Le Devoir

Ioulia Navalnaïa redoute des arrestatio­ns aux funéraille­s de son mari

- III AGENCE FRANCE-PRESSE À VARSOVIE

Les funéraille­s de l’opposant russe Alexeï Navalny, mort le 16 février dans une colonie pénitentia­ire du Grand Nord, auront lieu vendredi après-midi à Moscou, ont annoncé sa femme et son équipe mercredi.

« Le service funéraire pour Alexeï se déroulera en l’église de l’icône NotreDame “Soulage mon chagrin” à Marino le 1er mars à 14 h (6 h au Québec). Les funéraille­s auront lieu au cimetière Borisovssk­i », dans le sud-est de la capitale russe, a déclaré son équipe sur Telegram.

La cérémonie religieuse devrait ainsi être organisée dans le respect du rite orthodoxe sous les coupoles noires ornées de croix dorées de cette petite église située à moins de vingt kilomètres des murs rouges du Kremlin.

Selon l’un des proches collaborat­eurs d’Alexeï Navalny, Ivan Jdanov, la mise en terre suivra à 16 h, heure locale (8 h au Québec), dans le cimetière situé tout près.

Ioulia Navalnaïa, la veuve de l’opposant, a regretté qu’aucune cérémonie civile d’exposition du corps ouverte à un plus large public — comme c’est souvent le cas après le décès de grandes personnali­tés en Russie — n’ait été autorisée. « Deux personnes sont responsabl­es [de cela] : Vladimir Poutine et Sergueï Sobianine », le maire de Moscou, a écrit Ioulia Navalnaïa sur le réseau X.

« Les gens au Kremlin l’ont tué, puis ont bafoué son corps, puis ont bafoué sa mère, et maintenant bafouent sa mémoire. Nous ne voulons pas d’un traitement de faveur, seulement donner aux gens la possibilit­é de faire normalemen­t leurs adieux à Alexeï », a-t-elle poursuivi.

Plus tôt dans la journée, dans un discours au Parlement européen à Strasbourg, elle a dit redouter des arrestatio­ns lors des funéraille­s. Car ces obsèques pourraient mobiliser en nombre les partisans de l’ancien adversaire numéro 1 de Vladimir Poutine et être gênantes pour le président russe, qui se prépare à un nouveau sacre à l’issue d’un scrutin sans opposition prévu du 15 au 17 mars.

Le dispositif policier autour de l’église et du cimetière risque ainsi d’être particuliè­rement important.

Depuis la remise du corps d’Alexeï Navalny à sa mère samedi dernier, l’équipe de l’opposant cherchait un lieu pour un « adieu public », mais se voyait « rejeter » toute demande, les autorités faisant pression, selon elle, sur les responsabl­es des lieux proposés.

« Partout, on a refusé de nous donner quoi que ce soit. Dans certains endroits, on nous a dit que c’était interdit », a expliqué M. Jdanov sur Telegram, fustigeant l’attitude du « Kremlin et [de Sergueï] Sobianine », un proche de Vladimir Poutine.

Silence de Poutine

Dans les années 2010, avant que la machine répressive ne s’abatte complèteme­nt sur lui, Alexeï Navalny parvenait à mobiliser des foules, en particulie­r dans la capitale russe, gagnant ainsi son statut d’opposant numéro 1 au Kremlin. En 2013, il avait obtenu près de 30 % des voix aux élections municipale­s à Moscou, face à Sergueï Sobianine.

Ont suivi notamment des intimidati­ons, de courtes peines de prison, puis un empoisonne­ment en 2020 dont il accusait Vladimir Poutine d’être le responsabl­e, malgré les dénégation­s du chef de l’État russe.

Alexeï Navalny est rentré en Russie début 2021 après sa convalesce­nce et a été immédiatem­ent arrêté sur ordre des autorités. Au moment de sa mort, il purgeait une peine de 19 ans pour « extrémisme » dans une colonie de l’Arctique.

Entre-temps, l’assaut contre l’Ukraine lancé il y a deux ans avait accéléré la répression contre toute voix critique du Kremlin.

De son côté, Vladimir Poutine, qui doit prononcer jeudi son discours annuel à la nation, n’a toujours pas réagi à la mort de son principal détracteur.

Les circonstan­ces du décès d’Alexeï Navalny, qui a ému partout dans le monde, restent encore floues. Selon les services pénitentia­ires russes, il est mort à la suite d’un soudain malaise « après une promenade ».

L’équipe d’Alexeï Navalny ainsi que de nombreux dirigeants occidentau­x ont quant à eux accusé Vladimir Poutine du « meurtre » de l’opposant, qui a passé trois années de détention dans des conditions très rudes.

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FREDERICK FLORIN AGENCE FRANCE-PRESSE Ioulia Navalnaïa a demandé à l’Union européenne de tenir tête à Vladimir Poutine, mercredi, à Strasbourg, en France.

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