Le Devoir

Le déficit dérape et les opposition­s accusent la gestion de Macron

- FRANCE GABRIEL BOUROVITCH À PARIS AGENCE FRANCE-PRESSE

Le président Emmanuel Macron était sous le feu des critiques mercredi, l’opposition, tous partis confondus, l’accusant d’« incompéten­ce » et de « piètre » gestion au vu du dérapage du déficit public.

L’Institut national de la statistiqu­e (INSEE) rendra son verdict le 26 mars, mais les chiffres ne seront pas bons et le gouverneme­nt le sait.

Le déficit public 2023 sera « significat­ivement » supérieur aux 4,9 % du PIB prévus, a averti le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire. L’objectif d’un déficit ramené à 4,4 % cette année apparaît hors de portée.

Preuve de la sensibilit­é du sujet, cette dérive des comptes s’est invitée dans l’agenda du chef de l’État.

Il devait recevoir à 17 h 30 locales Bruno Le Maire ainsi que les ministres chargés des collectivi­tés locales et des affaires sociales, Christophe Béchu et Catherine Vautrin.

L’occasion de réexaminer des pistes déjà avancées par l’exécutif, notamment pour freiner les dépenses d’assurance chômage et de santé.

Un mois après avoir annoncé 10 milliards d’euros de coupes dans le budget 2024 qui venait tout juste d’être voté, Bruno Le Maire a de nouveau mis les pieds dans le plat dimanche.

Il a proposé de « remplacer l’État providence par l’État protecteur », car « la gratuité de tout, pour tous, tout le temps » est, selon lui, « intenable ».

Une initiative qui a agacé le chef de l’État : « Il devrait en parler à celui qui est ministre de l’Économie depuis sept ans », a raillé Emmanuel Macron, selon l’hebdomadai­re Le Canard enchaîné. Propos confirmés à l’Agence FrancePres­se par un familier de la présidence, où l’on se dit malgré tout « toujours preneurs des bonnes idées ».

Le président a aussi convié mercredi à dîner les chefs des partis et des groupes parlementa­ires qui composent sa majorité, pour tenter d’accorder les violons alors que des dissonance­s se font entendre.

« Cadeaux fiscaux » depuis 2017

Quelques députés plaident, en effet, pour augmenter les impôts des « ultrariche­s » ou des grandes entreprise­s, dont Jean-Paul Mattei, le chef du groupe MoDem (parti centriste, allié du camp Macron).

Mais pas question de toucher au levier fiscal, a rappelé mercredi le premier ministre, Gabriel Attal.

« Nous préférons augmenter la pression sur les fraudeurs plutôt que d’augmenter les impôts sur les Français », a déclaré le chef du gouverneme­nt en présentant les « résultats historique­s » du fisc, qui a recouvré plus de 15 milliards d’euros de fraude fiscale l’an dernier.

Mais pour les opposition­s, le compte n’y est pas.

« Jamais on n’a eu des chiffres aussi épouvantab­les », a affirmé sur la radio France Inter la présidente des députés du Rassemblem­ent national (extrême droite), Marine Le Pen, fustigeant les « résultats pitoyables » et « l’incompéten­ce de ce gouverneme­nt dans le domaine financier ».

Mêmes accusation­s à gauche du député de La France insoumise Adrien Quatennens : « Ces gens-là sont de piètres économiste­s », a-t-il fustigé à la télévision CNews et à la radio Europe 1.

« Plutôt que de dire que la France est accro à la dépense publique », le député insoumis a pointé « les riches accros aux cadeaux fiscaux qui ont été faits de manière massive » depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, a-t-il ajouté.

Le tour de vis envisagé sur les dépenses sociales ne satisfait même pas la droite. « C’est trop tard, parce qu’on va s’y prendre de la plus mauvaise façon, en faisant des coupes un peu aveugles », a déploré le président du groupe Les Républicai­ns (LR, droite) au Sénat, Bruno Retailleau, à la chaîne Public Sénat.

Dans le quotidien Les Échos, le président du parti LR, Éric Ciotti, a estimé que le pays « emprunte le même chemin que la Grèce ».

L’exécutif, qui envisageai­t de présenter un budget rectificat­if « à l’été », c’est-à-dire après les élections européenne­s du 9 juin, devra-t-il revoir son calendrier ?

À tout le moins, il faudra donner des gages avant le couperet des agences de notation : Fitch et Moody’s le 26 avril, et surtout S&P le 31 mai, une semaine avant le scrutin.

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