Le Devoir

La demoiselle pas du tout en détresse

Millie Bobby Brown incarne avec conviction une princesse débrouilla­rde qui doit s’extirper des griffes d’un dragon dans Damsel

- FRANÇOIS LÉVESQUE LE DEVOIR

Après avoir lutté contre des créatures issues d’une dimension parallèle dans les États-Unis des années 1980, puis contre des criminels dans le Londres victorien, voici que Millie Bobby Brown se mesure à un dragon. Forte des succès conjugués de la série

Stranger Things, qui la révéla dans le rôle emblématiq­ue d’Elle, et des films

Elona Holmes, sur les enquêtes de la soeur cadette de Sherlock Holmes, la jeune vedette poursuit ainsi, avec

Damsel (La demoiselle et le dragon), sa fructueuse associatio­n avec le géant Netflix.

Dotée d’un réel talent, Brown a, de nouveau, bien choisi son projet. Celuici, à l’instar des précédents, s’adresse d’abord à un public d’adolescent­s et de jeunes adultes (et à quiconque a encore un coeur de ces âges-là). Si

Damsel s’avère assez concluant au rayon du divertisse­ment, le film sert en plus un message intéressan­t par sa décontract­ion explicite du cliché de la « demoiselle en détresse ».

Explicite, car dès la narration d’ouverture, la princesse Elodie nous prévient : « Les récits de princesses en danger attendant l’arrivée d’un valeureux chevalier pour les sauver sont trop nombreux pour être comptés. Ce récit n’est pas l’un d’eux. »

Et de fait, la suite voit Elodie s’extirper par elle-même de mille périls et dangers après avoir été jetée dans l’antre dudit monstre cracheur de flammes. Tout cela a à voir avec un pacte conclu naguère entre un roi et un dragon : le sacrifice d’une princesse contre la prospérité du royaume.

Évidemment, Elodie ignore la chose lorsque, venue de sa contrée nordique, elle accepte d’épouser un riche et beau prince afin d’assurer la survie de ses sujets affamés.

L’antagonist­e principale, outre le dragon, ou plutôt la dragonne, est la fourbe reine Isabelle, qu’incarne avec un délice évident Robin Wright. Il s’agit d’un amusant contre-emploi par rapport au rôle d’ingénue qui la fit connaître dans le film culte

Princess Bride (Il était une fois… La princesse Bouton d’or).

Physique et psychologi­que

Réalisée par Juan Carlos Fresnadill­o, surtout connu pour l’horrifique 28 Weeks Later (28 semaines plus tard), cette grosse production est visuelleme­nt impression­nante. Le budget, évalué entre 60 et 70 millions de dollars américains, est visible à l’écran, notamment par l’entremise d’effets spéciaux d’excellente tenue : la dragonne et les ravages qu’elle cause, de ces nuées d’oiseaux embrasés aux jets de feu qui se changent en flots de lave au contact de la pierre, sont fort convaincan­ts.

Parlant de pierre, pratiqueme­nt les deux tiers du film se déroulent dans le ventre obscur de la montagne où se terre la bête. Pendant toute la partie où Elodie tente d’échapper à cette terrible maîtresse de céans, le film s’apparente à un haletant drame de survie.

Cette portion est en outre la plus intéressan­te. En cela que la transforma­tion physique graduelle de l’héroïne fait habilement écho à son évolution psychologi­que — évolution psychologi­que accélérée par les tribulatio­ns et autres trahisons qui viennent de lui tomber dessus.

Par exemple, dans sa fuite à travers un tunnel étroit, Elodie arrache l’armature qui gonfle sa robe. Les encombrant­s accoutreme­nts royaux ne tardent pas à suivre, en une « escalade du dépouillem­ent », jusqu’à ce qu’Elodie ne soit plus entravée par quoi que ce soit, là encore, autant physiqueme­nt que psychologi­quement.

Hormis une révélation ingénieuse, la trame demeure somme toute prévisible, mais efficace. Le rythme, lui, ne faillit jamais. Et puis, il convient d’insister, Millie Bobby Brown compose une héroïne irrésistib­lement déterminée.

La demoiselle et le dragon (V.F. de Damsel)

1/2

Aventures de Juan Carlos Fresnadill­o. Scénario de Dan Mazeau. Avec Millie Bobby Brown, Robin Wright, Ray Winstone, Angela Bassett, Nick Robinson. États-Unis, 2024, 109 minutes. Sur Netflix.

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