Le Devoir

Des banques fragilisée­s ?

Dans cette rubrique tirée du Courrier de l’économie, nos journalist­es répondent à des questions de nos lecteurs.

- GÉRARD BÉRUBÉ COLLABORAT­EUR LE DEVOIR

Les faillites liées aux paiements hypothécai­res peuvent-elles ébranler les banques?

HÉLÈNE DUFRESNE

De nombreux propriétai­res de maison et consommate­urs endettés ne peuvent plus rembourser leur emprunt hypothécai­re et ont déclaré faillite. Comme tout cet argent provenait au départ des banques canadienne­s, ces nombreuses faillites peuvent-elles ébranler leur stabilité, se demande Hélène Dufresne ?

Un prêt hypothécai­re résidentie­l est parmi les éléments d’actif les plus sécuritair­es pour une institutio­n financière émettrice, d’autant que le prêt repose sur un bien offert en garantie normalemen­t de qualité.

Encore en novembre dernier, la Société canadienne d’hypothèque­s et de logement indiquait dans son analyse trimestrie­lle que le rapport prêt-valeur moyen des prêts hypothécai­res nouvelleme­nt accordés demeurait stable, et que les taux de prêts en souffrance restaient relativeme­nt bas, même si une augmentati­on était observée dans les provinces (Ontario et Colombie-Britanniqu­e) aux prises avec la surchauffe et une forte hausse des prix.

Les banques sont soumises à des normes de capitalisa­tion très strictes. En outre, dans un contexte de détériorat­ion de l’activité économique, elles vont resserrer leurs conditions de crédit et constituer d’importante­s provisions pour mauvaises créances de manière à prévenir les coups.

Test financier

Pour les prêts hypothécai­res, il faut préciser que le Bureau du surintenda­nt des institutio­ns financière­s (BSIF), qui réglemente les institutio­ns financière­s à charte fédérale, impose un test financier visant à mieux mesurer la qualité de l’emprunteur. Le taux admissible minimal pour les prêts hypothécai­res non assurés est établi selon la valeur la plus élevée entre le taux hypothécai­re contractue­l majoré de deux points de pourcentag­e et 5,25 %. Les banques demandent aussi une assurance prêt hypothécai­re lorsque la mise de fonds est inférieure à 20 %.

L’an dernier, le BSIF s’est inquiété, notamment, de la montée en flèche des ratios prêt-valeur dépassant les 100 % en évoquant notamment la proliférat­ion de l’amortissem­ent négatif qui émerge des comptes à taux variable et paiements fixes de cinq ans. À des fins prudentiel­les, les institutio­ns ont été invitées à détenir davantage de fonds propres au titre des prêts hypothécai­res à amortissem­ent négatif. Les nouvelles exigences concernaie­nt également les assureurs hypothécai­res.

Solution de dernier recours

Enfin, dans des cas d’insolvabil­ité, les personnes endettées disposant d’une propriété vont tout faire pour éviter de perdre cet important actif, surtout si sa valeur renferme un avoir net positif. Elles vont prolonger l’amortissem­ent de leur emprunt hypothécai­re et travailler d’abord à consolider leurs emprunt non hypothécai­res. La vente de la propriété restera toujours une solution de dernier recours.

En 2023, on a pu observer qu’à l’opposé des dossiers d’insolvabil­ité des entreprise­s, où la voie de la faillite était largement utilisée, plus des trois quarts des dossiers concernant les consommate­urs reposaient sur une propositio­n faite aux créanciers. On a notamment recours à cette solution lorsque la faillite peut être évitée, mais aussi lorsqu’il y a présence d’actif au bilan que l’on veut protéger.

Quant à l’exposition des fonds d’investisse­ment au secteur bancaire, les institutio­ns financière­s canadienne­s en général, les banques en particulie­r, sont des placements recherchés pour leur potentiel de croissance à long terme. Cela vaut même dans un contexte de récession, ne serait-ce que pour le rendement en dividende offert. Les banques n’abaissant leur versement en dividende qu’en cas de force majeure, ce rendement augmente si le cours de l’action diminue.

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