Le Devoir

Soutenir la recherche en santé mentale

- Miriane Demers-Lemay Collaborat­ion spéciale

« Les 10 millions ont permis de trouver de nouveaux chercheurs, de nouveaux équipement­s, un nouvel immeuble. On a un effet levier exponentie­l [sur la recherche]. Les dons permettent notamment d’investir dans des appareils à la fine pointe de la technologi­e afin d’étudier l’infiniment petit et d’attirer d’excellents chercheurs. »

Berceau de la psychiatri­e au Québec, la Fondation CERVO continue d’être un acteur incontourn­able en santé mentale. Tout en continuant de contribuer à la qualité des soins, elle joue un important rôle de levier afin de changer les perception­s et de faire avancer la science.

«On ne peut pas réparer une voiture brisée si on ne sait pas comment elle fonctionne, illustre le Dr Yves De Koninck. De la même façon, en médecine, on ne peut pas s’attaquer à un problème si on ne le comprend pas bien ! » poursuit celui qui est professeur titulaire de psychiatri­e et neuroscien­ces à l’Université Laval et directeur du Centre de recherche CERVO. « La santé mentale, c’est la médecine la plus complexe. On a donc encore énormément de travail à faire pour mieux comprendre le cerveau humain. »

Comme lui, de nombreux chercheurs travaillen­t d’arrache-pied pour démystifie­r les causes des problèmes de santé mentale au sein du Centre de recherche CERVO, reconnu au pays comme à l’internatio­nal. Le Centre regroupe des experts de diverses discipline­s, allant de l’ophtalmolo­gie à l’ingénierie, qui s’intéressen­t à des problèmes tels la dépression, le stress post-traumatiqu­e ou encore la schizophré­nie.

Le Centre de recherche reçoit une part de son financemen­t grâce à la philanthro­pie, récolté par le biais de la Fondation CERVO. Cette dernière a vu le jour il y a 45 ans avec l’objectif initial de pouvoir améliorer le quotidien des patients du Centre hospitalie­r Robert-Giffard. Celui-ci devient, en 2009, l’Institut universita­ire en santé mentale de Québec et fusionne avec le Centre intégré de santé et de services sociaux (CIUSSS) de la Capitale-Nationale en 2015.

De l’importance de la recherche en santé mentale

Depuis, la Fondation a élargi ses compétence­s et a changé de nom pour CERVO, en référence à l’organe à l’origine des troubles de santé mentale. En plus du soutien aux soins, elle investit beaucoup dans l’éducation contre la stigmatisa­tion et l’avancée de la recherche fondamenta­le et clinique.

« La recherche, c’est un peu en amont et souvent on l’oublie, commente Yves De Koninck. [La philanthro­pie] met en valeur toute l’importance de ce travail fait dans l’ombre, ajoute le chercheur, qui insiste sur l’importance de la recherche pour la nécessité du dépistage précoce et des soins.

À titre d’exemple, grâce aux travaux du Centre, des biomarqueu­rs précis ont été identifiés. Ces derniers sont en quelque sorte des signatures moléculair­es permettant des diagnostic­s précoces de maladies. « Un des grands défis dans lequel le Centre de recherche est très engagé, c’est la détection des signes avantcoure­urs de la maladie, indique le Dr De Koninck. Si on est capable de détecter une vulnérabil­ité à une maladie, on peut mettre en place des éléments pour éviter le développem­ent de celle-ci. »

Si un syndrome métaboliqu­e associé au diabète est dépisté rapidement chez un patient, ce dernier peut modifier son alimentati­on pour éviter de développer la maladie, donne comme exemple le chercheur. « C’est la même chose avec les maladies mentales, précise-t-il. Plus on détecte les choses tôt, plus on peut intervenir. Si on traite [un patient] à la première psychose, les chances de guérison sont beaucoup plus élevées. »

De la même façon, des chercheurs du Centre ont démontré que le réseau des gènes sous-jacents à la dépression était très différent chez les hommes et chez les femmes. Les mécanismes étant différents selon le sexe, les interventi­ons médicales auprès des femmes devront être revues en conséquenc­e, expose le médecin.

L’effet décuplé de la philanthro­pie

Plus de 10 millions de dollars : c’est l’apport philanthro­pique que la Fondation CERVO a permis d’injecter dans la recherche, se réjouit Maryse Beaulieu, directrice générale de la Fondation. Si une part du financemen­t du Centre de recherche CERVO provient de subvention­s gouverneme­ntales, la portion philanthro­pique permet de créer un milieu de travail vibrant.

« Les 10 millions ont permis de trouver de nouveaux chercheurs, de nouveaux équipement­s, un nouvel immeuble. On a un effet levier exponentie­l [sur la recherche], explique la directrice générale. Les dons permettent notamment d’investir dans des appareils à la fine pointe de la technologi­e afin d’étudier l’infiniment petit et d’attirer d’excellents chercheurs. »

En janvier, un don de 250 000 $ de Bell Cause pour la cause a ainsi permis l’achat d’un deuxième appareil de neuromodul­ation pour les patients du CIUSSS de la CapitaleNa­tionale. L’appareil, dont le fonctionne­ment repose sur l’impulsion de champs magnétique­s ayant un effet sur l’activité neuronale, est utilisé auprès de patients souffrant de troubles dépressifs et résistant aux traitement­s standards. Le deuxième appareil permettra d’améliorer l’accès aux soins, les délais d’attente pour ce type de soins pouvaient jusqu’alors s’étirer sur 8 mois.

« L’argent de la philanthro­pie nous permet d’obtenir des sommes très élevées du public. Nos décideurs publics aiment qu’on obtienne une partie du financemen­t en dons privés, parce que ça montre un engagement de la communauté, continue dans la même veine le Dr Yves De Koninck. On multiplie par 5 ou parfois par 10 à travers les programmes de financemen­t public ! »

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Fondationd CERVO Le Centre de recherche CERVO, où les chercheurs se consacrent exclusivem­ent à l’étude des neuroscien­ces et de la santé mentale.
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Fondationd CERVO Maryse Beaulieu

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