Dialoguer avec un robot
L’intelligence artificielle (IA) vient juste de mettre un pied sur le pas de notre porte que nous l’invitons à entrer chez nous, mais aussi en nous. Une des applications qui font déjà parler d’elles est le robot conversationnel, auquel nous attribuons facilement des qualités et des traits humains, seulement du fait qu’il devient habile à bien les imiter.
Serge Tisseron, psychiatre : « Et comme rien ne mobilise autant l’être humain que de pouvoir parler de lui et d’être écouté, les robots deviendront probablement nos confidents privilégiés. Le problème est que plus ces machines deviendront compétentes dans le domaine de la compréhension et de la simulation émotionnelle, plus nous serons tentés de projeter sur elles des compétences imaginaires. »
Notre mémoire n’est pas une clé USB, et la conscience ne sera jamais une suite d’algorithmes telle que certains parangons transhumanistes le prétendent. Nous risquons, en nous conformant à ces nouveaux diktats technologiques, de nous robotiser nous-mêmes et d’aliéner la nature profonde de notre être. Et cela pourrait se faire en dialoguant de choses importantes avec une machine froide, sans intelligence réelle, ne possédant ni la connaissance de l’existence, ni celle de ses expériences humaines, ni ce regard, porté mutuellement d’un humain à l’autre, seul capable de dire beaucoup, sans parler. Si vous voulez être certains de ne pas dialoguer avec le vide sidéral des circuits imprimés, cherchez ces fenêtres de l’esprit que possèdent naturellement les vrais êtres.
Marc Boucher, auteur de l’essai La révolution du regard silencieux (XYZ, 2022) Laval, le 26 février 2024