Somptueux retour en orbite du Sibelius du Métropolitain
Yannick Nézet-Séguin et son orchestre impressionnent dans un CD de grande classe
L’étiquette québécoise Atma publie vendredi le couplage des Symphonies nos 2 et 5 de Jean Sibelius. Cette association astucieuse des deux oeuvres symphoniques les plus célèbres du compositeur finlandais est aussi un jalon majeur dans la discographie de Yannick Nézet-Séguin et de l’Orchestre Métropolitain.
La parution de la 2e Symphonie de Sibelius tombe à pic à quelques jours d’un concert où l’Orchestre Métropolitain et son chef présenteront à Carnegie Hall le programme qui ouvrait leur saison 20232024, concert à l’occasion duquel cette 2e Symphonie de Sibelius avait été enregistrée. « Ils sont prêts ! » avions-nous alors titré, et le disque renforce encore l’impression très positive du concert.
Minutie
Nous nous souvenons très bien du début du cycle Sibelius du Métropolitain. La parution de la 1re Symphonie était tombée un peu à plat, car, au même moment, le monde musical s’esbaudissait devant les paillettes de l’intégrale naissante du jeune Finlandais Santtu-Matias Rouvali (Alpha), sans remarquer que les grands effets spectaculaires ou inouïs (au sens propre) se faisaient au détriment de la fidélité à la partition. Depuis cinq ans, le « système Rouvali » commence à se révéler et à se fissurer. La fidélité de Yannick Nézet-Séguin paie à long terme.
Et si nous mentionnons cela ici, c’est parce que la minutie de la découpe, la manière de balancer intelligemment tel instrument ici ou là (écoutez les bois dans le 1er mouvement de la 2e entre 1 min 58 et 2 min 28, ou les frémissements de cordes graves à 4 min 40 du finale de la 5e Symphonie), le dosage de la nuance avec laquelle va se déployer telle ou telle respiration, se dérouler tel ou tel changement de thème, sont soupesés et maîtrisés avec minutie et intelligence.
Yannick Nézet-Séguin évite le plus dommageable dans Sibelius : la fuite en avant. Le chef cadre la musique comme on cadre un paysage dans un tableau (2e mouvement de la 5e Symphonie). Parfois, on a l’impression (enfin, ses détracteurs, surtout) que Sibelius, ce sont des notes un peu bébêtes alignées et répétées. Mais ici, au contraire, le 2e mouvement de la 5e nous montre le poids des choses, que le chef fait s’exprimer aussi, un peu plus loin, dans le son, avec la densité du traitement des cuivres à l’amorce de la coda. Cette tension se construit après 5 minutes dans le dernier mouvement, avec une explosion de ce noyau en divers endroits (à 7 min 32 notamment).
Misant sur l’intelligence des dynamiques et des lignes de force de cette musique, Yannick Nézet-Séguin et son orchestre réussissent un somptueux couplage des deux grandes symphonies sibéliennes après un CD des Symphonies nos 3 et 4 marqué par une 4e Symphonie plus en demi-teintes.
Retour sur orbite, donc. Et dans le volet le plus important du cycle.
Le 2e mouvement de la 5e nous montre le poids des choses, que le chef fait s’exprimer aussi, un peu plus loin, dans le son