Le Devoir

IRICoR, moteur des sciences de la vie au Québec

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« Sa force de recherche, son expertise dans le développem­ent de thérapies, sa culture entreprene­uriale et son expérience comme facilitate­ur font d’IRICoR un partenaire de choix pour les entreprise­s pharmaceut­iques et biotechnol­ogiques. » Elizabeth Douville, Ph. D., IAS.A., présidente-directrice générale d’IRICoR

Affilié à l’Institut de recherche en immunologi­e et en cancérolog­ie de l’Université de Montréal (IRIC), le centre d’excellence IRICoR se spécialise dans la découverte, le financemen­t et le développem­ent de médicament­s de pointe. La clé du succès : les partenaria­ts établis avec les secteurs public et privé, qui accélèrent la mise en marché des solutions thérapeuti­ques, et ce, pour le bénéfice tant des patients que de l’économie québécoise.

Depuis sa création en 2008, IRICoR a reçu des octrois gouverneme­ntaux de l’ordre de 50 M $ de dollars qui lui ont permis de concevoir des thérapies hautement innovantes, d’établir des ententes de licence d’une valeur de 2,2 G $ qui ont déjà généré 107 M $ de revenus et de fonder plusieurs sociétés dérivées. Un retour sur investisse­ment remarquabl­e, qui n’a toutefois pas prévenu un déclin des subvention­s essentiell­es à son bon fonctionne­ment.

Dans un contexte fortement concurrent­iel, avec des enjeux scientifiq­ues de plus en plus complexes, ne serait-ce qu’en raison de la montée de l’IA, voilà l’un des défis que la nouvelle présidente-directrice générale Elizabeth Douville a le mandat de relever. À la tête d’IRICoR depuis février 2023, la détentrice d’un doctorat en biochimie de l’Université d’Ottawa et fondatrice d’AmorChem, un fonds de capital-risque axé sur l’innovation universita­ire et sa transforma­tion en entreprise, est bien outillée pour guider IRICoR vers de nouveaux sommets.

LA CLÉ DU SUCCÈS: LE MAILLAGE PUBLIC-PRIVÉ

«La recherche fondamenta­le effectuée par les institutio­ns universita­ires du Québec engendre des innovation­s de première importance pour la population comme pour notre économie, souligne Elizabeth Douville. Cela dit, il y a un manque de compréhens­ion en ce qui a trait à nos besoins en matière de financemen­t. Si je peux me permettre l’analogie avec une mine d’or, les octrois que nous recevons facilitent la découverte de pépites brutes. Mais les fonds publics sont actuelleme­nt insuffisan­ts pour que nous puissions polir ces pépites et les transforme­r en produits prêts à être mis sur le marché.»

La solution : les partenaria­ts publics-privés (PPP), fers de lance de l’innovation en recherche médicale. « Ces collaborat­ions entre les sphères académique et industriel­le, que ce soit avec des PME ou des multinatio­nales, constituen­t des modèles d’affaires efficaces pour accélérer la livraison de thérapies, indique la PDG. De plus, elles bénéficien­t à tous les participan­ts. Outre l’injection de capitaux, la mise en commun des connaissan­ces et des expertises fait avancer l’innovation de façon efficiente, et permet de créer de la propriété intellectu­elle et de la valoriser.»

Les PPP sont également essentiels pour franchir la fameuse «vallée de la mort», soit l’écart critique entre les innovation­s issues de la recherche fondamenta­le et la recherche clinique. Ce phénomène bien connu, qui freine l’innovation en phase translatio­nnelle (étape où l’on se penche sur les applicatio­ns thérapeuti­ques des découverte­s), est causé par des enjeux de financemen­t qui se manifesten­t notamment en présence de risque. Or, le risque est une réalité incontourn­able dans le domaine des sciences de la vie en raison des essais cliniques coûteux et des délais qui y sont associés.

«Ce fossé pose un défi à l’échelle globale, affirme Mme Douville. Les modèles d’affaires pour le combler varient d’une région à l’autre, mais la réalité est que si des milliards sont investis dans la recherche fondamenta­le et dans le secteur privé pour soutenir le développem­ent clinique et commercial des thérapies, le milieu de la recherche translatio­nnelle reçoit peu de fonds en comparaiso­n. Le goulot d’étrangleme­nt est là.»

Organisati­on unique en son genre, IRICoR a justement été créée pour faire le pont entre les unités de recherche scientifiq­ue et le secteur pharmaceut­ique. Son écosystème d’experts en gestion de projets, en développem­ent des affaires, en financemen­t, en capital de risque et en propriété intellectu­elle accompagne de façon stratégiqu­e la trentaine de chercheurs de l’IRIC ainsi que les équipes d’autres institutio­ns pancanadie­nnes pour permettre le développem­ent de leurs découverte­s, ici et à l’internatio­nal.

OBJECTIF: ACCÉLÉRER LA MISE EN MARCHÉ DE THÉRAPIES INNOVANTES

La PDG d’IRICoR souligne que la décroissan­ce des fonds publics destinés à la recherche fondamenta­le en sciences de la vie – qui touche aussi les bourses étudiantes – met à risque la livraison des médicament­s. « C’est à contre-courant de ce que font les États-Unis et l’Europe, le Royaume-Uni notamment, qui ont redoublé d’efforts pour soutenir le milieu académique dans le contexte pandémique et postpandém­ique.

Or, l’équilibre entre les sources de financemen­t est très délicat: lorsque les octrois publics sont insuffisan­ts, les unités de recherche ne sont pas en position de force pour négocier et faire valoir leurs contributi­ons scientifiq­ues, ce qui peut diminuer leur part du gâteau. Ce n’est pas ce que nous souhaitons ! Alors qu’avec les fonds nécessaire­s, nous pouvons attendre de trouver les bons partenaire­s et développer avec eux des ententes qui sont mutuelleme­nt avantageus­es. L’enjeu est important : si les bonnes mesures ne sont pas en place, nous risquons de perdre notre patrimoine de propriété intellectu­elle.»

Le message est clair, les ententes avec des partenaire­s de premier plan sont essentiell­es pour passer du laboratoir­e à l’administra­tion des thérapies aux patients. Un bel exemple : la collaborat­ion établie avec la société française Domain Therapeuti­cs et le géant japonais ONO Pharmaceut­ical. Elle soutient des activités de recherche et de découverte de nouvelles petites molécules portant sur les travaux du Dr Michel Bouvier en vue d’offrir une option thérapeuti­que aux patients souffrant d’une maladie métaboliqu­e.

Citons également un récent accord de licence résultant d’une étroite collaborat­ion avec Ipsen, l’UdeM et IRICoR. L’entreprise pharmaceut­ique française à portée internatio­nale a acquis les droits exclusifs d’un programme de développem­ent en phase précliniqu­e qui aura des applicatio­ns potentiell­es en oncologie. Ipsen mènera ainsi l’ensemble des activités de développem­ent et de commercial­isation du candidat-médicament à l’échelle mondiale. Une entente fructueuse puisque Ipsen, l’UdeM et IRICoR ont annoncé l’expansion de ce partenaria­t à deux autres programmes en oncologie.

DES ENTREPRISE­S DÉRIVÉES POUR CRÉER DE LA VALEUR DANS NOTRE SOCIÉTÉ

La création de sociétés, une stratégie de PPP, permet de soutenir la recherche translatio­nnelle tout en assurant la protection des brevets. Ainsi, IRICoR et le Centre pour la commercial­isation de la médecine régénératr­ice (CCMR) ont conjointem­ent lancé ExCellTher­a pour aider les patients atteints de leucémie qui sont en attente d’une greffe. L’entreprise basée à Montréal développe une technique innovante visant l’expansion et le rajeunisse­ment des cellules souches mise au point par les Drs Guy Sauvageau et Anne Marinier de l’IRIC.

Autre bel exemple : la société d’immunothér­apie contre le cancer Epitopea, également basée à Montréal et dotée d’un bureau satellite à Londres, a reçu 14 M $ de la part d’un syndicat transatlan­tique d’investisse­urs dont font partie CTI Capital, le Fonds de solidarité FTQ, AdventLife­Sciences et Cambridge Innovation Capital. Ce projet de première importance, amorcé et soutenu à toutes les étapes par IRICoR, permet le déploiemen­t de la technologi­e novatrice d’antigènes tumoraux mise au point par les chercheurs de l’IRIC Claude Perreault et Pierre Thibault, en collaborat­ion avec Sébastien Lemieux.

Comme le démontrent ces avancées, l’innovation québécoise dans les sciences de la vie joue un rôle capital pour améliorer la qualité de vie des patients et relever les défis auxquels notre système de santé doit faire face. « Sa force de recherche, son expertise dans le développem­ent de thérapies, sa culture entreprene­uriale et son expérience comme facilitate­ur font d’IRICoR un partenaire de choix pour les entreprise­s pharmaceut­iques et biotechnol­ogiques, conclut Elizabeth Douville. Je suis convaincue qu’en travaillan­t en symbiose avec les instances publiques et privées tout en protégeant la propriété intellectu­elle qui a été créée, nous sommes bien positionné­s pour contribuer à la santé et à la richesse collective et redonner aux citoyens qui ont contribué aux fonds publics. »

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