La demoiselle pas du tout en détresse
Millie Bobby Brown incarne avec conviction une princesse débrouillarde qui doit s’extirper des griffes d’un dragon dans Damsel
Après avoir lutté contre des créatures issues d’une dimension parallèle dans les États-Unis des années 1980, puis contre des criminels dans le Londres victorien, voici que Millie Bobby Brown se mesure à un dragon. Forte des succès conjugués de la série
Stranger Things, qui la révéla dans le rôle emblématique d’Elle, et des films
Elona Holmes, sur les enquêtes de la soeur cadette de Sherlock Holmes, la jeune vedette poursuit ainsi, avec
Damsel (La demoiselle et le dragon), sa fructueuse association avec le géant Netflix.
Dotée d’un réel talent, Brown a, de nouveau, bien choisi son projet. Celuici, à l’instar des précédents, s’adresse d’abord à un public d’adolescents et de jeunes adultes (et à quiconque a encore un coeur de ces âges-là). Si
Damsel s’avère assez concluant au rayon du divertissement, le film sert en plus un message intéressant par sa décontraction explicite du cliché de la « demoiselle en détresse ».
Explicite, car dès la narration d’ouverture, la princesse Elodie nous prévient : « Les récits de princesses en danger attendant l’arrivée d’un valeureux chevalier pour les sauver sont trop nombreux pour être comptés. Ce récit n’est pas l’un d’eux. »
Et de fait, la suite voit Elodie s’extirper par elle-même de mille périls et dangers après avoir été jetée dans l’antre dudit monstre cracheur de flammes. Tout cela a à voir avec un pacte conclu naguère entre un roi et un dragon : le sacrifice d’une princesse contre la prospérité du royaume.
Évidemment, Elodie ignore la chose lorsque, venue de sa contrée nordique, elle accepte d’épouser un riche et beau prince afin d’assurer la survie de ses sujets affamés.
L’antagoniste principale, outre le dragon, ou plutôt la dragonne, est la fourbe reine Isabelle, qu’incarne avec un délice évident Robin Wright. Il s’agit d’un amusant contre-emploi par rapport au rôle d’ingénue qui la fit connaître dans le film culte
Princess Bride (Il était une fois… La princesse Bouton d’or).
Physique et psychologique
Réalisée par Juan Carlos Fresnadillo, surtout connu pour l’horrifique 28 Weeks Later (28 semaines plus tard), cette grosse production est visuellement impressionnante. Le budget, évalué entre 60 et 70 millions de dollars américains, est visible à l’écran, notamment par l’entremise d’effets spéciaux d’excellente tenue : la dragonne et les ravages qu’elle cause, de ces nuées d’oiseaux embrasés aux jets de feu qui se changent en flots de lave au contact de la pierre, sont fort convaincants.
Parlant de pierre, pratiquement les deux tiers du film se déroulent dans le ventre obscur de la montagne où se terre la bête. Pendant toute la partie où Elodie tente d’échapper à cette terrible maîtresse de céans, le film s’apparente à un haletant drame de survie.
Cette portion est en outre la plus intéressante. En cela que la transformation physique graduelle de l’héroïne fait habilement écho à son évolution psychologique — évolution psychologique accélérée par les tribulations et autres trahisons qui viennent de lui tomber dessus.
Par exemple, dans sa fuite à travers un tunnel étroit, Elodie arrache l’armature qui gonfle sa robe. Les encombrants accoutrements royaux ne tardent pas à suivre, en une « escalade du dépouillement », jusqu’à ce qu’Elodie ne soit plus entravée par quoi que ce soit, là encore, autant physiquement que psychologiquement.
Hormis une révélation ingénieuse, la trame demeure somme toute prévisible, mais efficace. Le rythme, lui, ne faillit jamais. Et puis, il convient d’insister, Millie Bobby Brown compose une héroïne irrésistiblement déterminée.
La demoiselle et le dragon (V.F. de Damsel)
1/2
Aventures de Juan Carlos Fresnadillo. Scénario de Dan Mazeau. Avec Millie Bobby Brown, Robin Wright, Ray Winstone, Angela Bassett, Nick Robinson. États-Unis, 2024, 109 minutes. Sur Netflix.