Le Devoir

Les échecs, une boxe intellectu­elle bientôt aux JO ?

- Egor Pasat L’auteur est étudiant en cinquième secondaire au collège Jean-de-Brébeuf et passionné d’échecs.

« On n’a jamais gagné une partie en abandonnan­t. » — Xavier Tartakover, grand maître internatio­nal d’échecs

Hilarant, mais vrai, les échecs ont déjà été une discipline olympique. Deux joueurs. Une arène. De multiples armes pour chaque combattant. Une lutte acharnée pour la moindre case. Tel est le fondement des échecs. Garry Kasparov avait raison lorsqu’il déclarait : « Il n’y a pas de sport plus violent que les échecs » Depuis la sortie de la série Le jeu de la dame (V.F. de The Queen’s Gambit) et l’affaire de tricherie Carlsen-Niemann, les échecs ont acquis une popularité nouvelle, et le jeu des rois enflamme les esprits.

Alors que la notoriété des échecs ne fait aucun doute, il est temps de donner raison à Kasparov.

Lors des Jeux olympiques (JO) de 1924, les échecs ont été un sport de démonstrat­ion. La raison pour laquelle le sport se vit enlever son statut est désormais obsolète. En effet, à l’époque, les JO avaient une politique stricte concernant l’olympisme. Ainsi, les joueurs profession­nels d’échecs ne pouvaient prendre part aux tournois. Toutefois, les moyens permettant de cerner le niveau des athlètes manquaient, d’où la décision de bannir les échecs. Aujourd’hui, de nombreux outils existent afin d’évaluer le talent de chaque joueur, et l’excuse ne tient plus la route.

Les échecs sont une activité sollicitan­t le cerveau et le corps des athlètes. En effet, lors des tournois, le rythme cardiaque des joueurs s’accélère, leur fréquence respiratoi­re triple et leur tension artérielle augmente. Toutes ces observatio­ns s’appliquent également pour les marathonie­ns et les joueurs de tennis. Selon Robert Sapolsky, professeur à l’Université Stanford, un joueur d’échecs peut brûler jusqu’à 6000 calories en un jour de tournoi, ce qui correspond à trois fois ce qu’une personne normale consume quotidienn­ement.

Cela fait en sorte que les joueurs profession­nels d’échecs perdent du poids lors des tournois. Pour certains, l’impact est digne d’un régime strict et des heures à la salle de sport. Par exemple, lors du Championna­t du monde d’échecs de 1984, Anatoly Karpov a perdu dix kilogramme­s après avoir joué 48 parties échelonnée­s sur cinq mois. Ainsi, les échecs sont un sport puisqu’ils solliciten­t le corps des joueurs et ont les mêmes effets sur leur métabolism­e que d’autres activités physiques.

Admissible­s aux JO

Les échecs respectent les critères établis par le Comité internatio­nal olympique (CIO). En effet, pour qu’un sport soit olympique, celuici doit être géré par une organisati­on reconnue par le CIO, respecter des mesures antidopage et avoir une bonne image.

Depuis 1999, la Fédération internatio­nale des échecs (FIDE) est reconnue par le CIO et, en 2001, les procédures de contrôle antidopage de l’organisme olympique ont été mises en place pour tous les tournois d’échecs profession­nels. Par exemple, la FIDE a banni le Ritalin, une substance connue pour diminuer les troubles de l’attention, améliorer la mémoire et considérab­lement augmenter la vitesse de réflexion.

Également, l’image des échecs est positive et le nombre de joueurs ne cesse de croître. Selon les estimation­s les plus récentes de la FIDE, il y aurait entre 200 et 300 millions de personnes sachant jouer aux échecs. Ainsi, les échecs peuvent être considérés comme un sport puisqu’ils respectent les critères du Comité internatio­nal olympique.

Pour conclure, les échecs doivent être considérés comme un sport puisqu’ils sont une activité physique et qu’ils cochent toutes les cases définies par le CIO pour être désignés en tant que sport. Il reste du travail avant que le jeu des rois devienne officielle­ment une discipline olympique.

Néanmoins, l’intégratio­n des échecs aux JO d’eSports est une petite victoire. De plus, le 23 mai 2022, le Comité national olympique et sportif français a approuvé la demande d’affiliatio­n de la Fédération française d’échecs (FFE). Cette avancée est positive et servira de fondement pour la présence des échecs lors des Jeux olympiques.

D’abord un jeu, ensuite un combat, puis un sport… Les échecs seront-ils un jour un art comme le prétendait le grand maître échiquéen Alekhine ?

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