La francisation, mission impossible ?
Depuis 2011, la part de la population qui ne connaît pas le français a augmenté de 52 % et celle de ceux qui travaillent en anglais de 41 % !
Le commissaire à la langue française, Benoît Dubreuil, vient de produire un volumineux rapport sur la question brûlante de l’heure, l’immigration temporaire. La force du document est de rassembler les données pertinentes en une seule synthèse accessible et, également, de cadrer rationnellement le débat sur la francisation.
Plusieurs constats ressortent. Premièrement, l’immigration temporaire est hors de contrôle avec une croissance de 86 065 à 528 034 immigrants temporaires en 7 ans et, deuxièmement, cette immigration est une cause directe d’anglicisation (la population non permanente représente maintenant 6 % de la population du Québec et le tiers ne parle pas français).
Cette hausse incontrôlée, anarchique, de l’immigration temporaire est en train de conduire non seulement à une crise du logement sans précédent, à une crise généralisée des services publics, mais aussi à une forte accélération de l’anglicisation du Québec. Depuis 2011, la part de la population qui ne connaît pas le français a augmenté de 52 % et celle de ceux qui travaillent en anglais de 41 % !
Bilinguisme concurrentiel
Là où le commissaire frappe, et frappe fort, c’est en se penchant sur la question de la francisation éventuelle de ces volumes d’immigrants. Il met le doigt, sans le dire avec ces mots, sur le bilinguisme concurrentiel qui règne au Québec comme source des problèmes de francisation des immigrants ; c’est-à-dire l’existence de deux sociétés d’intégration parallèles, l’une anglaise et l’autre française ; les immigrants étant libres de choisir l’une ou l’autre en fonction de leur tropisme ou de leur maîtrise préalable de l’anglais ou du français.
Ce bilinguisme concurrentiel est maintenu (au Québec seulement !) par la Loi sur les langues officielles fédérale et, aussi, par le Québec, qui, malgré ses affirmations, est un État qui maintient le bilinguisme concurrentiel dans les services publics (la loi 96 n’ayant pas mis fin à la chose de manière convaincante) et dans tout le réseau d’éducation postsecondaire.
De plus, le Québec étant une simple province, il n’a pas de visibilité ou d’existence à l’international, ce qui fait que le message que les immigrants captent avant l’arrivée au pays est celui émis par le
Canada, qui hurle à la face du monde qu’il est un pays anglais.
Franciser, dans ce contexte, devient extrêmement ardu. Exemple ? En équivalents à temps complet, le nombre de personnes formées par l’entremise de l’offre gouvernementale en francisation correspond à seulement 5,4 % du nombre de personnes ne connaissant pas le français. Au rythme actuel, la francisation de ce bloc sera terminée dans 18 ans et demi, en supposant, simple détail, que l’immigration tombe immédiatement à zéro. Le commissaire a aussi estimé le coût que cela représenterait d’assurer une francisation de tous les immigrants temporaires qui ne connaissent pas le français. Résultat ? Autour de 12-13 milliards de dollars !
La francisation continue d’être un « fiasco », comme le titrait déjà le rapport du Vérificateur général en 2017. Le Québec n’a tout simplement pas la capacité de franciser autant de monde, aussi rapidement. La francisation, dans le contexte d’immigration massive qui est le nôtre, est tout simplement impossible.