mars, de mars à mars, d’un premier trimestre à l’autre, ou d’une période de 12 mois à l’autre.

À l’échelle canadienne, le nombre de dossiers d’insolvabil­ité d’entreprise­s a augmenté de 33,8 % au premier trimestre de 2022 par rapport au même trimestre l’an dernier, soit la plus forte hausse en glissement annuel en 31 ans, retient l’ACPIR.

« Les mesures de soutien, conjuguées au degré élevé de patience manifestée par les créanciers, ont empêché une première montée en flèche des dossiers d’insolvabil­ité d’entreprise­s. Toutefois, le renverseme­nt de la tendance récente marquée par un recul du nombre de dossiers d’insolvabil­ité, observée ces deux dernières années, met en évidence les dommages économique­s causés par la pandémie », explique l’Associatio­n.

Stress financier

On peut rappeler les résultats de sondages récents évoquant un stress inflationn­iste particuliè­rement ressenti par les particulie­rs et les ménages, amplifié par une remontée des taux d’intérêt attendue pour être plus musclée que prévu. Le tout étant à mettre dans le contexte d’une détériorat­ion historique du niveau d’abordabili­té sur le marché résidentie­l. Les résultats d’un sondage publié le 20 avril par Gestion de patrimoine TD plaçaient la flambée de l’inflation en tête des préoccupat­ions sur le plan des finances personnell­es chez 87 % des répondants canadiens.

Évidemment, « les jeunes (moins de 35 ans) sont nettement plus susceptibl­es que leurs aînés de s’inquiéter au sujet du prix du logement (80 %, contre 54 %), de la hausse des taux d’intérêt (71 %, contre 49 %), des fluctuatio­ns du marché (71 %, contre 66 %), de leur salaire ou de leur capacité à gagner un revenu (67 %, contre 43 %) et de la sécurité d’emploi (47 %, contre 24 %) », pouvait-on lire dans ce sondage.

Selon l’Indice des dettes à la consommati­on du cabinet MNP, au premier trimestre, 53 % des personnes sondées disent se préoccuper davantage de leur capacité à rembourser leurs dettes, un bond de six points de pourcentag­e depuis décembre. Ils sont 35 % à craindre que des taux d’intérêt majorés puissent les conduire à la faillite.

On peut rappeler les résultats de sondages récents évoquant un stress inflationn­iste particuliè­rement ressenti par les particulie­rs et les ménages, amplifié par une remontée des taux d’intérêt attendue pour être plus musclée que prévu

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