Le tutorat ne fait pas relâche
Plus d’une centaine d’écoles à Laval et à Montréal resteront ouvertes pour aider des milliers de jeunes à rattraper le retard causé par la grève
La relâche scolaire débutera lundi pour la majorité des élèves au Québec. À Montréal et à Laval, plus d’une centaine d’écoles demeureront exceptionnellement ouvertes afin d’offrir du tutorat à des milliers de jeunes ayant besoin d’aide pour rattraper le retard occasionné par la grève des enseignants. Des organismes communautaires poussent aussi à la roue en organisant des camps de jour pédagogiques. Au privé, certaines entreprises de tutorat notent une augmentation de la demande.
Au Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), 19 écoles primaires et 9 écoles secondaires — sur environ 160 — offriront des journées de tutorat durant la semaine de relâche. Plus de 950 élèves en bénéficieront, selon le CSSDM. Le Centre de services scolaire de la Pointe-de-l’Île, lui, indique que des activités de rattrapage auront lieu dans « au moins » 17 écoles primaires et 7 écoles secondaires — sur une cinquantaine d’établissements.
Au Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys, 21 écoles primaires sur 75 ouvriront leurs portes ainsi que 13 des 15 écoles secondaires. Deux écoles spécialisées en feront autant. Selon le Centre, 3331 élèves se sont inscrits aux activités de rattrapage jusqu’à présent. Dans la région de Laval, 1048 élèves bénéficieront de services de tutorat en présentiel ou en virtuel dans 21 écoles primaires et 7 écoles secondaires, selon le Centre de services scolaire.
Le tutorat variera selon les écoles. Dans la métropole, beaucoup ont ciblé les élèves de classes d’accueil. « Elles vont faire des activités pour permettre aux élèves d’interagir en français », dit Stéphane Richard, vice-président de l’Association montréalaise des directions d’établissement scolaire. Par exemple, l’établissement secondaire qu’il dirige organisera une visite au Centre des sciences et une sortie sur le mont Royal. « On essaie de faire d’une pierre deux coups : atteindre nos objectifs scolaires, mais de façon plus ludique, pour permettre aux élèves d’avoir une certaine forme de répit », explique-t-il.
L’école primaire Guillaume-Couture, située dans l’est de Montréal, a pour sa part sollicité l’aide du Service des loisirs St-Fabien pour mettre sur pied un camp de la relâche. L’organisme communautaire avait déjà l’intention d’en lancer un pour les familles de son secteur, Mercier-Ouest. « Mais la vocation pédagogique n’était pas prévue », précise sa directrice générale, Julie Hornez.
Une enseignante, deux étudiants en enseignement et une éducatrice en service de garde ont planifié la semaine d’activités. Au programme : sortie à
On essaie de faire d’une pierre deux coups : atteindre nos objectifs académiques, mais de façon plus ludique, pour permettre aux élèves d’avoir une certaine forme de répit
STÉPHANE RICHARD
la bibliothèque, chasse au trésor « de mots » pour apprentis détectives ; rallye d’oeuvres d’art dans le métro de Montréal, etc. Le camp gratuit, qui se tiendra à l’école secondaire Louis-Riel, accueillera des jeunes de quatre écoles primaires. Il est notamment financé par le Réseau réussite Montréal, qui a reçu 3,2 millions de dollars de Québec dans le cadre des mesures de rattrapage.
Selon Julie Hornez, le recrutement n’a pas été si aisé. Pour le moment, 110 élèves sont inscrits à l’une des journées d’activités. « On s’attendait à ce que les parents dont les enfants ont été désignés par les enseignants directement acceptent d’emblée, mais ça n’a pas été le cas », affirme-t-elle. Certaines familles avaient déjà planifié leurs activités de la relâche. Beaucoup d’enfants des classes d’accueil ont toutefois levé la main. « Ce sont des jeunes qui ont parlé pendant toute la grève en espagnol ou dans une autre langue d’origine à la maison et là, on sent qu’il y a eu une chute [dans leur apprentissage du français] », dit Julie Hornez.
À Montréal, les élèves ont été en congé forcé pendant les 22 jours de grève générale illimitée de la Fédération autonome de l’enseignement. Ils sont revenus en classe en janvier, après deux semaines de vacances durant le temps des Fêtes.
Populaire
Le camp de jour du Centre Lasallien, un organisme communautaire dans Saint-Michel, est populaire cette année, notamment en raison de la grève des enseignants. « On a dû arrêter les inscriptions à 50 jeunes, dit Mourad Bentouati, conseiller en gestion de projets. Il y avait une forte demande. On aurait pu aller jusqu’à une centaine. »
Le camp, qui s’inscrit dans le plan de rattrapage de Québec, offrira des activités axées sur les sciences, sur la technologie, sur l’ingénierie, sur les arts, sur les mathématiques et sur les sports. Une nouveauté. « Ça va vraiment être de la [réalisation] de projets, dit M. Bentouati. Par exemple : on va construire une station météorologique ou créer un miniconcert avec des robots. »
Inquiets des effets de la grève, des parents font aussi appel à des entreprises privées pour aider leur enfant à rattraper leur retard scolaire. Cindy Ouellet, qui a fondé La Méliora, accueillera huit enfants ayant des troubles d’apprentissage dans son « camp », qui se tiendra pendant trois avant-midi dans la région de Québec. Il s’agit de la première édition. « C’est une heure de jeux, d’ateliers ludiques en lien avec la lecture, l’écriture ou les mathématiques, précise l’enseignante au primaire. Après, on fait une activité de sciences, d’arts ou culinaire. »
Tutorax, de son côté, propose un tutorat individuel ou en petits groupes durant la relâche. « On voit une augmentation de 10 % de la demande par rapport à la même période l’année passée », dit sa cofondatrice Audrey Cloutier.
Succès scolaire, lui, affirme recevoir chaque semaine de nouvelles demandes, mais anticipe une « augmentation marquée » après la remise du deuxième bulletin, vers la fin mars. Québec a décalé la date de transmission des notes de deux semaines afin de « maximiser » le temps d’enseignement et de « favoriser » le rattrapage.