Le Musée d’art contemporain et l’accès à la collection nationale
« Avertissement : notre collection n’est malheureusement pas accessible depuis notre espace temporaire à Place Ville Marie ».
Cet avertissement à l’attention des visiteurs apparaît sur le site Internet du Musée d’art contemporain (MAC), lequel est temporairement délocalisé à Place Ville Marie depuis l’été 2021. C’est là que sont présentées les expositions de ce musée national jusqu’à ce que soit achevé son agrandissement sur le site de la Place des Arts. Quant à sa collection, il est normal qu’en période de grands travaux, elle soit temporairement entreposée à des fins évidentes de sécurité et de conservation.
Mais comme le rappelait un reportage de Radio-Canada diffusé le 22 mai dernier, cela fera bientôt deux ans que cette collection est inaccessible, et la situation pourrait durer encore longtemps, un silence quasi total entourant la poursuite de ce projet d’agrandissement, qu’aucune mise en chantier n’est à ce jour venue confirmer malgré le dévoilement de plans au printemps 2018. Et la pandémie des dernières années ne peut tout expliquer, des projets majeurs d’infrastructure culturelle, tel l’Espace Riopelle du Musée national des beaux-arts du Québec (MNBAQ, lui aussi un musée national), étant fermement sur les rails.
Pendant plusieurs années, donc, la collection du MAC, une composante essentielle de la collection nationale, ne sera pas accessible au public québécois. De même, les oeuvres qui composent la collection ne seront pas disponibles pour emprunt par les institutions muséales et les centres d’exposition qui en feraient la demande dans le cadre de projets d’exposition de leur cru.
À Montréal et à Québec, mais aussi à Joliette, Baie-Saint-Paul, Rimouski, Sherbrooke, etc. — pour ne parler que du Québec —, des musées et des centres d’art mettent sur pied des expositions dont la pertinence repose directement sur la qualité des oeuvres présentées. Dans un tel contexte, l’accès de ces institutions aux oeuvres des grands musées — en particulier des musées nationaux — est essentiel.
Or, il est frappant de constater, depuis un certain temps déjà, l’absence quasi totale d’oeuvres de la collection du MAC au sein de ces expositions, bien que les sujets qui y sont abordés se prêtent à leur inclusion. Par bonheur, les oeuvres de la collection du MNBAQ y sont fortement présentes.
Cette situation, qui dure maintenant depuis deux ans et qui menace de perdurer, nous apparaît inadmissible. Il est urgent que les oeuvres de la collection du Musée d’art contemporain redeviennent accessibles aux institutions souhaitant les emprunter à des fins d’exposition. Pierre Landry, conservateur au Musée d’art contemporain de Montréal de 1983 à 2008 puis conservateur de l’art contemporain au Musée national des beaux-arts du Québec de 2008 à 2010
Québec, le 23 mai 2023