Carnet voyage
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En safari chez le singe costumé
Voilà, c’est dit, mon singe préféré est le douc à pattes rouges, car c’est le mieux habillé. Sa robe varie du gris au noir, sa face est orangée, ses paupières sont bleutées, sa queue blanche, et il a l’air de porter des jambières auburn. Ce chic primate est néanmoins en danger critique d’extinction, selon l’Union internationale pour la conservation de la nature. Dans le monde, soit au Vietnam, au Cambodge et au Laos, sa population est estimée à tout au plus 2000 individus. Chez l’Oncle Hô, environ 300 d’entre eux auraient élu domicile dans la forêt de la péninsule de Son Tra, près de Danang, et c’est pour eux que je m’y suis posée quelques jours.
Réputé pour sa riche biodiversité, le territoire a d’ailleurs le statut de réserve naturelle depuis 1977. Un spectaculaire hôtel primé, l’InterContinental Danang Sun Peninsula Resort, y fut toutefois inauguré en 2012 : il en occupe 39 hectares, au-dessus d’une petite baie. Je vous entends soupirer d’ici… Dans un monde parfait, une zone protégée demeurerait telle, seulement voilà, l’idéal est différent en pays émergent. Au moins, son propriétaire, Sun Group, l’un des plus importants promoteurs immobiliers vietnamiens, avait les moyens de bien faire les choses. Il a confié la conception de sa propriété à l’Américain Bill Bensley, une tête d’affiche de l’architecture hôtelière durable (et ludique, sa devise étant « plus c’est étrange, mieux c’est ! »). Il lui a de plus attitré un zoologue, Anthony Barker.
Le rôle de M. Barker ? Veiller au bien-être de la faune. Par exemple, il a fait installer des passerelles aériennes ici et là. Et ce, afin que ces singes arboricoles, qui ne touchent jamais terre et vivent en clans d’une quinzaine d’individus, ne se retrouvent jamais isolés du fait des constructions hôtelières. « Le but était d’éviter à tout prix leur reproduction en consanguinité », explique celui qui est également responsable des questions environnementales de l’établissement. De plus, un aspect positif de la présence de l’édifice chez les primates est son effet dissuasif sur les braconniers dans cette partie de la péninsule. « L’animal est convoité pour son cerveau, recherché en vertu de vieilles doctrines de la médecine traditionnelle », précise l’expert.
En compagnie d’un guide, j’ai sillonné le site de bon matin et tadam, à croire qu’on avait lâché les sublimes créatures dans la nature juste avant mon arrivée ! Elles batifolaient dans les badamiers, se régalant de leurs jeunes pousses, vaquaient à leurs singeries, puis timides, s’éclipsaient en douce. Je suis retournée les voir au couchant, puis à l’aube encore… ô joie, comme en safari ! En cette époque où l’hôtel est souvent la destination de nos vacances, en voici une tout simplement incomparable.
On s’habille et on prend la pose ?
En 2018, au sommet de montagnes non loin de Danang, le promoteur vietnamien Sun Group inaugurait à même son parc thématique Sun World Ba Na Hills, un attrait qui allait devenir emblématique de toute la région : le Golden Bridge. Effectivement, cette passerelle piétonne longue de 150 m, soutenue par deux mains géantes et donnant à voir un superbe panorama (en l’absence de brouillard), est impressionnante. Mais son vrai bon coup est dans une autre section du parc : le patelin français pseudopittoresque. Outre un musée de cire et quelques manèges (droits d’entrée en sus de ceux du parc), on y trouve une place fleurie, de jolies façades de commerces villageois. On y aperçoit aussi des reconstitutions du Moulin Rouge et de Notre-Dame de Paris, en clair, rien de plus que des décors devant lesquels on pose et s’égoportraitise — et ça fait marcher à fond la caisse enregistreuse ! Vraiment, remplir un vide abyssal de visiteurs pleins d’eux-mêmes, il fallait y penser.