Dans le sud des États-Unis
« Je me tenais dans les bars au fin fond de la Louisiane. Je voulais jouer, mais ça a été long. Ça a pris un mois avant qu’on me laisse embarquer sur le stage. Même jouer dans la rue, c’était pas évident. Ça niaisait pas. Entre musiciens, là-bas, l’argent est dur à gagner. J’ai compris là que tu peux pas aller là en touriste et penser que tu vas t’intégrer. T’écoutes pas Muddy Waters de la même façon, après. »
L’émotion dans la modulation
Il n’a pas encore joué aux États-Unis. Mais il a quelques centaines de scènes locales au curriculum, un microalbum et trois albums de ses chansons, deux en français, un en anglais, et tout ce qu’il fait est imprégné de blues, de country, de soul. Plus que jamais, sa québécitude est nord-américaine. « J’aime ça, des cuivres qui lèvent peu à peu dans une toune, et puis ça explose au refrain, et puis tu peux ramener ça au strict minimum. Écouter les artistes qui ont enregistré chez Stax à Memphis, ça t’apprend à moduler ! »
Varier les effets, maximiser le potentiel émotionnel, c’est ce qu’il a fait plus que jamais d’un bout à l’autre de Delta Keb Mojo, avec l’aide experte du guitariste Ariel Posen. Allez écouter Au bout de la nuit, vivez ce moment où l’orchestre passe du plein régime à presque rien. Une guitare, un peu de basse. « Le solo qu’il fait, tu as l’espace pour le recevoir au coeur, c’est pas fondu dans l’ensemble. » Et puis ça repart, progressivement, jusqu’à la finale massive. « L’idée, c’est de se donner du souffle avant la dernière poussée. »
Allez écouter
Au bout de la nuit, vivez ce moment où l’orchestre passe du plein régime à presque rien
Bâtir chez soi
Dans Coeur polaire, au centre vivant du disque, la fonte est longue, mais inexorable. L’intensité augmente. Pensez Try a Little Tenderness, par Otis Redding. Mais vécue dans les pays d’en haut. « Ce sont les moyens que j’ai trouvés pour bâtir quelque chose chez nous. Je ne sais pas si je finirai par faire des tournées dans le Deep South. J’aimerais ça, mais ce n’est peut-être pas nécessaire. La musique est dans moi. Je veux jouer mes chansons, c’est tout. »
Le prochain album sera réalisé par Antoine Gratton. « C’est avec lui que j’ai fait Hard Times and Broken Mind, en 2021. C’était le volume 1. On a déjà des tounes pour le volume 2. Antoine, pour les arrangements, c’est un génie. J’ai déjà hâte. » D’ici là, Raphaël Dénommé a des shows plein les terres humides de chez nous (celles qu’on n’a pas encore remblayées) : il enchaînera les festivals au Québec tout l’été.