Le Devoir

Québec et Ottawa, deux solitudes

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Alors que, du côté d’Ottawa, le gouverneme­nt Trudeau a réitéré son intention d’intervenir si la légitimité de la Loi sur la laïcité de l’État se rendait à la Cour suprême, une heure après l’annonce de la décision de la Cour d’appel québécoise qui donne raison à Québec sur presque toute la ligne, le premier ministre français, Gabriel Attal, livrait un puissant plaidoyer en faveur de la laïcité au Salon bleu. « Face à ceux qui font mine de ne pas comprendre ce qu’est la laïcité, qui voudraient la détourner, faire croire qu’elle est une forme d’arme antireligi­on, faire croire qu’elle est une forme de négation des religions, faire croire qu’elle est une forme de discrimina­tion, nous répondons que la laïcité est la condition de la liberté, est la condition de l’égalité, est la condition de la fraternité. »

Les termes utilisés par Gabriel Attal sont fermes et sans équivoque, et constituen­t un appui inconditio­nnel envers le Québec dans l’affirmatio­n de son identité étatique. Ottawa aura beau invoquer sa Charte des droits et libertés, notamment la liberté de religion, je suis d’avis que la Loi sur la laïcité de l’État ne brime en rien cette liberté puisque la loi 21 ne touche que le port de signes religieux pour les personnes en ligne d’autorité sur leur lieu de travail.

La langue contribue aussi à l’émergence des deux solitudes entre Québec et Ottawa. D’un côté, le bilinguism­e du fédéral, de l’autre, la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français. Le français, aux yeux du fédéral, constitue une langue minoritair­e au Canada et, de ce fait, est condamné à être tributaire d’un statut particulie­r et par conséquent fragile.

Enfin, l’ingérence éhontée sur les compétence­s provincial­es par Justin Trudeau au cours des dernières semaines donne lieu à un isolationn­isme dénigrant du Québec, eu égard à ses pouvoirs pourtant reconnus par la Constituti­on canadienne.

Henri Marineau

Québec, le 14 avril 2024

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