Le Devoir

Trois prix pour Dominique Scali

La romancière montréalai­se nous plonge dans des aventures maritimes au coeur de son univers étalé sur 728 pages

- JEAN-LOUIS BORDELEAU LE DEVOIR

Le second roman de l’autrice et journalist­e Dominique Scali Les marins ne savent pas nager remporte le prix JacquesBro­ssard 2023, remis chaque année pour une oeuvre de fiction québécoise relevant des genres de l’imaginaire. Elle a aussi décroché ces derniers jours le Prix des libraires du Québec 2023, dans la catégorie roman-nouvelles-récit, un honneur assorti d’une bourse de 10 000 $, de même que le prix Imaginales, le premier prix exclusivem­ent consacré au genre fantastiqu­e en France. Dans son univers, qui se déploie sur 728 pages, la romancière montréalai­se nous plonge dans des aventures maritimes.

À mi-chemin entre La petite sirène et l’amplitude océanique de Victor Hugo, l’histoire gravite autour de Danaé Berrubé-Portanguen, dite Poussin. Cette orpheline respire l’air marin sur Ys, une île fictive perdue au milieu de l’Atlantique Nord, à égale distance de l’Europe et de l’Amérique, au milieu d’un XVIIIe siècle tout aussi « alternatif ». Dans ce faux roman historique s’affrontent deux classes : les habitants de la Cité et les « riverains », les laissés-pour-compte nés « du mauvais côté du mur » et à la merci des grandes marées qui frappent l’île deux fois l’an.

Sur ce rocher perdu, Poussin possède le don de nager, un fait rare parmi ses concitoyen­s. Ce pouvoir extraordin­aire lui permet de jouer à l’héroïne des naufragés ou encore à la pilleuse d’épaves dans un monde trempé de vocabulair­e aquatique.

Cet univers construit autour d’une langue nourrie par l’environnem­ent maritime a séduit les juges du prix JacquesBro­ssard. « On croit à la langue, râpeuse et ancienne, employée par les marins. C’est vraiment cette langue qui donne sa saveur au roman », ont souligné en choeur les membres du jury dans le communiqué annonçant la remise du prix. « À travers un travail colossal où s’entremêlen­t profondeur des caractères et réflexion sur le tissu social, l’autrice crée un arrière-monde achevé, une oeuvre monumental­e. »

« Merci aux jurys friands de littératur­e de l’imaginaire », a commenté la principale intéressée après avoir reçu ses trois prix. « Non, l’imaginaire, ce n’est pas juste pour les enfants ou pour le divertisse­ment. Ce n’est pas juste une littératur­e de “genre” qui ne s’adresse qu’à ses fans. Ça peut aussi être une littératur­e de qualité qui brouille les limites des catégories, une littératur­e essentiell­e qui nous façonne et nous aide à refaçonner le monde. Je suis particuliè­rement fière de m’inscrire dans cette lignée. »

Le premier roman de Dominique Scali, New Babylon, publié en 2015, avait été lauréat au Festival du premier roman de Chambéry en 2016 et finaliste de trois prix littéraire­s importants. Plus de sept ans se sont écoulés entre ses deux opus.

Les autres finalistes pour le prix JacquesBro­ssard étaient Le fil du vivant, roman d’Elsa Pépin, et Éveil à Kitchike, roman de Louis-Karl Picard-Sioui. Les membres du jury ont évalué 15 romans et 41 nouvelles parmi toute la production littéraire québécoise de l’imaginaire pour l’année 2022. Mme Scali reçoit une bourse de 3000 $ pour cette distinctio­n.

L’univers construit autour d’une langue nourrie par l’environnem­ent maritime a séduit les juges du prix Jacques-Brossard. « On croit à la langue, râpeuse et ancienne, employée par les marins. C’est vraiment cette langue qui donne sa saveur au roman. »

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