Le Devoir

Repenser la gestion de l’eau dans les municipali­tés

- LEÏLA JOLIN-DAHEL

Aider les villes et les villages à s’adapter aux changement­s climatique­s, à réduire les risques d’inondation, à moderniser les infrastruc­tures de traitement des eaux, à mieux administre­r les eaux usées, à assurer l’accès à l’or bleu potable en quantité suffisante… Ce sont quelques-uns des défis auxquels vise à répondre la nouvelle Chaire municipale en gestion durable de l’eau, créée en février dernier.

Le projet, dirigé par l’Institut national de la recherche scientifiq­ue (INRS), est issu d’un partenaria­t avec la Fédération québécoise des municipali­tés (FQM). Il s’agit d’une initiative unique pour la FQM, qui s’associe pour la première fois avec une chaire de recherche. « Si on doit gérer l’eau, c’est évident que ça passe par les municipali­tés. C’était naturel pour nous de se rendre là, parce qu’à peu près tout le monde veut les meilleures méthodes pour s’améliorer », explique Jacques Demers, président de la FQM. Il se réjouit d’ailleurs de cette collaborat­ion, qui permettra de déployer des spécialist­es à la recherche de solutions concrètes sur le terrain.

Le but d’une telle chaire est de consolider les groupes de recherche qui se penchent déjà sur l’or bleu québécois afin d’en perfection­ner sa gestion dans les villes. « On voulait le faire de façon plus efficace et que ça réponde vraiment aux besoins les plus criants des localités », souligne Sophie Duchesne, professeur­e et chercheuse à l’INRS. L’idée est de réunir toutes les parties prenantes autour d’une même table afin de définir les priorités de recherche, ajoute celle qui est également titulaire de la Chaire municipale en gestion durable de l’eau.

Plusieurs champs de recherche

La chaire vise d’abord et avant tout à préserver la ressource essentiell­e qu’est l’or bleu au Québec, résume M. Demers. « On sait qu’il faut la protéger et du mieux qu’on peut », dit-il. Ces découverte­s peuvent donc servir à renforcer la résilience devant les risques d’inondation, à mieux gérer les eaux usées, etc. « De quelle façon peut-on utiliser nos équipement­s pour avoir moins d’eaux usées à traiter et le faire d’une meilleure manière ? » demande M. Demers. Les travaux peuvent également s’atteler à la question des eaux pluviales et aux défis d’alimentati­on en eau potable, ajoute de son côté Mme Duchesne.

Contrairem­ent au mythe tenace comme quoi l’eau ne manque pas dans la province, de multiples localités éprouvent déjà des problèmes d’approvisio­nnement. Certains endroits à différents moments de l’année peuvent voir leurs réserves chuter à un degré critique. « Plusieurs petites municipali­tés utilisent les puits souterrain­s. Quand on a des épisodes où il y a moins de précipitat­ions pendant quelques semaines, durant l’été par exemple, le niveau des nappes descend. Donc, souvent, les puits ne sont plus suffisants pour fournir à la demande de ces villages », illustre M Duchesne. me

Cela fait également en sorte que certaines municipali­tés doivent freiner leur développem­ent, par manque de sources d’eau. Des secteurs doivent désormais interdire la création de résidences, faute de nappes phréatique­s convenable­s. « Ce sont des analyses dont nous avons de plus en plus besoin pour prendre des déciveau sions : à quel endroit construire ? À quel volume ? » soulève M. Demers.

Certaines villes de taille moindre ne disposent pas des mêmes infrastruc­tures que les grands centres urbains. Afin d’assurer une qualité égale des équipement­s et des services fournis aux citoyens, plusieurs se demandent quels sont les moyens d’y parvenir. « Il y a aussi une question de coût. C’est vraiment parmi nos préoccupat­ions », souligne le président de la FQM.

Ainsi, plusieurs municipali­tés ont à la fois des défis concernant les installati­ons adéquates et les quantités d’eau disponible­s. « Quand on développe des infrastruc­tures, c’est selon le climat qu’on a connu dans le passé. On a conçu des puits avec un certain niveau d’eau. Mais s’il est plus bas, ça ne va pas bien fonctionne­r. Donc, c’est un problème au nides infrastruc­tures », détaille Mme Duchesne.

Mais certaines municipali­tés éprouvent plutôt des problèmes à la source, spécialeme­nt celles qui s’alimentent en eau souterrain­e. « Il peut y en avoir d’autres plus loin, on peut faire un autre puits, mais ça représente des coûts, poursuit la chercheuse. Et malheureus­ement, avec les changement­s climatique­s, ce sont des choses qui vont empirer dans le futur. »

Quelques pistes de solutions

Afin d’assurer de l’or bleu en quantité et en qualité suffisante­s pour tous, il est possible de diminuer notre consommati­on d’eau, propose Mme Duchesne. « Mais ça peut être aussi de développer de nouvelles techniques pour réduire les pertes dans les réseaux. »

Une saine gestion implique également la baisse des débordemen­ts d’eaux usées durant les épisodes de pluie. Cela peut également consister à végétalise­r certaines infrastruc­tures, comme des stationnem­ents avec des pavages perméables, pour que l’eau laissée par les précipitat­ions s’infiltre au lieu de l’envoyer dans les égouts. « Ce sont toutes des choses pour lesquelles des solutions existent déjà. Mais nous, ce qu’on cherche, c’est comment on peut faire tout ça à moindre coût de la façon la plus efficace possible. »

« De quelle façon peut-on utiliser nos équipement­s pour avoir moins d’eaux usées à traiter et le faire d’une meilleure manière ? »

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GUILLAUME LEVASSEUR ARCHIVES LE DEVOIR Le but de la Chaire municipale en gestion durable de l’eau est de consolider les groupes de recherche qui se penchent déjà sur l’or bleu québécois afin d’en perfection­ner sa gestion dans les villes.

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