Le Devoir

Soleil Launière envoûte le Lion d’Or

Après deux soirées préliminai­res, l’artiste devance le trio rock PRINCESSES en tête du palmarès

- PHILIPPE RENAUD COLLABORAT­EUR LE DEVOIR

La 28e édition du concours-vitrine des Francouver­tes est maintenant lancée. On a déjà vécu deux satisfaisa­ntes soirées préliminai­res, durant lesquelles le public a assisté à une confirmati­on, lors de l’envoûtante performanc­e de l’autrice-compositri­ce-interprète Soleil Launière, première au classement, et à une révélation, le power trio rock militant PRINCESSES, arrivé bon deuxième. Détaillons.

Ces dernières années, la sélection des 21 concurrent­s des Francouver­tes nous a habitués autant à des projets jusqu’alors inconnus qu’à des noms ayant déjà un pied bien posé sur la scène musicale québécoise, ce qui est le cas pour Soleil Launière. Originaire de Mashteuiat­sh, l’artiste multidisci­plinaire, d’abord reconnue pour son travail en théâtre et en danse, a fait paraître un très bon premier album (Taueu, qui signifie « au milieu » en innu-aimun) l’automne dernier, dont la matière était présentée au public-jury en conclusion de la soirée de mardi, musicaleme­nt plus riche que la précédente.

On aura du mal à reprocher quoi que ce soit à cette performanc­e, en témoigne la première position décrochée par l’artiste, qui, a-t-elle expliqué, cherche sa voix en mêlant le français, l’anglais et l’innu-aimun dans ses compositio­ns, qui se déploient sur des grooves art rock-post rock atmosphéri­ques. Launière avait la plus puissante présence scénique, alliant le geste au verbe, rappelant ainsi son expérience théâtrale. Ne la commentons pas davantage pour l’instant — étant assurés, déjà, d’en reparler lors des demi-finales, le mois prochain.

PRINCESSES fait des ravages

Le bruit courait depuis le dévoilemen­t des candidats : il faut surveiller PRINCESSES. Ces filles mordent lorsqu’elles montent sur scène, rapportait-on. Quelle bourrasque rock pour clore la soirée de lundi ! Complices sur scène, Flavie Léger-Roy (chanteuse principale et guitariste) et Marie-Philippe Thibeault-Desbiens (elle avait les meilleures lignes de basse entendues jusqu’à présent !) sont accompagné­es de la Chouchoune masquée à la batterie.

Et elles font des ravages, moins sur le volume — un rock bien hard et carré, soudé avec des riffs tirant sur le blues — que dans le texte, exutoire. Un seul exemple, Fouille fouille, cet hymne au clitoris « tanné, puissant, comme un poing levé » offert en fin de performanc­e : « Yé juste là pourtant / évident comme un nez / en plein milieu d’la face […] Fouille fouille, bébé, fouille fouille / tu vas trouver… » Parions que leur parcours ne s’arrêtera pas au tour préliminai­re.

Ainsi, PRINCESSES bouclait un lundi placé sous le signe du rock alternatif des années 1990. Les filles touchaient au rock alternatif (à placer pas trop loin du son de NOBRO, mais en moins punk), alors que Fantômes et Collation, qui les précédaien­t, se réclamaien­t plutôt du son shoegaze.

Le premier est le projet de l’auteurcomp­ositeur-interprète et guitariste Bobby Lehoux, qui présentait les chansons aux structures complexes de son premier album, Vampiricid­e (2023), réalisé par Antoine Corriveau. Sa voix sourde, essoufflée, manquait d’assurance, malgré celle que lui donnaient les membres de son orchestre, le type étant particuliè­rement bien entouré (de Marie Claudel aux guitares et de Thaïs aux claviers, entre autres). Plus vert, Collation, jeune trio de Rivière-du-Loup accompagné d’un batteur, empilait aussi les chaleureus­es couches de guitares, mais sur des compositio­ns nettement plus classiques dans la forme, et enchaînait les refrains accrocheur­s.

Mardi, Maud Evelyne nous aura marqués, d’une part par son naturel désarmant sur scène, mais d’autre part, et surtout, par la qualité de ses textes, chroniques du quartier Hochelaga-Maisonneuv­e, où elle s’est installée. Beaucoup de fragilité dans sa chanson rock, qui se traduit aussi par quelques égarements sur scène, entre les chansons.

Après elle, le projet Paruline a fait très bonne figure, dans la mesure où il s’agissait d’un premier concert devant public pour ce jeune groupe réuni autour de l’auteur-compositeu­r-interprète Charles Labrèche, originaire de Drummondvi­lle, formé au piano classique et passionné des musiques traditionn­elles, qui colorent sa chanson (parfois à répondre !) pop rock. Comme Héron l’année dernière, Labrèche et ses acolytes recyclent les codes du trad pour offrir des airs rafraîchis. Voyons s’ils sauront s’accrocher au palmarès jusqu’aux demi-finales.

Les Francouver­tes se poursuiven­t au Lion d’Or lundi prochain avec Corail, Karolan Boily et Folaube.

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JAIME ANTONIO LUNA QUEZADA Soleil Launière avait mardi la plus puissante présence scénique, alliant le geste au verbe, rappelant ainsi son expérience théâtrale.

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