Le Devoir

Pas de dépistage de la surdité à la naissance partout au Québec

- MARIE-EVE COUSINEAU LE DEVOIR

Plus de dix ans après son lancement, le Programme québécois de dépistage de la surdité chez les nouveau-nés (PQDSN) n’est toujours pas implanté dans les 86 hôpitaux et maisons de naissance du Québec. Seulement 61 % des bébés naissants québécois ont actuelleme­nt accès à ce test, d’après les dernières données du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).

L’Associatio­n du Québec pour enfants avec problèmes auditifs (AQEPA) demande aux CISSS et CIUSSS de faire du déploiemen­t de ce programme une priorité. « Le plus tôt on détecte un enfant, le plus tôt on pourra mettre en place un suivi en réadaptati­on et outiller la famille pour communique­r avec cet enfant et éviter un tas de retards qui seront beaucoup plus compliqués à rattraper par la suite, même rendu à l’école », dit la directrice générale de l’AQEPA, Claire Moussel.

Des parents découvrent des années plus tard la surdité de leur enfant, ce qui peut avoir des conséquenc­es sur son langage. Claire Moussel cite un exemple récent, celui d’une famille dont le deuxième enfant a bénéficié du PQDSN. « Une surdité a été identifiée, rapporte-telle. Les parents se sont posé la question pour le frère aîné, qui avait deux ans à ce moment-là. Ils ont fait une évaluation et en effet, il a lui aussi une surdité. »

Selon le MSSS, 28 hôpitaux et maisons de naissance ont déployé le PQDSN jusqu’à présent. Il s’agit d’un progrès par rapport à 2021-2022 : à l’époque, ils n’étaient qu’une vingtaine, ce qui représenta­it environ 53 % des nouveau-nés québécois.

Le président de l’Ordre des orthophoni­stes et audiologis­tes du Québec, Paul-André Gallant, se réjouit que le déploiemen­t « avance », mais aimerait qu’il aille plus vite. Selon lui, ce test simple peut être réalisé en peu de temps par une infirmière auxiliaire ou un autre profession­nel formé.

« On est très en retard par rapport aux autres provinces, et depuis longtemps », signale M. Gallant. Il précise qu’en Ontario, 94 % des nouveau-nés ont bénéficié de ce test en 2021. Ce pourcentag­e s’élevait à 97 % en Colombie-Britanniqu­e et à 98 % au Nouveau-Brunswick.

Au Québec, les élus de l’Assemblée nationale ont adopté à l’unanimité, le 11 mai 2021, une motion demandant au gouverneme­nt la mise en place du PQDSN « dans tous les lieux de naissance » de la province « d’ici la fin de l’année 2021 ». Le MSSS affirme maintenant être « confiant d’atteindre l’objectif de couvrir 100 % des nouveaunés d’ici la fin 2023 ».

Dans un courriel, le MSSS explique que le déploiemen­t du programme a été « ralenti » au départ par « la nécessité de mettre en place un système d’informatio­n et de gestion des admissions », puis par la pandémie. Il souligne les « efforts » réalisés pour « conserver le dépistage », en dépit de la crise sanitaire.

Le MSSS ajoute que tous les nouveaunés avec des facteurs de risque de surdité sont dirigés vers un service d’audiologie même si le PQDSN n’est pas présent dans leur établissem­ent. « De plus, dans le cadre des activités du programme Agir tôt, les enfants peuvent également être identifiés s’ils présentaie­nt un retard en lien avec un problème de surdité », écrit-il.

Paul-André Gallant demeure préoccupé. « Les surdités néonatales, 90 % du temps, ce sont des enfants qui n’ont aucun antécédent parental, aucune maladie ! »

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