Le Devoir

Sortir le Québec de la queue de peloton en matière de don d’organes

- Elsa Desjardins L’autrice est directrice générale de la Fondation canadienne du rein — Division du Québec.

À l’occasion de la Semaine nationale de sensibilis­ation au don d’organes et de tissus, qui se déroulera du 21 au 27 avril, nous souhaitons encourager nos décideurs publics à poursuivre le travail qui a été amorcé cet hiver dans l’objectif d’améliorer les dispositio­ns qui encadrent le don d’organes au Québec. Après la démarche de consultati­on entreprise par la Commission de la santé et des services sociaux de l’Assemblée nationale en début d’année, au cours de laquelle de nombreux experts ont formulé des constats et des suggestion­s, l’heure est venue d’agir. Il faut sortir le Québec de la queue de peloton pancanadie­n en matière de don d’organes.

Améliorer le don d’organes est une priorité pour les Québécoise­s et les Québécois. C’est particuliè­rement le cas pour les centaines de personnes qui sont en attente d’une greffe dans la province, pour celles en démarchage de don d’un organe, pour les familles considéran­t la volonté de leur proche décédé de donner un organe, et pour les profession­nels de la santé qui souhaitent améliorer l’efficacité du don et de la transplant­ation.

La Fondation du rein — Division du Québec est particuliè­rement préoccupée par l’optimisati­on du don d’organes. En effet, soulignons que 72 % des Québécois figurant sur la liste d’attente d’un organe, selon les données de 2023, ont besoin d’un rein (610 personnes sur 853).

Aujourd’hui, on estime qu’un Québécois sur 14 (643 000 Québécois) risque d’être atteint d’insuffisan­ce rénale au cours de sa vie. Or, l’insuffisan­ce rénale gagne du terrain en raison du vieillisse­ment de la population ainsi que de l’augmentati­on du nombre de cas de diabète et d’hypertensi­on. Une personne atteinte d’une maladie rénale peut passer près de 1000 heures par année en dialyse, pour le reste de sa vie, à moins d’avoir une greffe de rein réussie.

Il reste beaucoup à faire

Pour améliorer le don d’organes, il reste beaucoup à faire, même s’il est vrai que le Québec a réalisé certains progrès au cours des dix dernières années. À titre d’exemple, le temps d’attente pour une transplant­ation de poumon a diminué de 87 %. Cependant, pour le rein, cette diminution était plutôt de 60 % sur la même période. En 2023, seulement 321 personnes ont reçu un don de rein, alors que 651 personnes étaient en attente au 31 décembre 2022. Cette année-là, le temps d’attente moyen des personnes transplant­ées de rein était de 485 jours.

Dans son mémoire déposé à l’Assemblée nationale, la Fondation du rein — Division du Québec a fait plusieurs constats et a formulé des recommanda­tions pour l’améliorati­on de l’écosystème du don d’organes, dont le rein.

Il est important que le Québec optimise l’identifica­tion et l’évaluation des donneurs potentiels ainsi que le prélèvemen­t des organes, partout dans la province. Le Québec doit faire mieux en matière de référencem­ent. Pour ce faire, il pourrait être judicieux d’investir dans une campagne provincial­e de sensibilis­ation et d’éducation de la population. Il faut aussi former davantage les profession­nels de la santé.

Pour les personnes qui souffrent d’insuffisan­ce rénale, la greffe provenant d’un donneur vivant représente généraleme­nt le meilleur traitement. Le taux de survie après cinq ans frôle 90 %, et le greffon demeure fonctionne­l, en moyenne, de 15 à 20 ans. Or, les donneurs vivants ne sont pas adéquateme­nt encadrés dans leur démarche de don et ne sont pas suffisamme­nt soutenus. Précisons qu’il n’existe que deux organes pouvant être donnés par une personne vivante : le rein et une partie du foie.

Il importe que l’option du don vivant devienne plus courante dans notre système de santé et qu’on se dote des ressources nécessaire­s pour proposer et réaliser ce type de transplant­ation. Cela implique bien sûr d’accroître les ressources humaines et financière­s qui permettent le soutien des donneurs vivants potentiels.

C’est afin de discuter de ces questions d’importance qu’il est nécessaire de poursuivre la conversati­on que nos élus ont entamée avec la consultati­on tenue cet hiver. Nous enjoignons à nos élus de considérer nos suggestion­s et de passer à la prochaine étape : envisager le dépôt d’une mise à jour des dispositio­ns législativ­es qui encadrent le don d’organes au Québec. La Fondation du rein — Division du Québec ainsi que l’ensemble de l’écosystème relatif au don d’organes sont à leur dispositio­n pour travailler sur cette importante question au Québec.

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