L’industrie fossile prévoit des investissements en hausse
Le secteur gazier se réjouit de l’achèvement de l’expansion du pipeline Trans Mountain
Quelques semaines après la fin d’une conférence climatique mondiale (COP28) qui s’est conclue sur une entente en vue d’une « transition » hors des énergies fossiles, l’industrie pétrolière canadienne prévoit une nouvelle hausse des investissements dans la production, hausse qui est stimulée par la fin de la construction de nouvelles infrastructures destinées à faciliter l’exportation de sa production.
Selon des données publiées mardi par l’Association canadienne des producteurs pétroliers (ACPP), les dépenses d’investissement dans le secteur du pétrole et du gaz « en amont » atteindront 40,6 milliards de dollars en 2024, ce qui représente une légère augmentation par rapport aux investissements estimés à 39 milliards de dollars pour 2023.
Sans surprise, la majorité de ces sommes se concentrent en Alberta, soit 29 milliards de dollars, dont 13,3 milliards dans le développement des sables bitumineux.
L’ACPP prévoit aussi une « légère augmentation » des investissements en Colombie-Britannique, principalement en raison de la production par fracturation qui servira à alimenter le nouveau complexe de liquéfaction LNG Canada avec du gaz qui sera transporté par le pipeline Coastal GasLink. Tout ce projet « se dirige vers sa phase de mise en service et de démarrage », précise l’organisme représentant l’industrie des énergies fossiles.
Le ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault, a aussi approuvé en mars 2023 un projet d’usine flottante qui produira chaque année trois millions de tonnes de gaz naturel liquéfié dans la région de Kitimat, en Colombie-Britannique. Le projet sera alimenté par Coastal GasLink.
Quant au large de Terre-Neuve-etLabrador, on anticipe des dépenses de 2 milliards de dollars cette année, alors que « le potentiel de croissance et d’augmentation des exportations demeure considérable » pour l’industrie pétrolière en milieu marin. En plus du projet Bay du Nord, approuvé par le gouvernement Trudeau, on prévoit lancer des appels d’offres supplémentaires d’ici 2029 afin d’accorder de nouveaux permis d’exploration.
Pétrole en milieu marin
« Il y a place à un optimisme prudent par rapport à la production actuelle de pétrole canadien, qui atteint des niveaux records, en prévision de l’achèvement du projet d’expansion de Trans Mountain au deuxième trimestre. Nous nous rapprochons également de l’achèvement de la première installation d’exportation de gaz naturel liquéfié d’importance mondiale du Canada, en Colombie-Britannique, prévue en 2025 », résume la présidente et cheffe de la direction de l’ACPP, Lisa Baiton.
« Alors que ce mois de février est en passe de battre un nombre sans précédent de records de chaleur, les pétrolières canadiennes nous montrent une fois de plus qu’elles ne prennent pas leur responsabilité dans la crise climatique au sérieux et continuent à mettre de l’huile sur le feu », a déploré mardi Salomé Sané, chargée de campagne climat chez Greenpeace Canada.
« Au lieu de mettre des milliards dans des projets qui aggraveront la crise climatique, il faudrait que cet argent soit investi dans la transition vers des énergies propres et redistribué aux communautés en première ligne face aux impacts du changement climatique », a-t-elle ajouté.
Plafond d’émissions
« Malgré ces tendances positives, il y a toujours un sentiment de prudence, en grande partie en raison de l’incertitude persistante entourant la politique sur les émissions proposée au Canada, qui continue d’être un facteur important dans les décisions d’investissement », souligne par ailleurs Mme Baiton.
Le gouvernement Trudeau a annoncé à la fin de 2023 qu’un plafond d’émissions de gaz à effet de serre (GES) serait imposé à l’industrie pétrolière et gazière, mais pas avant 2030. Le plan fédéral prévoit aussi la « souplesse » nécessaire pour permettre aux entreprises d’augmenter la production, notamment dans le secteur des sables bitumineux. Cette production pourrait avoisiner 5,2 millions de barils par jour en 2030, soit près de 1,9 milliard par année, dont environ 1,3 milliard de barils provenant des sables bitumineux.
L’objectif est néanmoins de réduire les émissions à 106 millions de tonnes (Mt), voire 112 Mt en 2030, ce qui équivaut à un recul de 16 % à 20 % par rapport au niveau de 2005. À titre de comparaison, le Canada a fixé un objectif de réduction nationale des émissions de GES de 40 % d’ici 2030 par rapport à 2005.
Selon le plus récent bilan officiel des émissions de GES du Canada, celui de 2021, les émissions imputables uniquement à l’extraction d’énergies fossiles ont augmenté, pour atteindre 103 Mt. Des données publiées en septembre par l’Institut climatique du Canada indiquent que la croissance des GES du secteur se serait poursuivie en 2022.