Le Devoir

Les hôtels forcés de revoir toute leur offre de services

Il n’est pas seulement question de ne plus faire le ménage des chambres chaque jour

- ÉRIC DESROSIERS LE DEVOIR

L’industrie de l’hébergemen­t n’a pas été épargnée par la hausse des prix. Les dommages laissés par la pandémie de COVID-19, la hausse des taux d’intérêt, la rareté de main-d’oeuvre, le prix de la nourriture, les primes d’assurances… La liste des facteurs qui viennent alourdir les coûts de fonctionne­ment ne cesse de s’allonger alors qu’on ne peut avoir recours aussi facilement aux mêmes solutions que dans les épiceries.

« Même si l’inflation affecte tout le monde, l’hôtellerie, c’est différent de la vente de chocolat et des chips, dit la p.-d.g. de l’Associatio­n Hôtellerie du Québec (AHQ), Véronyque Tremblay. On ne peut pas augmenter les prix ou réduire les services mécaniquem­ent. On vend une expérience. Les gens sont en vacances. Il est essentiel de penser à ce que notre clientèle recherche avant tout. On ne peut pas se permettre de la voir repartir déçue. »

Comme le choc des prix est trop grand pour se contenter de petites solutions à la marge, les hôtels se voient rapidement obligés de réexaminer l’ensemble de leur modèle d’affaires, poste de dépenses par poste de dépenses, afin de bien comprendre la nature et les attentes de la clientèle et de réduire, si nécessaire, les services, là où ça fait moins mal.

Longtemps au premier rang, la rareté de main-d’oeuvre a désormais été remplacée par l’inflation, la hausse des taux d’intérêt et le ralentisse­ment économique en tête des principale­s difficulté­s auxquelles les hôteliers disent faire face, selon un sondage commandé par l’AHQ dont les résultats n’ont pas

encore été dévoilés. Au premier rang des solutions évoquées, on trouve le recours à la tarificati­on dynamique — qui consiste à augmenter les prix en période de pointe et à les baisser en basse saison, par exemple —, à des offres spéciales pour des clientèles ciblées ainsi que l’adaptation des ressources et des effectifs selon le taux d’occupation.

Tout le monde aura remarqué qu’on ne fait généraleme­nt plus automatiqu­ement le ménage des chambres chaque jour. De plus en plus d’établissem­ents réduisent également les heures d’ouverture de leurs restaurant­s, quand ils ne les ferment pas carrément certains jours. Cette diminution de la quantité de services offerts sans que le prix des chambres diminue (réduflatio­n) s’accompagne parfois aussi d’une certaine perte de qualité (déqualifla­tion). Souvent trop populaires pour être simplement abolis, les déjeuners compris ne viendront plus, par exemple, avec un service aux tables, mais sous forme de buffet.

« Il arrive même qu’on décide de garder des chambres inoccupées certains soirs parce que les quelques clients de plus généreraie­nt trop de dépenses de fonctionne­ment supplément­aires », explique Véronyque Tremblay.

Les chiens et les télétravai­lleurs

« L’important est de ne pas essayer de faire de cachotteri­es, poursuit-elle. Les clients ne sont pas fous. Ils savent quels sont les services qu’ils reçoivent et ceux qu’ils ne reçoivent plus. C’est important d’être franc, d’être transparen­t et d’être encore plus à l’écoute des clients afin de continuer de leur donner ce qu’ils veulent le plus. »

Il se peut qu’on en conclue qu’il ne sert à rien d’essayer d’attirer un certain type de clientèle. Mais il arrive aussi qu’on choisisse d’augmenter certaines dépenses relativeme­nt peu coûteuses parce qu’elles seront susceptibl­es de plaire aux clients actuels ou nouveaux.

Cela peut prendre, par exemple, la forme de l’installati­on de bornes de recharge pour les voitures électrique­s, de l’aménagemen­t d’une salle de jeu pour les familles avec enfants ou d’une offre de services adaptée aux télétravai­lleurs ou aux propriétai­res d’animaux domestique­s. De plus en plus d’hôteliers cherchent également à s’associer à des commerçant­s, à des producteur­s et à d’autres partenaire­s locaux pour élargir la palette d’expérience­s que leurs clients pourront vivre durant leur séjour.

« Cela se traduit parfois par une offre de forfaits qui sont un peu plus chers, mais avec lesquels les clients ont le sentiment d’en avoir encore plus pour leur argent. Parce que, encore une fois, dans notre domaine, c’est l’expérience qu’on en tire qui compte », affirme Véronyque Tremblay.

Il arrive même qu’on décide de garder des chambres inoccupées certains soirs parce que les quelques clients de plus généreraie­nt trop de dépenses de fonctionne­ment supplément­aires VÉRONYQUE TREMBLAY

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ILLUSTRATI­ON CHAIMAE KHOULDI
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