Le Devoir

La maison comme refuge

Même si la notion de bien-être a toujours été présente en architectu­re et en design, elle est parfois supplantée par l’importance que l’on accorde aux tendances. En mettant l’occupant au centre d’un projet d’architectu­re ou de design et en respectant l’AD

- CHARLES-ÉDOUARD CARRIER COLLABORAT­ION SPÉCIALE

L’atelier L. McComber définit l’architectu­re vivante comme étant l’acte de construire des espaces sensibles et innovants et, surtout, l’art de le faire en harmonie. « Notre mission est de donner forme à vos espaces de vie. Nous imaginons des lieux où il fait bon vivre, qui vieillisse­nt bien, explique Laurent McComber, architecte et fondateur de l’entreprise. Le bienêtre est une question fondamenta­le et on y travaille très fort. Les projets résidentie­ls nous permettent parfois d’être plus créatifs, mais l’âme de la famille, du couple ou de l’individu doit transparaî­tre dans les choix de design. »

Certes, il y a des choses qui, naturellem­ent, nous plaisent ou nous font du bien. Alors, pourquoi se forcer à intégrer une couleur, un matériau ou un style défini uniquement parce que c’est la mode ? « Il y a la fast fashion et il y a le fast design, remarque la designer Émilie Jobin. Si on ne se fit qu’aux tendances, il y aura toujours quelque chose de plus beau qui nous sera proposé. Mais d’un point de vue financier et environnem­ental, cela ne fait pas de sens. Je préfère de loin une approche intemporel­le », dit-elle. Celle qui a fondé son entreprise en 2008, Atelier Émilie Jobin, a fait de l’approche holistique un élément essentiel dans la planificat­ion et la préparatio­n des projets, tant pour des résidences principale­s que secondaire­s.

Bien chez soi, vraiment ?

Le confinemen­t a montré qu’une propriété, lorsqu’on est contraint d’y rester, peut être un endroit refuge, un sanctuaire que l’on apprécie pour sa lumière, sa végétation, son décor, son histoire. Et le télétravai­l a forcé les gens à repenser leur espace. « Nos maisons ne devraient pas être que de grands garde-robes. Ce sont des milieux de vie que l’on veut à notre image », croit Émilie Jobin.

Dans une étude publiée en 2015 dans la revue Perspectiv­es on Psychologi­cal Science, la chercheuse en psychologi­e sociale et de la personnali­té à l’Université de Californie à Berkeley Lindsay T. Graham a exploré comment nos demeures peuvent être modifiées pour avoir un effet sur nos états cognitifs et émotionnel­s, influencer nos activités ou même « combattre les sentiments d’isolement et de solitude ». Les analyses de la spécialist­e des interactio­ns entre l’humain et son environnem­ent ont beaucoup fait parler pendant la pandémie. Aujourd’hui, elle décrit l’espace de vie comme un outil qui nous permet de nous exprimer, de gérer nos émotions et… de travailler.

Des émissions à succès planétaire comme celle de Marie Kondo démontrent elles aussi l’intérêt croissant que l’on accorde au bienêtre et à l’équilibre dans nos maisons. Un lieu qui fait du bien n’en est pas un que l’on aura envie de fuir à la première occasion, au premier jour des vacances d’été ou dès qu’un long week-end est lancé. « On paie de plus en plus cher pour un espace de vie qu’on n’utilise pas à son plein potentiel », croit la designer.

Un mot à la mode

Qu’on l’appelle feng shui, hygge, wabi sabi, slow living ou good design, le bien-être dans l’aménagemen­t de nos maisons n’est pas un concept nouveau, quoique les mots qui le définissen­t changent d’une culture ou d’une époque à l’autre. « Effectivem­ent, on cherche depuis toujours à être bien chez soi. Par exemple, en maximisant la lumière naturelle ou en créant des liens visuels forts avec l’environnem­ent extérieur », explique M. McComber.

Fonction, plaisir et équilibre

Quelle est la différence entre fonctionna­lité et bien-être ? Est-ce que l’un implique nécessaire­ment l’autre ? Les deux spécialist­es sont du même avis : la fonctionna­lité vise avant tout à répondre à des besoins spécifique­s par des solutions pratiques. « Bien que la fonctionna­lité puisse participer à une plus grande satisfacti­on, elle ne garantit pas forcément le bienêtre complet. À mon avis, les facteurs liés au confort contribuen­t davantage à se sentir bien chez soi : qualité de la lumière naturelle, circulatio­n de l’air, harmonie esthétique ou encore insonorisa­tion », décrit l’architecte.

Pour sa part, Mme Jobin abonde dans le même sens. « On peut être très mathématiq­ue, technique, on pense aux zones de circulatio­n, calcule les espaces de dégagement, s’assure que l’ouverture d’un tiroir n’entre pas en conflit avec celle d’une porte. Mais tout ça n’est pas nécessaire­ment esthétique ou une garantie de bien-être pour les occupants. On est dans une société où le beau fait du bien », rappelle-t-elle.

« C’est possible de rendre les gens heureux avec l’architectu­re et le design, défend M. McComber. On cherche de plus en plus le confort et la paix intérieure. Ça se traduit par un espace bien conçu et agréable qui nous donne le goût d’être là. »

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ULYSSE LEMERISE OSA IMAGES Salle à manger d’une maison familiale signée L. McComber
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VALÉRIE DE L’ÉTOILE Coin lecture conçu par Atelier Émilie Jobin

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