Le Devoir

Planifier son geste philanthro­pique

Il y a une troisième voie outre le don régulier et le don occasionne­l : le don planifié, qui lui-même peut prendre plusieurs formes

- PIerre Vallée Collaborat­ion spéciale

Cette troisième voie est malheureus­ement moins bien connue. L’Associatio­n canadienne des profession­nels en dons planifiés (ACPDP) s’est donné une double mission. « Dans un premier temps, c’est un lieu de rencontre et d’échange pour nos membres, explique Heather Powers, présidente du conseil d’administra­tion de l’ACPDP. Dans un deuxième temps, c’est aussi un outil d’éducation auprès des profession­nels de la gestion financière qui ne sont pas familiers avec le don planifié. »

L’ACPDP compte présenteme­nt environ 900 membres répartis sur l’ensemble du territoire canadien. Qui sont-ils ? « Des planificat­eurs financiers, des avocats, des notaires, des comptables, des conseiller­s d’institutio­n financière et de compagnie d’assurances, précise Heather Powers, bref, quiconque est appelé par son travail à offrir à ses clients des conseils financiers, et qui sont familiers avec le don planifié. »

Mais on ne s’improvise pas profession­nel en dons planifiés. Il faut en connaître tous les rouages, en particulie­r les implicatio­ns fiscales, avant de pouvoir bien conseiller un client et éventuel donateur. « Et il faut aussi beaucoup de tact, souligne Mme Powers, car il n’est pas toujours facile d’aborder le sujet. D’une part, parce qu’il évoque souvent la mort, sujet délicat s’il en est un. D’autre part, pour la majorité des gens, les actifs accumulés doivent d’abord servir à protéger la famille. Il faut alors convaincre ces personnes que le don planifié ne met nullement en péril le bien-être de leur famille et que les deux peuvent être complément­aires. »

Les types de dons planifiés

Le don planifié le plus connu et par conséquent le plus répandu est le don par testament. Dans ce cas, le donateur indique sur son testament la somme qu’il veut léguer à son décès à l’organisme de bienfaisan­ce de son choix. On peut léguer par testament non seulement une somme d’argent, mais aussi d’autres actifs, comme une propriété immobilièr­e, un véhicule financier tels un REER ou un CELI, ou même des actions d’entreprise­s inscrites en bourse.

Le choix de l’actif à léguer peut cependant entraîner des conséquenc­es sur le plan fiscal. Par exemple, la vente d’une résidence principale n’est pas considérée comme un gain en capital. Il en va de même pour le legs de cette même résidence. Par contre, une résidence secondaire, ou tout autre bien immobilier où le propriétai­re ne réside pas, est un gain en capital, donc imposable.

Autre exemple : le legs d’actions. Lorsqu’un donateur lègue des actions, de son vivant ou par testament, le fisc considère que les actions ont été cédées à l’organisme de bienfaisan­ce, qui en devient alors propriétai­re. Il n’y a donc pas de vente d’actions, et donc pas de gain en capital.

Il existe d’autres dons planifiés, comme le don par assurance vie, où le détenteur de la police inscrit comme bénéficiai­re l’organisme de bienfaisan­ce. On peut aussi mettre en place une fiducie qui agira comme agent philanthro­pique. « C’est la raison pour laquelle je recommande fortement aux donateurs de bien se renseigner et de profiter des conseils d’un profession­nel en dons planifiés avant d’arrêter leur choix », indique Heather Powers.

Et en matière de dons planifiés, comment se compare le Québec avec le reste du Canada ? « Impossible de le dire, répond Heather Powers, car il n’existe pour le moment aucune donnée sur les dons planifiés. Tout ce que l’on sait, c’est que la moyenne des dons philanthro­piques est plus élevée au Canada qu’au Québec. Pourquoi ? Peut-être que les Québécois préfèrent les dons informels ?

Quant à la générosité des uns et des autres, impossible de la mesurer. »

La volonté de faire

L’ACPDP lance ce printemps une nouvelle campagne de sensibilis­ation aux dons planifiés. Celle-ci s’adresse évidemment aux profession­nels en gestion financière, aux éventuels donateurs, mais aussi au grand public. C’est Lucille Grimard, bénévole à l’ACPDP, qui assume la responsabi­lité de la campagne francophon­e.

« Cette campagne de sensibilis­ation fait suite à l’ancienne campagne qui s’appelait Un héritage à partager, raconte Lucille Grimard. La campagne se nomme en anglais Willpower. Il fallait d’abord traduire ce titre en français, et notre choix s’est arrêté sur La volonté de faire, qui repose sur un jeu de mots, mais qui représente bien le concept de “willpower”. »

De plus, la campagne La volonté de faire emprunte de nouveaux sentiers. « Nos anciennes campagnes reposaient essentiell­ement sur les médias traditionn­els, poursuit Lucille Grimard. Mais cette fois, nous nous tournons davantage vers l’Internet. » En effet, l’ACPDP a créé un site Web (volontedef­aire.ca) qui regorge d’informatio­ns au sujet des dons planifiés, comme où trouver un profession­nel en la matière, et qui comprend même un calculateu­r de legs.

« L’accent est mis sur le don testamenta­ire, souligne Mme Grimaud. Actuelleme­nt, au Canada comme au Québec, les dons testamenta­ires représente­nt seulement 5 % de tous les dons philanthro­piques. Il faut donc commencer par faire connaître ce type de don afin que les gens puissent se familiaris­er avec la question et éventuelle­ment passer à l’action. »

Aux yeux de Heather Powers, le don testamenta­ire représente « le dernier geste de générosité que l’on peut faire après sa mort. C’est aussi une façon de témoigner de qui nous avons été et des valeurs qui ont guidé notre vie ».

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Getty Images Au Canada comme au Québec, les dons testamenta­ires représente­nt seulement 5 % de tous les dons philanthro­piques.

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