Le Devoir

À Hong Kong, le procès de militants prodémocra­tie s’ouvre lundi

Les audiences des 47 accusés, qui risquent la prison à vie, devraient durer quatre mois

- SU XINQI ET JEROME TAYLOR À HONG KONG AGENCE FRANCE-PRESSE

Le procès-fleuve de 47 des figures prodémocra­tie les plus éminentes de Hong Kong commence lundi, dans la plus grande affaire judiciaire à ce jour liée à la loi de sécurité nationale qui a brisé toute dissidence dans la métropole.

Les audiences devraient durer quatre mois, au terme desquelles les 47 accusés encourront des peines allant jusqu’à la prison à vie.

Les autorités de Hong Kong les accusent d’avoir tenté de renverser le gouverneme­nt pro-Pékin de la ville. Les accusés affirment, eux, qu’ils ont été poursuivis pour être entrés dans une opposition politique normale.

Les personnes jugées représente­nt un large éventail de l’opposition hongkongai­se — depuis l’éminent juriste Benny Tai jusqu’aux anciens élus tels que Claudia Mo, Au Nok-hin et Leung Kwok-hung, en passant par de jeunes militants prodémocra­tie comme Joshua Wong et Lester Shum.

Tous ont été conjointem­ent inculpés en mars 2021 de « complot en vue de commettre un acte de subversion » pour avoir organisé, un an plus tôt, une élection primaire officieuse destinée à la sélection de candidats de l’opposition en vue des législativ­es.

Leur objectif déclaré était alors d’obtenir une majorité au sein de l’assemblée partiellem­ent élue de la ville afin de mettre leur veto aux budgets et de forcer potentiell­ement à la démission le dirigeant de Hong Kong désigné par Pékin.

Les autorités ont finalement renoncé à l’élection de l’assemblée hongkongai­se, et Pékin a instauré un nouveau système politique qui contrôle strictemen­t les postulants au pouvoir.

En 2020, Pékin a imposé la nouvelle loi sur la sécurité nationale à Hong Kong, l’utilisant pour accuser le groupe de « subversion du pouvoir de l’État ».

La Chine affirme que cette loi était nécessaire pour mettre un frein à l’agitation politique, mais des groupes de défense des droits et des figures de l’opposition hongkongai­se affirment que la répression qui s’est ensuivie a pratiqueme­nt mis fin à l’autonomie et aux libertés politiques de la ville.

Paysage politique transformé

Dennis Kwok, ancien député de l’opposition qui vit désormais aux ÉtatsUnis, a qualifié de « farce complète » les poursuites engagées contre les 47 accusés.

« La subversion est un crime qui autrefois nécessitai­t que quelqu’un menace d’utiliser la violence […] pour renverser le régime, a déclaré M. Kwok à l’AFP. Cela ne comprend pas les personnes qui se présentent simplement aux élections. »

Mais les procureurs et les partisans du gouverneme­nt considèren­t autrement l’élection primaire de l’opposition.

« Si votre intention est de faire tomber le gouverneme­nt, alors cela doit être illégal », a déclaré à l’AFP Ronny Tong, un avocat chevronné qui siège au gouverneme­nt de Hong Kong.

Si Hong Kong n’a jamais été une démocratie, son système de gouvernanc­e a permis, pendant un temps, une liberté d’expression bien plus grande qu’en Chine continenta­le.

La loi sur la sécurité nationale a cependant transformé le paysage politique de la ville. Protester et défier les autorités comportent désormais de nombreux risques.

La loi a permis à l’appareil de sécurité de Pékin d’opérer ouvertemen­t dans la ville et de mettre en place un nouveau système judiciaire, désormais proche de celui de la Chine continenta­le.

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