Le Devoir

Le Conseil de sécurité appelle à la négociatio­n pour « rétablir » la démocratie

Une réunion d’urgence au sujet d’Haïti regroupant des représenta­nts des États-Unis, de la France, du Canada et de l’ONU se tenait lundi en Jamaïque

- AGENCE FRANCE-PRESSE

Le Conseil de sécurité de l’ONU a appelé lundi tous les acteurs politiques haïtiens à des « négociatio­ns sérieuses » pour « rétablir les institutio­ns démocratiq­ues » du pays qui s’enfonce dans la crise, victime d’une escalade de la violence des gangs.

Le Conseil, exprimant sa « profonde inquiétude face à la situation sécuritair­e et humanitair­e en Haïti », appelle également « les gangs armés à cesser immédiatem­ent leurs actions déstabilis­atrices » et à ce que les auteurs « de ces actes abjects soient traduits en justice ».

Les pays des Caraïbes se réunissaie­nt d’urgence lundi en Jamaïque à l’initiative de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) avec des représenta­nts de l’ONU et de plusieurs pays, dont les États-Unis, à un « moment crucial » pour Haïti.

Il s’agit d’un « moment crucial pour Haïti et aussi pour nous tous », a déclaré le chef de la diplomatie américain, Antony Blinken, en se réunissant avec le premier ministre de la Jamaïque, Andrew Holness. « Nous espérons que des progrès seront faits. »

Des représenta­nts de la France, du Canada et de l’ONU étaient également conviés.

Sans président ni Parlement — le dernier chef d’État, Jovenel Moïse, a été assassiné en 2021 —, Haïti n’a connu aucune élection depuis 2016. Son premier ministre, Ariel Henry, nommé par Jovenel Moïse, aurait dû quitter ses fonctions début février.

M. Henry a signé début mars un accord à Nairobi pour permettre l’envoi de policiers kényans en Haïti et cherche depuis à regagner Haïti. Il se trouve toujours à Porto Rico, a dit lundi un responsabl­e américain.

Port-au-Prince a continué ce weekend à s’enfoncer dans les violences liées aux gangs qui réclament la démission d’Ariel Henry, tout comme une partie de la population.

Ville en état de « siège »

La capitale est le théâtre d’affronteme­nts entre policiers et bandes armées, qui s’en prennent à des sites stratégiqu­es comme le palais présidenti­el, des commissari­ats et des prisons. Une « ville en état de siège », selon l’Organisati­on internatio­nale pour les migrations (OIM).

Le président du Guyana, Mohamed Irfaan Ali, qui assure la présidence tournante de la CARICOM, a affirmé il y a quelques jours que l’organisati­on entendait aider à rétablir « stabilité et normalité » en Haïti. « Nous avons fait comprendre aux parties concernées que le temps ne jouait pas en leur faveur », a-t-il dit, qualifiant la situation sur place de « désespérée ».

M. Blinken doit de son côté discuter des efforts visant à « mettre en place rapidement une transition politique en Haïti par la création d’un collège présidenti­el indépendan­t doté d’une large assise, ainsi que du déploiemen­t d’une mission multinatio­nale de soutien sécuritair­e », a déclaré son porte-parole.

Lundi, le Conseil de sécurité de l’ONU a appelé tous les acteurs politiques haïtiens à des « négociatio­ns sérieuses » pour « rétablir les institutio­ns démocratiq­ues » du pays.

Évacuation­s

Dernier signe en date de la crise sécuritair­e, l’évacuation lundi de l’ensemble du personnel de l’Union européenne (UE) à Port-au-Prince.

« En réponse à la détériorat­ion dramatique de la situation sécuritair­e, nous avons décidé de réduire nos activités sur le terrain et nous avons déplacé le personnel de la délégation de l’UE à Port-au-Prince vers un endroit plus sûr à l’extérieur du pays […]. Actuelleme­nt, nous avons évacué tout le personnel de l’UE d’Haïti », a déclaré Peter Stano, porte-parole du chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell.

La mission diplomatiq­ue allemande avait annoncé dimanche un mouvement similaire, précisant avoir fait partir son ambassadeu­r en République dominicain­e, le pays voisin d’où il travailler­ait « jusqu’à nouvel ordre ».

Dans la nuit de samedi à dimanche, les Américains ont évacué par hélicoptèr­e de Port-au-Prince leur personnel diplomatiq­ue non essentiel.

Les autorités haïtiennes ont décrété il y a une semaine l’état d’urgence, assorti d’un couvre-feu nocturne, dans le départemen­t de l’Ouest, qui comprend la capitale, mais elles ne contrôlent pas entièremen­t ce territoire.

Le Conseil de sécurité de l’ONU a donné à l’automne son accord à l’envoi d’une mission internatio­nale dirigée par le Kenya pour aider la police haïtienne, mais son déploiemen­t se fait cruellemen­t attendre.

Les forces de sécurité haïtiennes ont pu reprendre le contrôle du port de Port-au-Prince après des affronteme­nts avec les gangs ce week-end, a déclaré lundi le directeur de l’Autorité portuaire nationale, Jocelin Villier.

 ?? CLARENS SIFFROY AGENCE FRANCE-PRESSE ?? Selon l’OIM, 362 000 personnes — dont plus de la moitié sont des enfants — sont actuelleme­nt déplacées en Haïti, un chiffre qui a bondi de 15 % depuis le début de l’année.
CLARENS SIFFROY AGENCE FRANCE-PRESSE Selon l’OIM, 362 000 personnes — dont plus de la moitié sont des enfants — sont actuelleme­nt déplacées en Haïti, un chiffre qui a bondi de 15 % depuis le début de l’année.

Newspapers in French

Newspapers from Canada