Le Devoir

« Préparer la suite pour les futurs combats à mener »

- GUILLAUME WHALEN

Maintenant que les récentes négociatio­ns dans le secteur public ont pris fin pour la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), le syndicat désire poursuivre cette impulsion de lutte pour une meilleure santé des réseaux publics de la province, et ce, dans un souci de ne pas laisser tomber la forte solidarité sociale dont a fait preuve la population pendant le dernier vaste mouvement contestata­ire au Québec. « Oui, nous avons réglé le dossier du renouvelle­ment des convention­s collective­s, mais il ne faut pas attendre quatre ans, lorsqu’elles seront échues, avant d’intervenir dans de nouvelles négociatio­ns. Autrement, ce serait manquer de respect à toute la population qui nous a appuyés au cours des derniers mois », estime Éric Gingras, président de la CSQ, l’une des plus grandes centrales syndicales au Québec, avec ses 225 000 membres, dont environ 130 000 font partie du personnel de l’éducation.

Ainsi, à la lumière de cette vague d’appui et de solidarité de la part de la population, la CSQ désire prendre la balle au bond et assumer pleinement cette responsabi­lité sociale. Pour les prochains mois, le syndicat se penche sur les grands dossiers accablant le réseau public de l’éducation, tels que la mixité sociale et l’égalité des chances, ce qui représente « le nerf de la guerre », selon M. Gingras. Ce dernier croit que si le ministère de l’Éducation travaillai­t davantage sur ces problémati­ques, celui-ci pourrait se doter d’une vision structuran­te et d’un plan à long terme pour améliorer le réseau, plutôt que des « mesures expéditive­s comme les maternelle­s 4 ans ».

« Avec cette réflexion, on se demande comment s’assurer que la mixité sociale dans une classe permet aux jeunes d’avancer tout en ayant des services et des aspiration­s de la petite enfance jusqu’à l’enseigneme­nt supérieur », fait valoir le président du syndicat.

À cet égard, le Bulletin de l’égalité des chances en éducation, publié l’année dernière par l’Observatoi­re québécois des inégalités, met en lumière que le contexte actuel du système d’éducation à deux ou trois vitesses — le public, le programme internatio­nal et le privé — ferme la porte à un « système inclusif, équitable et égalitaire ». Ce rapport indique aussi que la dynamique néolibéral­e implantée au Québec renforce notamment la concurrenc­e et l’économie du savoir dans les écoles au détriment de l’égalité et de l’équité, ce qu’Éric Gingras déplore également de son côté.

Celui-ci ajoute que, dans une mission soutenue d’épauler le personnel et d’améliorer ses conditions de travail, la centrale syndicale milite également pour s’assurer d’attirer et de retenir le monde dans les réseaux publics. À un moment critique où le personnel qualifié dans le secteur de l’éducation déserte le milieu, la CSQ mentionne qu’il y a urgence d’agir.

Rappelons que la Fédération québécoise des directions d’établissem­ent d’enseigneme­nt, dont les membres travaillen­t dans 46 des 61 centres de services scolaires de la province, avait signalé lors de la dernière rentrée scolaire qu’il y avait un manque à gagner de 2000 enseignant­s pour pourvoir des postes à temps plein et de 3000 pour des tâches à temps partiel dans les 1600 écoles où travaillen­t ses membres.

Tout un travail à la table des négociatio­ns

Éric Gingras admet que la CSQ n’aurait rien changé dans sa stratégie de négociatio­ns avec le gouverneme­nt en décembre dernier malgré les résultats des votes de certaines ententes adoptées de justesse qui témoignent d’un sentiment mitigé chez les membres. Il avoue que le fait qu’il n’y ait pas eu d’améliorati­on significat­ive de la compositio­n de la classe, notamment, a créé beaucoup de mécontente­ment.

Pour les prochains mois, la CSQ se penche sur les grands dossiers accablant le réseau public de l’éducation, tels que la mixité sociale et l’égalité des chances, ce qui représente

« le nerf de la guerre », selon son président, Éric Gingras

« Les gens auraient aimé avoir mieux et plus. Les attentes sont élevées, mais je pense que ce qu’on a mis sur la table reste intéressan­t, puis, en même temps, ça nous permet de préparer la suite pour les futurs combats à mener. Il est certain, et c’est impératif, que nous serons présents avant que les convention­s collective­s deviennent échues », affirme le président de la CSQ en guise de bilan de son automne chargé.

« Le fruit est mûr pour une grande conversati­on collective avec diverses organisati­ons engagées, même que des alliances seraient possibles, pour atteindre ces objectifs. Il est temps de s’attaquer aux problèmes systémique­s », croit M. Gingras, soulignant que la centrale syndicale agit à titre d’acteur social de changement et qu’il est primordial d’honorer cette mission.

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ADIL BOUKIND LE DEVOIR Éric Gingras, président de la Centrale des syndicats du Québec, devant le collège Ahuntsic en novembre 2023

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