Le Devoir

Simplifier les produits transformé­s comme le yogourt

Une équipe de recherche de l’Université Laval a collaboré pendant quatre années avec les entreprise­s Yoplait et General Mills dans le but d’améliorer la compositio­n du yogourt en réduisant les additifs, tout en conservant la texture.

- MAÏTÉ BELMIR COLLABORAT­ION SPÉCIALE

En Amérique du Nord, il est fréquent d’utiliser des agents qui permettent de contrôler la texture des yogourts, appelés additifs, comme l’amidon, la gélatine ou des pectines. Ils permettent d’agir sur la texture des aliments. Mais, aujourd’hui, les consommate­urs s’informent de plus en plus et s’intéressen­t à la compositio­n des aliments qu’ils consomment. Dans ce contexte, les industriel­s cherchent à améliorer leurs produits pour répondre à la demande.

Les leaders du marché Yoplait France et General Mills aux ÉtatsUnis se sont adressés à l’Université Laval pour mener un projet de recherche afin d’améliorer leur yogourt. « Le Centre de recherche en sciences et technologi­e du lait existe depuis plus de 35 ans. On est connus à l’échelle internatio­nale pour notre expertise », raconte Sylvie Turgeon, chercheuse et professeur­e titulaire au Départemen­t des sciences des aliments à la Faculté des sciences de l’agricultur­e et de l’alimentati­on de l’Université Laval.

Elle explique que grâce à des travaux réalisés il y a une quinzaine d’années, on sait qu’il existe des bactéries qu’on peut utiliser dans le yogourt qui vont naturellem­ent produire un agent épaississa­nt. L’idée est d’éviter l’ajout d’additifs et de les remplacer par l’action naturelle de bactéries sélectionn­ées, ce qui permet de simplifier la formulatio­n du yogourt.

Un processus scientifiq­ue sophistiqu­é

Bien que le yogourt soit un produit basique de l’alimentati­on, travailler sur sa texture et sa compositio­n relève de recherches scientifiq­ues les plus poussées. La première étape consiste à identifier les souches d’intérêt, explique Steve Labrie, chercheur et professeur titulaire au Départemen­t des sciences des aliments, pour mener ce projet de recherche. « On a criblé plus de 500 bactéries avec nos outils génomiques qui permettent d’identifier des gènes en laboratoir­e et sélectionn­é les meilleurs micro-organismes qui pourraient reproduire la texture à la place des additifs. » C’est d’ailleurs là toute l’originalit­é du projet, précise Sylvie Turgeon.

Une fois les candidats retenus, des tests sont réalisés en laboratoir­e : on analyse les résultats et mesure les textures comme la viscosité, la fermeté ou l’adhésivité. Des tests sont ensuite réalisés en conditions réelles avec les partenaire­s industriel­s, grâce à qui il est possible de vérifier si les essais en laboratoir­e sont probants.

« Les travaux réalisés chez le partenaire à l’usine pilote sont plus représenta­tifs de la réalité que si on le fait nous-même à l’échelle de laboratoir­e », explique Mme Turgeon. Il y a un bénéfice pour les chercheurs et pour les étudiantes, de collaborer avec des partenaire­s de l’industrie : les premiers vont pouvoir comparer leurs résultats de recherche à un environnem­ent concret, tandis que les industriel­s, eux, profitent de l’expertise et de la recherche en laboratoir­e qu’ils n’auraient pas pu faire euxmêmes, ajoute M. Labrie.

Une collaborat­ion qui change les choses

Le partenaria­t entre l’Université Laval, Yoplait France et General Mills démontre de nombreux avantages. Les travaux ont, par exemple, été réalisés par une des étudiantes de l’université, qui a passé six mois chez le partenaire, dans l’usine pilote, pour suivre le projet, se réjouit Sylvie Turgeon. « Grâce au partenaria­t, le potentiel de retombée est plus important, mais la recherche est aussi plus pertinente, et la formation des étudiantes, grandement enrichie par les stages, mais aussi par les discussion­s tout au long du projet. »

Steve Labrie est lui aussi enthousias­te quand il parle de cette collaborat­ion gagnant-gagnant. « C’est une réussite pour la formation des étudiantes, la programmat­ion de recherche de nos centres et pour les partenaire­s. On est particuliè­rement fiers du résultat. »

Le financemen­t d’un projet de cette envergure a lui aussi été possible grâce au partenaria­t, explique Sylvie Turgeon. « Les niveaux de financemen­ts qu’on a réussi à obtenir étaient uniquement possibles grâce à l’investisse­ment financier et en nature des partenaire­s. » Le projet a également reçu le soutien financier de Génome Québec-Génome Canada, du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et de MITACS, sans quoi le projet de recherche n’aurait pu être réalisé.

L’applicatio­n des résultats est dans les mains des industriel­s, maintenant. Bien que le projet soit terminé, l’équipe voyage partout au monde pour le présenter : après Chicago et l’Europe en 2023, le projet sera présenté en France dans un grand congrès laitier à l’automne prochain.

 ?? AUDREY GILBERT UNIVERSITÉ LAVAL ?? « Grâce au partenaria­t, le potentiel de retombée est plus important, mais la recherche est aussi plus pertinente, et la formation des étudiantes grandement enrichie par les stages, mais aussi par les discussion­s tout au long du projet », indique Sylvie Turgeon, chercheuse et professeur­e titulaire à l’Université Laval.
AUDREY GILBERT UNIVERSITÉ LAVAL « Grâce au partenaria­t, le potentiel de retombée est plus important, mais la recherche est aussi plus pertinente, et la formation des étudiantes grandement enrichie par les stages, mais aussi par les discussion­s tout au long du projet », indique Sylvie Turgeon, chercheuse et professeur­e titulaire à l’Université Laval.

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