Le Devoir

Somptueux retour en orbite du Sibelius du Métropolit­ain

Yannick Nézet-Séguin et son orchestre impression­nent dans un CD de grande classe

- CHRISTOPHE HUSS LE DEVOIR

L’étiquette québécoise Atma publie vendredi le couplage des Symphonies nos 2 et 5 de Jean Sibelius. Cette associatio­n astucieuse des deux oeuvres symphoniqu­es les plus célèbres du compositeu­r finlandais est aussi un jalon majeur dans la discograph­ie de Yannick Nézet-Séguin et de l’Orchestre Métropolit­ain.

La parution de la 2e Symphonie de Sibelius tombe à pic à quelques jours d’un concert où l’Orchestre Métropolit­ain et son chef présentero­nt à Carnegie Hall le programme qui ouvrait leur saison 20232024, concert à l’occasion duquel cette 2e Symphonie de Sibelius avait été enregistré­e. « Ils sont prêts ! » avions-nous alors titré, et le disque renforce encore l’impression très positive du concert.

Minutie

Nous nous souvenons très bien du début du cycle Sibelius du Métropolit­ain. La parution de la 1re Symphonie était tombée un peu à plat, car, au même moment, le monde musical s’esbaudissa­it devant les paillettes de l’intégrale naissante du jeune Finlandais Santtu-Matias Rouvali (Alpha), sans remarquer que les grands effets spectacula­ires ou inouïs (au sens propre) se faisaient au détriment de la fidélité à la partition. Depuis cinq ans, le « système Rouvali » commence à se révéler et à se fissurer. La fidélité de Yannick Nézet-Séguin paie à long terme.

Et si nous mentionnon­s cela ici, c’est parce que la minutie de la découpe, la manière de balancer intelligem­ment tel instrument ici ou là (écoutez les bois dans le 1er mouvement de la 2e entre 1 min 58 et 2 min 28, ou les frémisseme­nts de cordes graves à 4 min 40 du finale de la 5e Symphonie), le dosage de la nuance avec laquelle va se déployer telle ou telle respiratio­n, se dérouler tel ou tel changement de thème, sont soupesés et maîtrisés avec minutie et intelligen­ce.

Yannick Nézet-Séguin évite le plus dommageabl­e dans Sibelius : la fuite en avant. Le chef cadre la musique comme on cadre un paysage dans un tableau (2e mouvement de la 5e Symphonie). Parfois, on a l’impression (enfin, ses détracteur­s, surtout) que Sibelius, ce sont des notes un peu bébêtes alignées et répétées. Mais ici, au contraire, le 2e mouvement de la 5e nous montre le poids des choses, que le chef fait s’exprimer aussi, un peu plus loin, dans le son, avec la densité du traitement des cuivres à l’amorce de la coda. Cette tension se construit après 5 minutes dans le dernier mouvement, avec une explosion de ce noyau en divers endroits (à 7 min 32 notamment).

Misant sur l’intelligen­ce des dynamiques et des lignes de force de cette musique, Yannick Nézet-Séguin et son orchestre réussissen­t un somptueux couplage des deux grandes symphonies sibélienne­s après un CD des Symphonies nos 3 et 4 marqué par une 4e Symphonie plus en demi-teintes.

Retour sur orbite, donc. Et dans le volet le plus important du cycle.

Le 2e mouvement de la 5e nous montre le poids des choses, que le chef fait s’exprimer aussi, un peu plus loin, dans le son

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1/2 Orchestre Métropolit­ain, Yannick Nézet-Séguin. Atma ACD2 2453.
Sibelius Symphonies nos 2 et 5 1/2 Orchestre Métropolit­ain, Yannick Nézet-Séguin. Atma ACD2 2453.

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