L’approche caquiste dans le dossier Northvolt peu populaire
Selon un sondage publié mercredi, 68 % des répondants sont favorables à un examen du projet par le BAPE
Une majorité de Québécois désapprouvent la décision du gouvernement Legault de changer la réglementation environnementale avant l’annonce du projet Northvolt, ce qui a permis à la future « giga usine » d’échapper à l’évaluation normalement imposée aux grands complexes industriels comme celui qui sera construit en Montérégie. Le gouvernement a néanmoins rejeté de nouveau mercredi l’idée d’imposer un tel examen.
Selon un nouveau sondage commandé par huit groupes environnementaux, 53 % des Québécois sont en « désaccord » avec la décision du gouvernement de modifier la réglementation qui prévoyait auparavant qu’un projet comme Northvolt soit automatiquement soumis à une procédure d’évaluation complète, incluant une étude d’impact et un examen sous l’égide du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE).
Dans le cas de Northvolt, l’usine y serait assujettie si elle avait une capacité de production annuelle d’au moins 60 000 tonnes métriques. Ce seuil était fixé à 50 000 tonnes jusqu’en juillet dernier, mais il a été modifié par le gouvernement Legault. L’usine prévoit une production annuelle de 56 000 tonnes.
Mardi, le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, a défendu la décision de modifier les règles environ deux mois avant l’annonce du mégaprojet soutenu et financé par le gouvernement caquiste. « Je peux vous assurer qu’il n’y a pas eu de grand complot pour avantager Northvolt, a-t-il dit. Certains journalistes, des partis de l’opposition prétendent qu’on a modifié les règles pour que Northvolt puisse éviter un BAPE. J’espère que vous comprenez que c’est totalement faux. »
M. Fitzgibbon a reconnu que son gouvernement a fixé une norme qui fait en sorte que la production de cathodes par Northvolt, établie à 56 000 tonnes métriques, dispense l’entreprise de se soumettre à un BAPE. « C’est vrai que le seuil du BAPE pour la production de cathodes est plus élevé que celui de la production de Northvolt », a-t-il déclaré, tout en critiquant au passage « une certaine forme de journalistes, de journalistes militants ».
Pour le BAPE
Les résultats de ce sondage abondent dans le sens d’une enquête commandée par Northvolt, et publiée plus tôt cette semaine, en ce qui a trait à la pertinence de mandater le BAPE pour analyser ce projet avant de l’autoriser. En tout, 68 % des 1122 personnes sondées à l’échelle de la province sont favorables à la tenue d’un BAPE.
Quelque 67 % des 500 répondants du sondage commandé par l’entreprise et mené auprès de citoyens de six villes de la Montérégie étaient pour un tel examen, une pratique courante au Québec pour les grands projets qui peuvent avoir des impacts environnementaux et sociaux.
Même si deux sondages indiquent que les Québécois sont pour un examen du BAPE, le cabinet du ministre de l’Environnement du Québec, Benoit Charette, a de nouveau fermé la porte mercredi.
« Le Québec possède l’un des cadres d’évaluation environnementale les plus rigoureux en Amérique du Nord. L’analyse environnementale réalisée par [le] ministère n’y fait pas exception. Les normes environnementales sont les mêmes, peu importe la procédure à suivre, et ce, pour toutes les entreprises. Je tiens à rappeler que l’entreprise devra se soumettre au BAPE pour la phase relative au recyclage des matériaux de batteries », a-t-on fait valoir dans une réponse écrite.
Et selon les groupes environnementaux qui ont commandé le sondage publié mercredi, « avec près d’un répondant sur cinq qui affirme être indécis à l’égard du projet, le gouvernement aurait tout avantage à s’assurer que la population soit mieux informée des tenants et aboutissants de ce dernier ». Actuellement, il est impossible de savoir quels sont les détails du projet analysé par le gouvernement, en vue de l’autoriser.
Les organisations estiment qu’« en jouant avec la réglementation, le gouvernement a entraîné la méfiance envers ses décisions et les projets qu’il propose ». Selon les groupes, le ministre Benoit Charette « peut et doit utiliser son pouvoir discrétionnaire afin de déclencher une évaluation du BAPE » pour le projet de Northvolt d’ici la date butoir du 22 mars.
Le 24 février 2024, Pallas Data a sondé un échantillon aléatoire de 1122 personnes âgées de 18 ans ou plus et vivant dans la province de Québec. La marge d’erreur du sondage est de ± 2,9 %, à un niveau de confiance de 95 %.