Le sens de l’humour
Dans Rires, les codirecteurs du Nouveau Théâtre expérimental exposent leurs références en matière de comédie
Dis-moi ce qui te fait rire et je te dirai qui tu es. Voilà qui aurait pu servir de sous-titre au spectacle présenté ces jours-ci par le Nouveau Théâtre expérimental sur la scène de l’Espace libre. Avec Rires, Daniel Brière et Alexis Martin ont décidé de nous faire découvrir « l’esprit et le climat humoristique dans lequel ils ont grandi et appris à rire d’eux et du monde ».
Pour ce spectacle de deux heures, qui tient à la fois du cabaret et du cours magistral, le tandem a fait appel à sept interprètes qui ont tous fait leurs débuts pendant la pandémie. Zoé Boudou et Fabrice Girard sont diplômés de l’École nationale de théâtre. Anne-Sarah Charbonneau et Simon Duchesne, de l’École nationale de l’humour. Laurence Laprise et Caroline Somers, de l’École de théâtre professionnel du collège Lionel-Groulx. Quant à Mehdi Agnaou, il est, comme il le dit sur scène, diplômé de l’École de la vie.
Pour cette cohorte bourrée de talent, Brière et Martin ont sélectionné une panoplie de scènes comiques du répertoire d’ici et d’ailleurs, ancien et récent, qui nous sont présentées dans un ordre à peu près chronologique. Avec quelques accessoires et une malle de costumes, on se mesure à Molière, à Ionesco, à Tardieu. Suit l’univers de Claude Meunier, des Voisins à Paul et Paul (le fameux boxeur de Serge Thériault) en passant par La Famille Denuy (« Oh chérie, trempe ton ennui dans l’eau de mon plaisir. »). On rend hommage à Clémence DesRochers, aux Cyniques, à Raymond Devos et même à Sol et Gobelet. En ce qui concerne les influences anglo-saxonnes, on cite Monty Python et Saturday Night Live (SNL).
Une fois de plus, comme le dit l’adage, qui trop embrasse mal étreint. Le collage est foisonnant, mais il nous garde en surface. Certaines scènes manquent de rythme ou de tension, d’autres encore se terminent avant de nous avoir convaincus de leur pertinence. Alors que plusieurs tableaux auraient mérité d’être menés plus rondement, certains, comme l’extrait d’Un mot pour un autre de Tardieu, celui des Voisins de Meunier et Saia, ou encore le sketch du restaurant « Cheeseburger Cheeseburger » de SNL, sont à crouler de rire. Le soir de la première, grâce aux hilarants Simon Duchesne et Fabrice Girard, l’improvisation de la toute fin était également fort réussie.
Diversifié, le panorama donne à apprécier plusieurs registres comiques : de gestes, de mots, de situation, de caractère et de répétition, mais aussi le comique de moeurs, l’absurde et la satire sociale. Nés respectivement en 1963 et en 1964, Daniel Brière et Alexis Martin laissent entrevoir avec ce spectacle les fondements comiques de leur génération. Après ce premier volet, en quelque sorte historique, le second, qui sera présenté au printemps 2025, permettra aux interprètes, qui signeront alors le texte et la mise en scène, d’exposer ce qui les fait rire. Ce sera l’occasion de mesurer le décalage forcément révélateur entre l’humour des babyboomers et celui des millénariaux.
Diversifié, le panorama donne à apprécier plusieurs registres comiques : de gestes, de mots, de situation, de caractère et de répétition, mais aussi le comique de moeurs, l’absurde et la satire sociale
Rires Collage de textes et mise en scène : Daniel Brière et Alexis Martin. Une production du Nouveau Théâtre expérimental. À l’Espace libre jusqu’au 4 mai.