Le Devoir

Des exilés russes orphelins de Navalny

- ANDREA PALASCIANO À BERLIN AGENCE FRANCE-PRESSE

Pour les très nombreux opposants russes qui ont dû fuir leur pays, Alexeï Navalny donnait le la. Passé le choc de sa mort, ils tentent de se réorganise­r et de poursuivre avec sa veuve, Ioulia, la mobilisati­on contre le pouvoir de Vladimir Poutine.

« Nous allons pleurer dans nos chambres, dans nos salles de bains, mais publiqueme­nt, nous allons évidemment continuer de nous battre contre le régime, avec tous les moyens à notre dispositio­n », déclare à l’AFP Evgueni Nasyrov, coordonnat­eur du mouvement de Navalny en Allemagne.

« C’est l’objectif de Poutine que nous perdions notre motivation et nous dispersion­s », ajoute le militant, qui a quitté la Russie peu avant l’invasion de l’Ukraine, le 24 février 2022.

Largement exilée, cette opposition continue de faire son possible : pour l’élection présidenti­elle russe du 15 au 17 mars, elle a appelé ceux qui votent contre Poutine à se rendre tous aux bureaux de vote à midi le 17 mars, alors que les autorités répriment férocement toute forme de critique.

Au-delà de ces actions, la cohésion de cette opposition pose problème. Jusqu’à présent, seule l’organisati­on de Navalny forme un courant structuré, ayant réussi à bâtir un mouvement antiPoutin­e crédible avant d’être anéanti par la répression. Mais ce groupe fait cavalier seul face à un assemblage de personnali­tés disparates dont le seul point commun est d’être contre l’invasion de l’Ukraine et le régime russe.

« Ioulia a tout changé »

Parmi ces figures, Marat Guelman, un galeriste russe renommé, critique du Kremlin, décrit des montagnes russes émotionnel­les depuis la mort de l’opposant en prison. « J’ai d’abord pensé qu’il fallait arrêter de penser à la Russie, se concentrer sur son travail, réfléchir à comment organiser une nouvelle vie. »

Puis l’espoir est revenu, notamment grâce à l’annonce choc de Ioulia Navalnaïa, trois jours après la mort de son mari, qui s’est dite prête à reprendre le flambeau.

« Ioulia a tout changé », affirme M. Guelman, désormais installé à Berlin, qui assure même que Mme Navalnaïa saura rassembler encore davantage que son mari.

Elle est, selon lui, la femme de la situation. « Le machisme de Poutine fonctionne bien face aux hommes, mais face à une femme, il ne fonctionne plus. Le visage de la Russie antiguerre doit être celui d’une femme. »

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