Un premier dictionnaire politique de la scène municipale québécoise
Publié aux Presses de l’Université Laval en début d’année, le Dictionnaire politique de la scène municipale québécoise représente une première, de surcroît en français.
« À ma connaissance, écrit l’un des préfaciers, Andrew Sancton, de l’Université Western Ontario, ce dictionnaire décrivant la “scène municipale” est le tout premier à être publié en Amérique du Nord. »
Le manuel a été codirigé par Sandra Breux, professeure-chercheuse à l’Institut national de recherche scientifique (INRS), et Anne Mévellec, professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Il réunit les plumes d’une soixantaine de spécialistes. « L’objectif était de mieux faire connaître cette scène municipale qui est très variée et non pas un tout uniforme. Et cela peut modifier grandement la réalité de chacune des municipalités, que ce soit en matière de participation électorale ou, par exemple, la façon dont s’exerce la fonction d’élu », explique Mme Breux.
Souvent considérées comme de simples administrations strictement vouées à s’occuper de la voirie et du déneigement, elles sont, au contraire, selon les codirectrices, « le lieu où s’incarnent les défis et les questions politiques de la gouvernance contemporaine ».
Les municipalités interviennent dans beaucoup d’autres domaines liés aux services à la personne, selon Mme Mévellec. « On peut penser à l’immigration, aux politiques culturelles et familiales ou au loisir », énumère-t-elle.
Il était donc essentiel pour elles de produire un ouvrage qui permettrait de montrer cette diversité d’implications. « Les municipalités sont un palier de gouvernement politique, au sens strict du terme, où se font des choix de valeurs et politiques sur le devenir de la communauté. Elles n’ont pas que des responsabilités techniques, comme faire de l’asphalte », précise la professeure de l’Université d’Ottawa.
L’adoption en 2017 du projet de loi 122 au Québec et la multitude de défis avec lesquels jonglent les municipalités mettent encore plus en relief l’importance de leur rôle dans le quotidien des gens, selon les codirectrices.
Compétences diverses
« Même si les municipalités ne disposent pas à proprement parler de “compétences générales”, leur action couvre des champs aussi divers que le développement économique, les loisirs et la lutte à l’itinérance. […] Elles se trouvent souvent en première ligne lors des situations de crise », peut-on lire dans le mot des codirectrices. Elles citent en exemple le déluge du Saguenay (1996), l’attentat de la mosquée de Québec et les inondations de 2017.
Selon elles, le système politique multiniveau qui prévaut au pays entretiendrait une certaine confusion chez les électeurs quant aux compétences dévolues à chaque ordre de gouvernement. « Si le phénomène n’est pas unique au Canada, la dépendance institutionnelle de l’échelon municipal envers le provincial tend à accentuer cette confusion, largement alimentée par l’idée que le gouvernement municipal ne s’occuperait que des déchets et des services d’aqueduc, autrement dit, des services à la propriété », écriventelles. « C’était l’un des objectifs, d’essayer de déchiffrer tout cela pour rendre cette scène plus accessible à tout le monde », souligne la professeure de l’INRS.
Le dictionnaire offre un éventail de définitions étoffées et contextualisées sur plus de 70 sujets reliés au monde municipal. Vote, participation électorale, dossiers politiques, élus, institutions, etc. « Nous voulions traiter d’un ensemble de thèmes que nous considérions comme essentiels à la rédaction d’un dictionnaire politique de la scène municipale québécoise, mais aussi les réalités sociopolitiques. Des notions telles que la ruralité, la cybersécurité, la formation des élus, l’apolitisme et tout ce qui est en lien avec les compétences », explique Mme Breux.
Après avoir établi les grandes thématiques, elles ont approché des experts, des professeurs, des chercheurs et des étudiants provenant de domaines multiples : aménagement du territoire, histoire, économie, droit, sociologie et science politique. « Il fallait que les individus reflètent bien la vivacité et la diversité des études sur le municipal », ajoute-t-elle.
Les codirectrices soulignent que ce dictionnaire est un projet dynamique, en évolution, qui est appelé à être bonifié d’une édition à l’autre et qui devrait bientôt être disponible en ligne pour être accessible à tous. « Il y a des thèmes qui, faute de n’avoir pu trouver d’experts, n’ont pas encore été développés. Cela viendra », précise Mme Mévellec.