Soutenir les enfants en zone de conflit
Une autre étude s’intéresse au rôle protecteur de l’éducation des enfants exposés à la violence politique. Il s’agit du projet de recherche « Sabrine : stress, bien-être et résilience chez les élèves des territoires palestiniens et l’impact sur les plans cognitifs et de l’apprentissage ».
« Notre objectif est de mieux comprendre les effets de la violence politique sur le développement cognitif des enfants », explique Olivier Arvisais, professeur au Département de didactique à l’Université du Québec à Montréal, qui dirige le projet.L’équipe de recherche s’intéresse aux interactions entre les facteurs de stress (lequel est évalué en mesurant la sécrétion de cortisol dans des échantillons de salive), les niveaux de bien-être et de résilience, le développement cognitif et l’apprentissage chez les élèves du primaire dans la bande de Gaza et en Cisjordanie.
Olivier Arvisais est retourné fin décembre sur le terrain, d’où il a rapporté des données préliminaires prometteuses. « Pour l’instant, il semble que, sur les trois fonctions exécutives mesurées, l’inhibition et la mémoire de travail des enfants palestiniens ressemblent à celles de leurs pairs ailleurs dans le monde. En revanche, ils sont derrière, de façon significative, en ce qui concerne la flexibilité cognitive », explique-t-il. Si ces premiers résultats étaient validés par l’étude complète, ils seraient d’autant plus intéressants que cette fonction est essentielle pour l’apprentissage des langues (un domaine dans lequel les élèves palestiniens ont justement des difficultés), des mathématiques et des sciences, mais aussi pour établir un dialogue avec l’autre, pour comprendre des points de vue divergents et résoudre des conflits. Les résultats préliminaires dévoilent une autre information intéressante : 30 minutes après leur réveil, beaucoup d’enfants ont une sécrétion de cortisol anormalement basse.
« Cela montre qu’ils sont en situation d’épuisement psychologique », explique le professeur. Malheureusement, ces enfants passent souvent sous le radar des psychologues. « Ils n’ont plus de réponse physiologique au stress (accélération du rythme cardiaque, de la respiration, ou augmentation de la température corporelle). Lorsqu’ils sont interrogés en utilisant une échelle de stress perçu, ils ont donc des résultats très faibles qui conduisent les psychologues à penser que tout va bien », indique-t-il.
Si ces résultats étaient validés à la fin de l’étude, les enseignants et les psychologues seraient mieux outillés pour accompagner les enfants vivant dans des contextes de violence politique. « Les données de ce genre de projets ne sont pas généralisables,mais elles permettent de formuler de nouvelles hypothèses que l’on peut aller valider ailleurs, dans d’autres contextes », précise Olivier Arvisais.