Le Devoir

Une bague de diamants à garder pour toujours

- Robert Campeau Le 9 avril 2024

Je l’écris pour ne pas l’oublier. Et parce qu’aucune photo, j’en suis sûr, ne pourra jamais rendre la beauté de ce que j’ai vu dans le ciel cet après-midi du 8 avril 2024. J’avais un peu redouté l’événement, je l’avoue (la surenchère médiatique a souvent raison de mon émerveille­ment), mais pour une fois, la réalité a dépassé la fiction. Merci à l’organisati­on du parc Jean-Drapeau d’avoir coupé le son durant ces 87 secondes de pur enchanteme­nt et de rendezvous avec l’absolu. Car oui, il y avait de l’absolu dans cet alignement parfait des astres et ce majestueux « ballet cosmique » évoqué par l’astronaute David Saint-Jacques. Une « lune de diamants » pour toutes et tous, fulgurante comme une apparition, sans discrimina­tion à l’endroit de qui que ce soit. Une lune en adéquation parfaite avec un système solaire infiniment plus grand que nous, comme une soudaine brise d’humilité sur un monde qui n’en finit plus, par moments, de nous désespérer. Une apothéose tangible qui faisait du bien, ponctuée de « oh » et de « ah… » émouvants, qui mettait tous les conflits en sourdine, toutes les guerres en jachère et qui faisait paraître bien vile la moindre tentative de cynisme. Un moment magnifié par son extrême rareté, qui nous a permis enfin de « rêver grand ».

Comme il était bon d’entendre Boucar Diouf, ce matin sur les ondes de Radio-Canada, évoquer le fait que cette « expérience mystique » (définie ainsi par l’astrophysi­cien Hubert Reeves) redonnait ses lettres de noblesse à la science et allait possibleme­nt « faire naître des carrières de scientifiq­ues, des gens qui vont nous emmener beaucoup plus loin ». Comme il était bon aussi de constater que, malgré tout le bruit et l’enflure ayant précédé l’événement, ce n’était pas une lubie ou une image tronquée par des lunettes roses. Il n’y avait personne portant des lunettes roses, en ce lundi après-midi ensoleillé. Mais des gens par milliers qui, après un long crescendo, ont enlevé leurs lunettes protectric­es dans un éclat spontané et généralisé, conscients de voir là une lune de diamants qui les marquera pour la vie.

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