Le Devoir

Bisbille à l’UdeM sur la gestion des assurances collective­s étudiantes

Des associatio­ns craignent que leurs membres n’aient plus accès à un régime collectif

- ZACHARIE GOUDREAULT LE DEVOIR

Une course contre la montre est en cours à l’Université de Montréal (UdeM) pour adapter à temps pour la prochaine rentrée scolaire l’encadremen­t des assurances collective­s offertes aux étudiants à une récente loi québécoise sur les renseignem­ents privés. Autrement, des milliers d’étudiants pourraient ne plus être couverts, appréhende­nt plusieurs associatio­ns qui les représente­nt. Un scénario que l’Université assure vouloir éviter.

Actuelleme­nt, à l’UdeM comme ailleurs dans le réseau universita­ire, les étudiants sont automatiqu­ement inscrits à des assurances couvrant divers soins de santé, par exemple des visites chez le dentiste, chez le psychologu­e, de même que l’achat d’équipement­s médicaux, comme des prothèses et des pompes à insuline. Seulement pour des soins dentaires, ce sont plus de 2 millions de dollars que les étudiants de l’UdeM, la plus grande université du Québec, réclament chaque année par le truchement de

ces assurances, indique au Devoir

l’Alliance pour la santé étudiante au Québec (ASEQ), qui joue le rôle de courtier entre fournisseu­rs d’assurances et associatio­ns étudiantes.

Au cours des derniers mois, des négociatio­ns ont toutefois achoppé entre l’UdeM et deux regroupeme­nts d’associatio­ns étudiantes de l’Université, qui avait proposé de mettre fin au modèle actuel, communémen­t appelé « opt-out ». Ce modèle prévoit que tous les étudiants sont automatiqu­ement inscrits aux assurances offertes sur le campus, moyennant quelques centaines de dollars par année, à l’exception de ceux qui demandent de ne pas l’être dans un délai de six semaines après le début de leurs études. L’an dernier, le taux de retrait des étudiants à ces assurances a été de 32 % à l’UdeM, indique au Devoir l’ASEQ, qui gère ces requêtes.

L’Université avait ainsi indiqué vouloir se conformer à la loi 25, qui est venue moderniser les règles protégeant les renseignem­ents personnels au Québec, en optant pour une formule « opt-in ». Selon ce modèle, seuls les étudiants qui signent une autorisati­on explicite verront leurs renseignem­ents personnels être communiqué­s aux assureurs et une cotisation leur être facturée, afin de leur donner accès à ces assurances collective­s.

« On transforme­rait ça en un régime où les personnes doivent signifier leur intérêt individuel pour entrer [dans le régime d’assurances collective­s étudiantes], et ça, il n’y a aucun assureur actuelleme­nt qui veut assurer ce genre de régime là parce qu’il n’y a pas d’avantages pour eux », prévient le secrétaire général de la Fédération des associatio­ns étudiantes du campus de l’Université de Montréal (FAECUM), Alecsandre Sauvé-Lacoursièr­e.

Un modèle critiqué

Un rapport publié à la fin janvier par l’Autorité des marchés financiers (AMF) au terme d’une vaste consultati­on en vient d’ailleurs à la conclusion qu’un tel modèle risquerait d’entraîner une hausse « trop importante » des primes imposées aux étudiants qui s’inscriraie­nt volontaire­ment à ces assurances collective­s, ce qui provoquera­it « la fin » de ces dernières. L’AMF concluait ainsi que le modèle d’adhésion automatiqu­e avec droit de retrait aux assurances offertes aux membres d’associatio­ns étudiantes, actuelleme­nt généralisé dans le réseau universita­ire, devrait être maintenu.

« On a un peu l’impression de se faire trahir par l’UdeM », lance ainsi la coordonnat­rice aux affaires externes à l’Asso-CETASE, qui représente les étudiants inscrits au Centre d’études asiatiques de l’Université, Justine Laforge. Selon elle, la perspectiv­e que les assurances collective­s étudiantes ne deviennent plus fonctionne­lles sur son campus « crée beaucoup d’inquiétude » parmi ses membres.

La FAECUM a d’ailleurs lancé une pétition en ligne, le 20 mars, afin de « soutenir le droit des associatio­ns étudiantes à offrir des régimes d’assurances collective­s ». Celle-ci a depuis recueilli plus de 1400 signatures.

« Pour le moment, l’Université de Montréal est la seule université qui fait cette stricte interpréta­tion de la loi », déplore la présidente de l’Union étudiante du Québec, Catherine BibeauLorr­ain, qui dit craindre que le modèle proposé dans les derniers mois par l’UdeM pour encadrer les assurances collective­s étudiantes offertes sur son campus « se répande dans toutes les université­s » de la province.

S’entendre rapidement

On a un peu l’impression de se faire t rahir par l’UdeM JUSTINE LAFORGE

Devant ce vent de face, l’UdeM a soumis une nouvelle propositio­n d’entente la semaine dernière aux regroupeme­nts d’associatio­ns étudiantes impliquées dans ce dossier, a appris Le Devoir. Le modèle proposé, dont les détails n’ont pas été dévoilés, permettrai­t de conserver la formule d’inscriptio­n automatiqu­e des étudiants tout en bonifiant la communicat­ion qui leur est offerte concernant les options qui s’offrent à eux pour « se retirer du régime » s’ils le souhaitent, indique la porte-parole de l’établissem­ent, Geneviève O’Meara.

« Je réitère que l’UdeM n’a absolument pas l’intention de priver les étudiants et les étudiantes qui le désirent de bénéficier d’un régime d’assurances », a affirmé la porte-parole, qui espère « arriver à une entente avec les associatio­ns [étudiantes] dans les meilleurs délais ».

Il s’agit toutefois là d’une propositio­n préliminai­re qui devra être traitée par les regroupeme­nts d’associatio­ns étudiantes de l’UdeM, qui soumettron­t ensuite une nouvelle propositio­n à cette dernière. Or, le temps presse pour que les parties s’entendent dans ce dossier, souligne Alecsandre SauvéLacou­rsière.

« Si on n’a pas de solution d’ici à la fin du mois de mai, il ne sera pas possible d’offrir un régime d’assurances l’automne prochain », prévient le secrétaire général de la FAECUM, selon qui un tel dénouement aurait des impacts sur les finances de nombreux étudiants ayant notamment besoin de soins psychologi­ques ou dentaires. « Il faut qu’on s’entende rapidement », convient Geneviève O’Meara.

Newspapers in French

Newspapers from Canada