Une troisième voie inexistante
Qu’est-ce que la troisième voie ? La réponse classique : tenter d’obtenir, au sein du cadre constitutionnel existant depuis 1982, une forme quelconque de reconnaissance — non seulement théorique, mais aussi pratique — d’une réalité sociologique, à savoir que le Québec est distinct du Canada anglais, que le peuple québécois francophone n’est pas le peuple canadien. Bref, devenir plus autonome sans remettre en question le lien fédéral. Qu’est-ce véritablement que la troisième voie ? Une vaine tentative. Le peuple québécois francophone a été trompé en 1982 par Pierre Elliott Trudeau, il a été soumis juridiquement à un ordre constitutionnel figé, ce que juin 1990 n’a fait que confirmer, et à un Canada qui s’est depuis fermement convaincu de sa supériorité morale. L’échec de 1995 l’y a ensuite soumis politiquement. Les élites politiques et intellectuelles qui tentent depuis de lui faire croire qu’il peut se soustraire aux conséquences de la tromperie initiale s’engagent elles-mêmes dans une vaste tromperie, d’autant plus coupable qu’elles savent la tâche irréalisable, car l’ordre fédéral établi en 1982 — égalité dogmatique des provinces, mise à l’écart quasi complète des droits collectifs au profit des droits individuels omnipotents, etc. —, est immuable. La troisième voie n’a jamais existé. En tant qu’elle constitue une acceptation inavouée, mais consciente, du fédéralisme qui nous a été imposé en 1982 et depuis, elle est une soumission et, celle-ci ne disant pas son nom, elle devient une tromperie. Et cela, au même titre que toutes les illusions de renouvellement du fédéralisme, de fédéralisme multinational, etc. colportées par nombre de têtes pensantes dans les universités, les médias, certains partis politiques et ailleurs. Yvan Giroux
Gatineau, le 21 mars 2024