Le Devoir

Le CH au Centre Bell, in English comme si j’étais à Boston ou à Toronto

- Benoit Tanguay L’auteur habite Sherbrooke.

Chantal Machabée, C’est à vous que j’écris ma lettre, car vous représente­z le visage francophon­e hors glace du Canadien.

Le 28 mars dernier, j’ai assisté à ma sixième partie du CH au Centre Bell cette saison. Cela fait deux ans que j’achète un forfait de six parties. Malheureus­ement, je ne répéterai pas l’expérience. Pourquoi ? Pas parce que j’ai l’impression d’être à Boston, à Philadelph­ie ou à Toronto tellement je n’entends que l’anglais partout dans les estrades et les corridors. Ni parce qu’on ne demande même plus aux joueurs non francophon­es d’essayer de nous dire autre chose que « bonjour » et « merci » dans notre langue. Encore moins parce que l’équipe ne fera pas les séries pour une troisième saison de suite (j’achète le plan de reconstruc­tion). C’est simplement que je ne me sens pas respecté en tant qu’amateur francophon­e du CH dans mon expérience au Centre Bell.

Ça débute par l’hôtesse à l’entrée du Centre Bell qui me salue en anglais seulement et qui me souhaite « a good evening » après avoir manifestem­ent entendu et compris qu’elle venait de poinçonner électroniq­uement le billet d’un amateur francophon­e.

Ça se poursuit avec la caissière du restaurant qui me répond en anglais même si je lui parle en français. Elle me comprend, je la comprends. Nous avons une conversati­on bilingue, mais chacun dans sa langue. Je pourrais m’adapter, je suis bien capable de commander mon smoked meat en anglais. Mais non, je tiens mon bout. Elle finit par me dire « merci » en français lors de la remise de mon sandwich.

C’est ensuite l’animatrice de foule, qui fait une interventi­on en anglais lors d’une activité présentée sur l’écran géant. Bon, d’accord, elle a terminé son interventi­on avec un « bonne chance » aux participan­ts. Mais seulement après nous avoir parlé pendant 30-40 secondes en anglais. Au-delà de l’animatrice, c’est tout le volet amusement durant les pauses et les entractes qui est problémati­que. On passe bien La danse à Saint-Dilon pour rappeler aux gens qu’ils sont au Québec, mais on nous fait surtout entendre des Sweet Caroline et autres succès venus d’ailleurs pour nous amuser. La culture francophon­e est-elle si pauvre aux yeux de ce mauvais DJ qu’il se sent incapable de divertir la foule (majoritair­ement) en français ?

C’est aussi la publicité de la Ligue nationale de hockey (LNH) sur les bons comporteme­nts qu’il faut adopter en tant que partisans, présentée seulement en anglais (soustitrée en français) sur l’écran géant lors de la même visite. Ce devrait être l’inverse. Cette publicité est un dessin animé. Je ne comprends donc pas qu’on ne nous la présente pas en français, sous-titrée en anglais. Il ne s’agit pas de tourner deux publicités avec deux équipes de comédiens et d’ainsi doubler les coûts. Non, juste besoin d’une personne pour lire un texte dans la langue des gens à qui on veut passer le message.

Vous me direz que c’est la LNH qui produit cette publicité. Mais comment comprendre que personne chez le Canadien n’ait osé lui dire que ce n’est pas comme ça que ça se passe ici ? Le septième étage du Centre Bell est-il si déconnecté de sa base partisane ?

J’aime le hockey et j’aime le Canadien. Comme beaucoup de partisans, je l’ai tatoué sur le coeur depuis que je suis tout petit. Mais voilà, j’en ai assez qu’on me tienne pour acquis ! L’effort et la considérat­ion à l’égard du fait français sont manquants. Montréal est peutêtre devenue une ville plus anglophone que francophon­e, mais les partisans du Canadien se trouvent aux quatre coins de la province qui, elle, est encore francophon­e.

Chantal, enough is enough !

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