Petites rivalités entre amies
Les actrices américaines Allison Janney et Leslie Bibb discutent de leurs personnages dans Palm Royale, une délicieuse série qui va au-delà des apparences
«Palm Royale, c’est exactement ça : une série amusante et profonde à la fois, qui témoigne d’un tremblement de terre qui survient dans la vie de chacun des personnages », explique Leslie Bibb (Les nuits de Talladega. La ballade de Ricky Bobby) à propos de la production créée par Abe Sylvia (L’incroyable histoire de Miss Tammy Faye) dans laquelle elle tient l’un des rôles principaux. Cette catastrophe dont il est question, c’est Maxine Simmons, formidablement incarnée par Kristen Wiig (Demoiselles d’honneur), une nouvelle venue qui veut plus que tout se faire une place, et un nom, dans la haute société pas si dorée que ça de Palm Beach. Si, a priori, Palm Royale donne à voir aux téléspectateurs une histoire « de femmes qui se montent les unes contre les autres », il n’en est, en fin de compte, rien. « Il s’agit plutôt d’un récit qui prend racine dans la communauté », dit l’actrice.
De fait, le vrai comique de la série vient des défis qu’elle aborde, de la vulnérabilité et de la peur qui régissent la vie de ces femmes d’argent et de pouvoir, mais, surtout, d’esprit.
« J’ai tout de suite senti la personnalité de mon personnage, Dinah Donahue, qui est complètement insensé, très matérialiste, qui mord pour un rien, et qui cependant n’en est pas moins drôle et d’agréable compagnie », mentionne Leslie Bibb. Dinah Donahue est en effet une femme au foyer pleine de ressources et de sensibilité. Son mari, récemment nommé ambassadeur au Luxembourg, revient à Palm Beach de temps à autre, bouleversant la liaison de sa femme avec un joueur de tennis professionnel lui aussi inscrit au club Palm Royale. « On lui a toujours dit que la seule chose qui comptait dans la vie, c’était de trouver le bon époux,
mais on sait bien que pour les hommes, c’est facile de mettre la main sur une remplaçante… Elle n’a donc rien pour la retenir », souligne-t-elle. Puis, l’arrivée de Maxine vient sérieusement secouer et mettre en perspective la vie menée par Dinah.
Pour sa part, Allison Janney (I, Tonya) est la redoutable Evelyn Rollins, celle que tous les membres du Palm Royale craignent — sauf, évidemment, la nouvelle venue. « Je pense que sa méchanceté apparente vient d’une vraie fragilité, de la peur de perdre tout ce qu’elle possède, sa place dans la société et que ses secrets les plus sombres soient divulgués », indique-t-elle. Dinah, Evelyn et leurs consoeurs du Palm Royale se retrouvent piégées dans leurs propres travers. « Elles vivent dans leur bulle, celle de la haute société américaine, et leur seul souci est la place qu’elles occupent. Elles ne sont préoccupées que par ce qu’elles portent, par l’image qu’elles projettent, par ce que les journaux racontent sur elles », fait remarquer l’actrice oscarisée en 2018.
Attention toutefois à ne pas se laisser duper par leurs parades, leurs besoins et même leur désespoir, car les protagonistes de Palm Royale se révèlent d’une complexité qui fait du bien à regarder sur petit écran. « En réalité, ce qui les fait trembler est un enjeu bien plus grand que l’artifice », affirme Allison Janney. De son côté, Leslie Bibb met en garde contre la « pente glissante » des clichés sur les femmes rivales. « J’essaie de me dire qu’il y en a assez pour tout le monde et, qu’en tant que femmes, on est plus fortes ensemble. Mais il y a encore des gens qui veulent que les femmes restent concurrentes, juste pour voir ce qui va se passer. » Au contraire, la série se veut plus émancipatrice que ce qu’elle laisse paraître de prime abord et trouve son souffle dans le contexte dans lequel elle est implantée, celui d’une année 1969 remplie de changements.
La belle époque
« Attachez vos ceintures et tenezvous bien ! » s’amuse Leslie Bibb. Le décor de Palm Royale est ainsi planté au moment où les Américains vont sur la Lune, font la guerre au Vietnam et que les droits des femmes sont en pleine mutation. « Il y a tellement de choses qui se passent et Dinah et les autres ont peur du changement, elles ne veulent elles-mêmes pas changer. » Mais on ne peut pas empêcher le monde de tourner… « Avoir l’occasion de faire partie d’une série qui réunit une distribution incroyable, qui compte également Carol Burnett, Laura Dern et Ricky Martin, et qui se déroule dans une époque passionnante, est une expérience formidable », renchérit Allison Janney. Ensemble, tout ce beau monde navigue au sein d’une hiérarchie sociale qui ne veut accueillir ni ce nouveau monde ni Maxine, et qui doit pourtant apprendre un nouveau langage et une manière de s’appréhender les uns les autres.
« Tout ce que les habitués du Palm Royale ont, Maxine est sur le point de le leur enlever », poursuit Leslie Bibb. « On observe notamment dans la série le ciment de Palm Beach s’effriter. C’est terrifiant, mais aussi électrisant pour ces femmes », relève-telle. Selon elle, la série réussit à montrer tant les progrès de la fin des années 1960 que la menace des régressions. « L’univers de Palm Royale semble bien différent du nôtre, mais l’est-il vraiment ? » soulève l’actrice. La série n’en est que plus intéressante. « Les gens de la série, comme nos contemporains, s’accrochent à leur vie avec acharnement, tandis que le monde ne cesse d’évoluer, qu’on le veuille ou non », conclut-elle. Maxine n’a donc pas fini de provoquer des tremblements de terre.
Palm Royale
Apple TV+, dès le 20 mars
Je pense que sa méchanceté apparente [celle de son personnage Evelyn Rollins] vient d’une vraie fragilité, de la peur de perdre tout ce qu’elle possède, sa place dans la société, et que ses secrets les plus sombres soient divulgués
ALLISON JANNEY
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J’ai tout de suite senti la personnalité de mon personnage, Dinah Donahue, qui est complètement insensé, très matérialiste, qui mord pour un rien, et qui cependant n’en » est pas moins drôle et d’agréable compagnie
LESLIE BIBB
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