Bien décaisser pour survivre à ses épargnes
En lisant les données d’un sondage Léger réalisé cet été pour le compte de l’organisme ÉducÉpargne, sa présidente, Nathalie Bachand, admet avoir été positivement surprise. « J’ai été quand même étonnée de constater que la moitié du public (54 %) savait ce qu’est le décaissement, qui est le concept clé de la préparation de la retraite », nous dit-elle.
Anciennement connu sous le nom de Question Retraite, l’OBNL ÉducÉpargne avait été créé en 2003 à l’initiative de Retraite Québec afin de sensibiliser la population à l’importance de planifier. Il regroupe désormais une trentaine d’organismes, allant de Protégez-Vous à l’Autorité des marchés financiers en passant par la Chambre de la sécurité financière et l’Institut québécois de planification financière.
Mais Nathalie Bachand ne s’assoit pas sur ses lauriers, car après tout, si 54 % des Québécois savent ce qu’est le décaissement, cela en laisse tout de même 46 % qui n’ont pas une idée claire de la suite. « Ça fait longtemps qu’on insiste sur la notion d’accumuler par l’épargne, mais il faut aussi se demander ce qui arrivera après. »
C’est pourquoi l’organisme vient de mettre en ligne cinq vidéos explicatives sur le décaissement afin de montrer par quelles stratégies il est possible de maximiser ses fonds disponibles pour ses vieux jours.
Comment ça fonctionne ?
Le décaissement, c’est tout simplement l’action de retirer ses épargnes afin de les utiliser. En apparence, c’est simple. Or, la chose est devenue beaucoup plus complexe en raison de la multiplication des véhicules de placements. Le sondage révèle que plus de 90 % des répondants savent ce qu’est un REER ou un CELI, mais que d’autres outils sont beaucoup moins connus, comme la rente viagère, le compte de retraite immobilisé (CRI) ou le fonds de revenu viager (FRV). « De nos jours, les gens ont des fonds de retraite de plusieurs employeurs. Ça aussi, c’est nouveau. »
Tout plan de décaissement doit tenir compte de l’espérance de vie, de l’inflation, de la fiscalité, de la nature des placements, des intentions personnelles, comme celle de continuer de travailler ou non, et de son plan successoral, explique Nathalie Bachand, qui est actuaire de formation et fondatrice du cabinet de planification Bachand Lafleur, groupe conseil. « Tous ces aspects sont importants. Il faut pouvoir jongler avec tout ça. »
Si chaque cas est particulier, ÉducÉpargne mise sur quelques grandes tendances inévitables. L’actuaire donne pour exemple le report de la demande pour vos rentes, qui donne droit à des primes très importantes. La Sécurité de la vieillesse, par exemple, est de 8400 dollars par an, mais si on reporte la demande à 70 ans, elle passe alors à 11 400 dollars par an (soit 36 % de plus). Le Régime de rentes du Québec est encore plus généreux puisqu’il majore la pleine rente de 8,4 % par année de report entre 65 et 70 ans (une prime totale de 42 %). Et à partir de l’an prochain, il sera même possible de faire ce report jusqu’à 72 ans.
« Il est difficile d’avoir un meilleur rendement, d’autant que ces rentes sont indexables et à vie », explique Nathalie Bachand. « Quand on sait que le principal risque d’une personne retraitée est celui de la longévité, l’idée de maximiser des fonds de retraite indexables à vie est critique. »
À ses yeux, l’impératif de planification est la gestion du risque à long terme. Personne ne veut survivre à ses épargnes. Or, lit-on dans Le plan de décaissement. Votre allié pour optimiser vos revenus à la retraite, produit par ÉducÉpargne, « l’espérance de vie à 65 ans a augmenté d’environ six ans depuis 50 ans et devrait progresser d’encore trois autres au cours des 50 prochaines ».
À quoi faire attention dans le contexte actuel ?
Les années d’inflation et d’insécurité financière que vivent les Québécois actuellement changent-elles quelque chose ? En principe, non, parce qu’un décaissement bien planifié se fait toujours dans une perspective à long terme, selon Nathalie Bachand. Le principal risque serait plutôt de surréagir à un événement immédiat pour sortir du scénario prévu, en vendant tout parce qu’on traverse une période de correction boursière.
Nathalie Bachand explique qu’un bon portefeuille d’investissement vise à rassurer le retraité en lui garantissant les sommes disponibles à travers des véhicules de placements moins risqués. « Il ne s’agit pas nécessairement de liquidités. L’idée est de sécuriser les revenus sur une période de cinq ans pour éviter de devoir vendre des placements au mauvais moment. »
Son travail vise aussi à contrecarrer certains mythes, comme celui qu’il vaudrait mieux retirer tôt ses placements non enregistrés pour ne pas payer d’impôt. « Ce n’est pas nécessairement le cas, et c’est pourquoi il vaut mieux consulter un spécialiste, qui fera l’analyse en fonction de votre situation, de vos projets et de la fiscalité. »
« Ça fait longtemps qu’on insiste sur la notion d’accumuler par l’épargne, mais il faut aussi se demander ce qui arrivera après »