Le Devoir

La zone remblayée derrière l’écocentre de Mirabel va être fouillée

La Commission de protection du territoire agricole du Québec veut connaître les matériaux qui ont servi de remblai

- ULYSSE BERGERON DIVISION ENQUÊTE

La Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) sort l’artillerie lourde pour connaître ce qui a été enfoui sans autorisati­on sur une terre agricole située à l’arrière d’un écocentre de Mirabel. Le gardien des terres cultivable­s du Québec force Service de recyclage Sterling (SRS), propriétai­re du site, à creuser de profondes tranchées pour vérifier ce qui s’y trouve.

À la suite d’une rencontre avec des représenta­nts de l’entreprise en février dernier, la CPTAQ a transmis un procès-verbal à SRS dans lequel elle demande de creuser, d’ici le 26 avril 2024, « 10 tranchées exploratoi­res » sur une zone remblayée de 14,72 hectares, soit l’équivalent de près de 30 terrains de football américain. Ces tranchées devront atteindre au moins quatre mètres de profondeur et s’étirer sur une longueur d’au moins cinq mètres. L’objectif : connaître les matériaux qui ont servi de remblai.

Rappelons qu’au Québec, le remblai en terre agricole doit se faire avec du sol cultivable de bonne qualité. Le feu vert de la CPTAQ est également nécessaire. Dans le cas présent, la commission n’a octroyé aucune autorisati­on.

Les tranchées devront obligatoir­ement être creusées « en présence d’un profession­nel de la commission », et SRS devra payer pour les travaux, a précisé la CPTAQ au Devoir par courriel.

L’entreprise appartenan­t à l’homme d’affaires Joé Miller n’a pas répondu à nos demandes d’entrevue.

En juin 2023, Le Devoir révélait que SRS remblayait une terre agricole située à l’arrière de son centre de tri du secteur Saint-Canut de Mirabel avec des débris de démolition, des résidus de constructi­on et des morceaux de plastique et de verre. Des images prises au moyen d’un drone avaient confirmé les travaux de remblai effectués ; on y voyait notamment un bulldozer déverser des résidus dans un bosquet situé à proximité d’un ruisseau.

Le lendemain, la CPTAQ ouvrait une enquête, déclarant être « grandement préoccupée par les informatio­ns et les images qui ont été diffusées ». Un mois plus tard, la Commission envoyait une ordonnance à l’entreprise pour stopper les travaux. Elle lui reprochait alors d’avoir effectué sans autorisati­on « des travaux de remblai, de l’enfouissem­ent de matières résiduelle­s et de débris divers ainsi que l’entreposag­e de débris et de béton » derrière l’écocentre. Elle avançait aussi avoir constaté que la partie d’une érablière coupée sans autorisati­on, à l’arrière du site, avait « été remblayée avec des matières résiduelle­s ».

Aussi dans la mire de Québec

Le ministère de l’Environnem­ent du Québec a également ouvert une enquête pour faire la lumière sur les activités de l’entreprise. Les inspection­s effectuées jusqu’à ce jour ont révélé l’enfouissem­ent illégal de résidus en zone agricole, mais aussi le rejet de contaminan­ts dans l’environnem­ent. « Le ministère n’émettra aucun commentair­e additionne­l afin de ne pas nuire au processus en cours », s’est contenté d’écrire le ministère par courriel.

En marge d’inspection­s sur le site de Mirabel, le ministère de l’Environnem­ent a aussi visité un autre site appartenan­t à SRS, cette fois dans le secteur Saint-François de Laval. « Il a notamment été constaté que l’entreprise exploite une chaîne de tri de matières résiduelle­s sans autorisati­on », a confirmé le ministère. Une sanction de 5000 $ à cet effet a été imposée à l’entreprise le 24 janvier dernier.

Newspapers in French

Newspapers from Canada