Un test de français fait au Québec: l’expertise y est, mais l’argent ?
D’entrée de jeu, je partage toutes les préoccupations exprimées sur l’usage de tests développés en France pour évaluer le niveau de compétence du français des personnes immigrantes potentielles. Éléments sociolinguistiques et socioculturels souvent très « franco-français », présence limitée d’éléments québécois, pertinence de certains sujets de conversation par rapport aux réalités socioculturelles québécoises, etc. Bref, l’idée de développer et un test « québécois » et d’y avoir recours par la suite vient naturellement à l’esprit et la question est légitime : pourquoi en sommes-nous encore, en 2023, à utiliser deux tests faits en France (TEFaQ et TCFQ) ? La réponse est, malheureusement, platement financière. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, développer un tel test, répondant à des exigences à la hauteur des enjeux que vivent les personnes immigrantes, c’est très long et dispendieux. On parle ici de plusieurs années de travail d’une équipe d’une dizaine de personnes et d’un budget total de plusieurs millions afin de financer le développement et les très nombreuses mises à l’essai de validation nécessaires à la production d’un test opérationnel, y compris les développements informatiques, l’enregistrement des messages audio par des professionnelles, etc. Le Québec étant un marché restreint par rapport à la France et au reste de la francophonie, un tel test y serait-il économiquement viable ? C’est loin d’être évident…
Christophe Chénier Professeur en évaluation du français langue seconde Université de Montréal Le 1er juin 2023