Conseils pour épargnants et investisseurs
Avant de pouvoir investir, une personne doit d’abord épargner, rappelle Sylvain B. Tremblay, vice-président chez Optimum Gestion de placements. « À l’impossible nul n’est tenu, mais on peut profiter de l’occasion pour revoir sa planification budgétaire, faire un budget — si cela n’était pas fait — et prioriser nos dépenses. » C’est d’abord le poste budgétaire des dépenses discrétionnaires qui devrait y passer : celles qui sont superflues et impulsives. « Les achats en ligne, les abonnements aux plateformes de streaming, les sorties au resto, etc. » Il fait cependant une mise en garde contre des budgets trop restrictifs : « Si c’est trop radical, ça ne dure pas. Il faut doser. »
Planificateur financier et gestionnaire de portefeuille au Groupe Onyx, IA Gestion privée de patrimoine, Simon Houle souligne à grands traits l’importance de se payer en premier en puisant systématiquement une somme à la source et en l’investissant. « Tu te paies pour le futur et tu te forces à bien gérer le solde restant. » Celui qui est aussi secrétaire-trésorier au conseil d’administration d’ÉducÉpargne mentionne qu’avec une bonne discipline d’épargne et d’investissement, toute personne va se donner les outils pour « vivre une vie qui lui ressemble ». Le gestionnaire de portefeuille chez Claret Vincent Fournier fait écho à la fable de Jean de La Fontaine « La cigale et la fourmi ». L’épargnant qui avait mis de l’argent de côté souffle beaucoup mieux par les temps qui courent. « A contrario, celui qui a tardé à faire un budget, à épargner et à investir trouve cela plus difficile : ça fait deux fois plus mal aujourd’hui, car il doit à la fois réduire son rythme de vie et épargner. » La décennie passée, marquée par des taux d’intérêt exceptionnellement bas, en a incité plusieurs à vivre au-dessus de leurs moyens. L’épargne doit servir à deux choses, selon lui : financer les projets (la retraite, ou l’achat d’une maison pour les plus jeunes) et assurer un coussin en cas d’imprévus. « Tu veux pouvoir te rabattre sur un fonds d’urgence le jour où le goulot se resserre. »
Investissements : garder le cap
« C’est archi-important de ne pas modifier son allocation d’actifs selon les aléas de l’économie. C’est une erreur que d’essayer de se synchroniser avec les fluctuations des marchés boursiers », souligne Vincent Fournier. Il faut respecter sa politique de placement, quel que soit son profil d’investisseur (prudent, équilibré ou de croissance). « Les gens ont des biais cognitifs qui influent sur leurs décisions d’investissement et qui les incitent à croire qu’elles sont meilleures qu’elles ne le sont en réalité. Ils sont guidés par leurs émotions. » D’où l’importance d’un outil comme la politique de placement, à condition de la respecter. « C’est quand le sentiment à l’égard du marché est le plus négatif qu’on a tendance à vouloir vendre, alors que c’est l’inverse qui devrait se produire. C’est contre-intuitif, et même les pros se font prendre au piège. »
Simon Houle est d’accord. « Si l’investisseur y va pour le long terme, il doit respecter son profil d’investisseur et sa stratégie initiale. » Il souligne que les marchés boursiers sont un indicateur précurseur de l’évolution de l’économie. « Ils sont en avance de six à huit mois. C’est possible qu’on ait déjà atteint le creux. » Aux investisseurs à long terme, il suggère de continuer d’investir à intervalles réguliers. Pour la portion à revenu fixe, la plus sécuritaire d’un portefeuille, une avenue à considérer est celle des obligations, qui ont subi un coup l’an dernier avec la hausse des taux et qui se négocient à escompte. « Elles évoluent de façon opposée aux taux d’intérêt, et ceux-ci pourraient diminuer à compter de 2025. » Par contre, selon lui, il n’est pas recommandé d’être dans le marché si l’investisseur a un horizon à court terme. « Avec les taux actuels, un simple compte d’épargne à intérêt élevé à 5 % peut faire l’affaire. »
Ce que certains investisseurs peuvent faire après des fluctuations boursières importantes, c’est en profiter pour rééquilibrer leur portefeuille afin de refléter leur pondération initiale, fait remarquer Sylvain B. Tremblay. « Nous avons, par exemple, réduit notre surpondération en actions et augmenté notre portion obligataire. » Vincent Fournier précise que l’idéal, c’est de procéder à un rééquilibrage avec de nouvelles cotisations, et il rajoute qu’il est crucial de conserver ses investissements en tout temps. « La recherche montre que ton rendement a été significativement affecté si tu as manqué seulement dix des meilleures journées en Bourse au cours des 20 dernières années. »
Pression inflationniste, hausse des taux d’intérêt, possibilité de récession : le contexte actuel paraît glauque pour les épargnants et les investisseurs particuliers. Des experts leur donnent quelques conseils pour mieux réussir à tirer leur épingle du jeu.
«Si c’est trop radical, ça ne dure pas. Il faut doser.»