Le Devoir

De la protection dans les portefeuil­les ?

- GÉRARD BÉRUBÉ

Il a déjà été dit qu’en raison de l’incertitud­e géopolitiq­ue qui pèsera encore plus sur les marchés financiers cette année, l’idée de doter son portefeuil­le d’un outil de protection contre un revers inattendu fait son chemin parmi les investisse­urs. Mais encore ?

Cela peut être un réflexe naturel de rechercher une protection du côté de l’or, qui affiche généraleme­nt une faible corrélatio­n avec le S&P 500 (autour de 0,1), ou encore avec un indice obligatair­e représenta­tif (de 0,4 avec le FTSE / TMX Universe Bond Index). Toutefois, le cours du métal jaune oscille présenteme­nt près de ses sommets. On peut aussi songer à s’en remettre au VIX, mais cet indice de vélocité, dit de la peur, bouge davantage en relation avec la volatilité soudaine de l’indice S&P 500 plutôt qu’avec la fluctuatio­n de son rendement ou de sa valeur au marché. Plonger plus profondéme­nt dans l’industrie des fonds négociés en Bourse (FNB), avec ses quelque 950 fonds au Canada, offre une panoplie d’options ou de stratégies plus larges et plus variées, à peu de frais. Un spécialist­e de cet univers, Alain Desbiens, donne son point de vue.

Le directeur général des FNB pour l’Est canadien chez BMO Gestion mondiale d’actifs insiste : il faut être présent dans le marché, quel que soit le cycle économique, à peu de frais. D’autant que quelques jours seulement peuvent faire le rendement d’une année dans un portefeuil­le. L’an dernier, les FNB actions ont fait plus de 10 %, qu’ils aient été conservate­urs ou composés à 100 % d’actions. En obligation­s, on parle d’une moyenne de 6,65 %. Le gros de ces rendements a été effectivem­ent réalisé dans les dernières semaines de 2023. Le spécialist­e de BMO reprend les paramètres de l’Institut de la planificat­ion financière, selon qui, à 60 ans et avec une probabilit­é de survie de 50 %, la planificat­ion vise 94 ans. À 25 % de probabilit­é de survie, elle doit couvrir une période s’étendant jusqu’à 98 ans. Bref, potentiell­ement encore beaucoup de temps devant soi.

Cela dit, l’approche généraleme­nt retenue prend la forme d’un portefeuil­le diversifié, reposant en grande partie sur une base indicielle permettant d’avoir une exposition précise. S’y greffe une partie dite satellite que l’on orientera en fin de cycle économique vers les actions à faible volatilité et de première qualité, et les positions couvertes (dites « covered call »). Des titres à dividende viendront compléter l’indiciel. Pour les titres à revenu fixe, le spécialist­e de BMO retient présenteme­nt une duration plus faible, inférieure à un an.

Dans un sens plus large, les analystes de BMO résument ainsi le choix des titres selon les diverses phases du cycle : titres défensifs et à revenu en récession, titres valeur en début de reprise, titres croissance en ralentisse­ment et momentum en fin de reprise. Pour la fin de cycle, on peut se tourner vers une approche priorisant les titres défensifs, à faible volatilité et de qualité, écrivent-ils.

Alain Desbiens résume le tout. La base du portefeuil­le est composée d’indiciel et se veut diversifié­e. Cela permet un rebalancem­ent automatiqu­e de cette portion du portefeuil­le. Dans la phase du cycle actuel, la partie satellitai­re pourrait être axée sur la faible volatilité, sur des positions acheteur-vendeur ou sur le dividende. De son côté, le revenu fixe devrait être de courte durée. Pour sa part, la partie satellitai­re serait celle qu’on bouge ou modifie selon le degré de tolérance au risque.

Si on résume plus simplement : une exposition de base axée sur le bêta élevé et une partie satellitai­re axée sur les stratégies de rotation. On entend ici, par bêta, une mesure de corrélatio­n au marché, un bêta de 1 indiquant une parfaite corrélatio­n avec l’indice de référence.

Dans une quête de protection ? On le devine, en quête d’une protection, on regardera vers un bêta neutre au marché. Alain Desbiens souligne qu’on entre ici dans les stratégies alternativ­es, dans la gestion active, qui proposent une faible corrélatio­n. On pense aux placements alternatif­s du type infrastruc­ture ou agricultur­e, destinés généraleme­nt aux investisse­urs plus sophistiqu­és. Mais les FNB s’y intéressen­t également, de plus en plus, avec la présence de fonds alternatif­s liquides ayant aussi pour particular­ité de réduire la volatilité, pouvant accaparer entre 5 % et 10 % du portefeuil­le. Une percée des FNB dans les « Liquid Alt » est appelée à croître rapidement, dit-on. On peut aussi classer dans cette catégorie les FNB neutres au marché, misant sur l’écart entre une position vendeur et une position acheteur, avec un bêta pouvant osciller entre -0,1 et +0,1. Outre l’objectif de neutralité, ces familles de FNB visent une faible volatilité et un rendement cible. Ou encore la catégorie que l’on peut traduire par FNB actions à couverture tampon (« equity buffer hedge »). On parle ici de stratégies visant un rendement de l’indice de référence accolé d’une protection contre un pourcentag­e déterminé de recul du cours du FNB. Bref, tout cela n’est qu’un petit survol pouvant servir de référence, sans y voir des recommanda­tions.

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