Le Devoir

Plus de 3,6 millions pour les personnes autistes sur le marché du travail

Les dix premiers projets qui en bénéficier­ont ont été dévoilés lundi par la ministre de l’Emploi

- FRÉDÉRIC LACROIX-COUTURE

Québec débloque plus de 3,6 millions de dollars afin de soutenir l’insertion et le maintien en emploi de personnes vivant avec un trouble du spectre de l’autisme (TSA). Les dix premiers projets qui bénéficier­ont de cette enveloppe ont été dévoilés lundi matin et se partageron­t environ 1,2 million.

La ministre de l’Emploi, Kateri Champagne Jourdain, en a fait l’annonce à Montréal dans les locaux de l’organisme Autisme sans limites, qui offre différents programmes pour favoriser l’inclusion sociale des jeunes adultes autistes de haut niveau de fonctionne­ment.

Parmi les initiative­s retenues, sept auront une portée à travers le Québec et trois seront concentrée­s dans la région de Montréal. Celle qui décroche la part la plus importante du 1,2 million est l’entreprise montréalai­se Neuro Plus. Avec une subvention d’environ 343 000 $, elle pourra déployer deux initiative­s, dont une visant à former de futurs technicien­s spécialisé­s en réseautiqu­e. « Des propositio­ns d’emploi seront offertes par la suite dans le domaine de la cybersécur­ité. C’est une première au Canada », a fait valoir la ministre caquiste en conférence de presse.

Les autres projets soutenus sont, entre autres, la réalisatio­n d’une baladodiff­usion traitant de l’intégratio­n en emploi des personnes vivant avec un TSA, le développem­ent d’un outil d’évaluation des facteurs d’employabil­ité de la clientèle autiste, la création d’un guide sur la communicat­ion entre les personnes autistes et non autistes dans les milieux de travail, ainsi que la mise sur pied d’outils de sensibilis­ation destinés aux employeurs.

Dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre, la ministre caquiste a souligné l’importance de « faire appel à tous les talents, y compris les personnes les plus éloignées du marché du travail ». « Il faut non seulement donner aux personnes vivant avec un trouble du spectre de l’autisme tous les outils pour se réaliser à travers un emploi, mais aussi encourager les employeurs à faire une plus grande place à l’inclusion et la diversité dans leur milieu de travail », a affirmé Mme Champagne Jourdain.

Faire tomber le masque

Il existe encore une certaine méconnaiss­ance de l’autisme, qui entraîne à l’occasion des « malentendu­s » chez les employeurs, alors que les personnes vivant avec un TSA ont parfois des difficulté­s avec les habiletés sociales, évoque Lise-Marie Gravel, la présidente d’Autisme sans limites, basé dans le sud-ouest de la métropole québécoise.

Son organisme obtiendra de Québec un peu plus de 140 000 $ pour permettre le déploiemen­t à plus grande échelle d’une initiative expériment­ée d’abord sous forme de projets pilotes, « Studios », qui aide de jeunes adultes autistes à trouver un emploi et à le garder grâce à un soutien personnali­sé.

Sitôt que ces jeunes arrivent en entreprise, la perception des employeurs change, constate Mme Gravel. « Le commentair­e que j’ai le plus souvent c’est : “Ah, mon Dieu qu’ils n’ont pas l’air autistes !” Comme s’il y avait une façon d’être ou d’avoir l’air autiste. »

« L’autisme, c’est vraiment un masque. Quand on fait tomber le masque […] quand on diminue l’anxiété, toutes les manifestat­ions de l’autisme, on a vraiment accès à un potentiel qui est unique parce que ces gens-là pensent “en dehors de la boîte” », explique Mme Gravel à La Presse canadienne.

Selon elle, la loyauté est l’une des grandes forces des travailleu­rs autistes, un atout recherché au moment où la rétention du personnel représente un défi important pour les entreprise­s. « Une personne autiste ne se lève pas le matin en voulant changer d’emploi. Quand ils sont bien [dans un milieu de travail], ils veulent être bien comme ça tout le reste de leur vie », explique Mme Gravel.

Les autres projets qui pourront compter sur une subvention grâce à l’enveloppe de 3,6 millions seront annoncés prochainem­ent dans différente­s régions.

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