Le tramway, plus efficace qu’un métro léger dans l’est de Montréal, selon une étude
Des chercheurs ont examiné les temps de déplacement de porte à porte pour les deux modes de transport
Un tramway dans l’est de Montréal, en plus d’être beaucoup moins coûteux qu’un métro automatique léger, serait avantageux pour les usagers en matière de temps de déplacement. C’est le constat auquel sont arrivés des chercheurs qui ont mesuré les temps de déplacement « de porte à porte » pour les résidents de l’est qui monteraient à bord d’un tramway ou d’un train léger. Le Devoir a pris connaissance de cette analyse.
Avec une équipe de collaborateurs, dont l’expert en mobilité durable Luc Gagnon, le chercheur Jean-François Lefebvre, chargé de cours à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, a concentré ses travaux sur les deux scénarios étudiés par l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), celui d’un tramway et celui d’un train léger.
Pourquoi s’attarder à la comparaison entre ces deux modes, alors que l’ARTM privilégie désormais un projet de type tramway plutôt qu’un train léger ? Jean-François Lefebvre soutient que la méfiance demeure tenace à l’égard du tramway et que les avis sont divisés à ce sujet. La Chambre de commerce de l’est de Montréal n’a d’ailleurs pas voulu se prononcer sur la proposition de l’ARTM pour un tramway. Vendredi, elle a précisé qu’elle attendrait que le gouvernement ait fait son choix avant de commenter.
Des simulations
Pour mieux refléter la réalité, les chercheurs n’ont pas voulu se contenter de tenir compte de la rapidité de chaque mode de transport, jusqu’à 47 km/h pour un train léger contre 36 km/h pour un tramway qui compterait davantage de stations. Ils ont plutôt évalué les temps de parcours en prenant compte du déplacement de l’usager entre son domicile et une station.
Au fil des 260 simulations effectuées, les chercheurs ont conclu que le tramway serait plus rapide que le métro léger dans 69 % des déplacements si la notion de trajet porte à porte était prise en compte. Ce taux grimpe à 83 % si l’usage d’un ascenseur est requis pour descendre dans la station de métro.
Et si une option de « tram-express » était envisagée — soit un tramway qui saute plusieurs stations —, elle serait plus rapide que le métro léger dans 77 % des déplacements. Ce taux atteint 96 % si un ascenseur est requis.
Jean-François Lefebvre reproche d’ailleurs à CDPQ Infra d’avoir vendu son projet initial du Réseau express métropolitain (REM) au gouvernement en moussant les temps de parcours entre les stations uniquement. « Ce n’est pas complètement mauvais, mais c’est un élément intéressant quand vous avez d’autres indicateurs », dit-il.
L’analyse fait aussi état du confort des passagers. À titre d’exemple, on signale qu’à plein rendement, 15 % des usagers dans un métro léger auront des places assises, alors que dans un tramway, ce taux est de 45 %.
Pour Daniel Chartier, vice-président du Collectif en environnement Mercier-Est, le temps de déplacement porte-à-porte et le confort sont des questions cruciales pour les résidents des quartiers desservis. Devoir prendre un ascenseur ou des escaliers mécaniques pour descendre dans une station souterraine de train avec une poussette ou un chariot d’épicerie est beaucoup plus compliqué que d’accéder à une station de tramway, souligne-t-il.
Il affirme aussi qu’un tramway permet de développer plus facilement un réseau par phases. « Là, on attend, et au bout de 20 ans, on essaie de faire un projet monstre qui foire, avance-t-il. Avec un tramway, tu commences et après, il est possible de l’étendre à la grandeur de la ville. Tandis qu’un REM, on ne peut pas en faire un dans Rosemont ou dans Ahuntsic. Ça ne passerait jamais. »
À cet égard, il se réjouit de la carte du réseau de mobilité élaborée par la Ville de Montréal dans le cadre du projet de révision du Plan métropolitain d’aménagement et de développement qui montre des prolongements de métro, mais également des tronçons de tramways dans plusieurs secteurs de la métropole. Il espère que les résultats de l’analyse des chercheurs sauront convaincre les élus et les citoyens des avantages du tramway par rapport à un train léger.
Dans leur étude, les chercheurs en profitent pour suggérer d’autres tronçons de tramway au-delà du circuit initial. Ils mentionnent ainsi une « demi-douzaine d’options » pour relier le tram de l’Est au Grand SudOuest, ce qui permettrait un lien avec le centre-ville. Ils suggèrent aussi un court tronçon du tramway vers Laval qui pourrait se connecter à un futur train de banlieue dans Laval-Est. De même, ils évoquent le prolongement du train de l’Est vers L’Épiphanie.
L’ARTM, qui a présenté le mois dernier sa proposition pour un tramway dans l’est, n’a toujours pas transmis son rapport final au gouvernement du Québec, a-t-on indiqué vendredi.
Là, on attend, et au bout de 20 ans, on essaie de faire un projet monstre qui foire. Avec un tramway, tu commences et après, il est possible de l’étendre à la grandeur de la ville. Tandis qu’un REM, on ne peut pas en faire un dans Rosemont ou dans Ahuntsic. Ça ne passerait jamais. DANIEL CHARTIER